Du concept de communauté
Nous commençons par un article de Rita Hermon-Belot, Historienne, Maître de conférences à l’EHESS Paris, directrice du Centre d'Etudes Interdisciplinaires des Faits Religieux (CEIFR) publié le 27 avril 2012 dans la revue Archives de sciences sociales des religions. Dans cet article, intitulé « La communauté, mot-piège ? Après les attentats de Montauban et de Toulouse (France, mars 2012) » elle déconstruit la notion de communauté qui semble être une spécificité française réservée uniquement aux juifs et aux musulmans. Pour l’auteur « Le fait même que ne viendrait à personne l’idée de parler de « communauté catholique » ou même de « communauté protestante » si les membres ou les intérêts des fidèles de ces religions étaient menacés devrait nous alerter ». En effet, c’est bien vite oublier la diversité des courants et des identités composants ses « communautés ». Comble du comble, c’est nier l’esprit de la loi de 1905 sur la laïcité qui a « créé les conditions d’une véritable égalité, non seulement entre les cultes, mais entre les différentes expressions et courants en leur sein ». Les « communautés » ne seraient donc qu’un phantasme franco-français. De l’intérieur, elles permettraient à certains de leurs membres un repli identitaire, pendant qu’« à l’extérieur, elles prêtent à la méconnaissance, à l’effusion dans les moments d’émotion partagée, mais aussi, le plus souvent à l’amalgame et à la stigmatisation ». De plus, « Dessiner ainsi deux communautés, juive et musulmane, fait courir le risque de la polarisation sur fond d’importation des conflits du Moyen-Orient et parfois d’identification à leurs protagonistes ». C’est pourquoi pour l’auteur, il est urgent de « passer de cette communauté imaginée à des communautés plurielles, objets d’une connaissance qui survive à l’émotion et peut-être, à partir de là, d’une reconnaissance. »
Islamophobie ou victimisation ?
Vérifies toi même, As tu l’islamophobie ?
Donnant raison à Rita Hermon-Belot sur le danger de repli identitaire, dans un article intitulé « Critique du concept d'islamophobie » paru dans le Monde le 05/07/2012, Nasser Suleiman Gabryel, conseiller de la Fondation Hélios pour le dialogue et le développement, enseignant chercheur en sociologie politique affirme que l’islamophobie « contient une portée communautariste et défensive […] négative ». Pour l’auteur, l’islamophobie : «discours creux et victimaire vocable d'une inculture intellectuelle», « vision faussée », « concept politiquement correct », « "mot valise" susceptible de garantir une rente de situation à tous nos victimaires institutionnels » ne conduirait qu’à « nous entraîner dans la guerre des identités » et le repli communautaire. Il ne s’agirait que d’une idéologie « dure du narcissisme culturel » ou encore de « type islamo-centriste ». Cette construction idéologique, ne serait le fait que de quelques intellectuels, utilisant les médias pour auto-justifier leurs thèses, isolant « cette problématique des autres effets de la mondialisation et de la mixité culturelle ou sociale », s’appuyant « sur un consensus négatif d'une frange des quartiers populaires dont les principaux lieux de la socialisation sont en crise » et permettant ainsi l’éclosion « de nouveaux concepts tout aussi pernicieux (accommodement raisonnable, charia de minorité) » acceptés avec soulagement par une partie de la population auto-culpabilisante (Sic !) . En dernier ressort, « l’islamophobie » ne serait « qu’une réduction intellectuelle qui fait d'un aspect particulier (l'islam), le facteur explicatif global de toutes les problématiques ; une réduction conceptuelle qui essentialise de manière distinguée les catégories identitaires. »
Quelques faits tangibles...
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Pour le lecteur, qui se mettrait soudainement à douter de la réalité de cette islamophobie, nous lui recommandons la lecture du rapport 2012 sur l’islamophobie en France (fournit en pièce jointe ci-dessous) rédigé par le Collectif Contre l’Islamophobie en France (CCIF) et dont le Monde c'est fait l'écho en avril 2012. Le rapport commence justement par une tentative de définition du terme « islamophobie » : «Ensemble des discriminations et des actes de rejet, violences, verbales ou physiques qui visent des individus (ou des institutions) en raison de leur appartenance supposée à la religion musulmane.». Dans une seconde partie (la plus intéressante à notre avis), il aborde ensuite les aspects qualitatifs de l’islamophobie au travers d’une rapide analyse des discours politiques donnés sur les musulmans, du traitement de l’Islam par les médias, des causes de ces stigmatisations (en rejetant l’idée que le contexte économique est la source de l’islamophobie) et surtout du détournement qui est fait de certaines valeurs « perçues comme positives au sein de la société française » de façon à obtenir un consensus islamophobe (Laïcité, liberté, respect…). Vient ensuite un recensement quantitatif, le rapport se concluant par les actions menées par le CCIF. L’annexe, relatant les actes recensés est édifiant et semblant provenir d’un autre âge et à elle seule une réponse à l'artcle précédent.
Le même mois était publié le rapport sur l'islamophobie en Europe d’Amnesty international, intitulé « Choix et préjugés, la discrimination à l’égard des Musulmans » (la version complete en anglais et la version française qui est un extrait de la premiere sont fournies en piece jointe ) .
Discrimination au travail, discrimination dans le scolaire, violation des libertés d’expression ou de religion (loi sur les tenues vestimentaires) sont dénoncées tout au long du rapport. Nous semblons bien loin de la construction « intellectuelle » d’une idéologie.
Enfin, un entretien de Gilles Kepel (vidéo ci dessus), politologue français, spécialiste de l'islam et du monde arabe contemporain, interrogé sur son dernier ouvrage "Banlieue de la République : Société, politique et religion à Clichy-sous-Bois et Montfermeil, Paris, Gallimard, 2012." en compagnie de deux élus de Seine Saint-Denis par la chaine éco finit par nous convaincre que le traitement des musulmans de France, en particulier dans les banlieues, n'est pas nécessairement conforme à l'esprit républicain. Ce sont ici le communautarisme et les causes sociales qui sont invoquées.
Le même mois était publié le rapport sur l'islamophobie en Europe d’Amnesty international, intitulé « Choix et préjugés, la discrimination à l’égard des Musulmans » (la version complete en anglais et la version française qui est un extrait de la premiere sont fournies en piece jointe ) .
Discrimination au travail, discrimination dans le scolaire, violation des libertés d’expression ou de religion (loi sur les tenues vestimentaires) sont dénoncées tout au long du rapport. Nous semblons bien loin de la construction « intellectuelle » d’une idéologie.
Enfin, un entretien de Gilles Kepel (vidéo ci dessus), politologue français, spécialiste de l'islam et du monde arabe contemporain, interrogé sur son dernier ouvrage "Banlieue de la République : Société, politique et religion à Clichy-sous-Bois et Montfermeil, Paris, Gallimard, 2012." en compagnie de deux élus de Seine Saint-Denis par la chaine éco finit par nous convaincre que le traitement des musulmans de France, en particulier dans les banlieues, n'est pas nécessairement conforme à l'esprit républicain. Ce sont ici le communautarisme et les causes sociales qui sont invoquées.
...Vu de l'étranger
Sentiment partagé dans cet article du « the Huffington Post » : “The Islamic Hijab: Is it Really as Oppressive as We Think?” rédigé par le journaliste independent : Preetam Kaushik. Ce dernier à fait le constat que de nombreux américains et européens découvrent avec stupeur (sans vouloir y croire) que la femme musulmane porte « le voile » le plus souvent par conviction et non sous contrainte. Mais il va plus loin qu’à l’accoutumée. Là ou d’habitude on s’arrête au code vestimentaire « ethnique », « culturel », il rappelle à juste de titre, que le port du voile s’inscrit dans des directives plus larges prescrites par Dieu dans le Coran. Directives s’adressant à la fois à l’homme est à la femme : « Invite les croyants à baisser pudiquement une partie de leurs regards et à se préserver de toute souillure charnelle. Cela contribuera à les rendre plus purs, car Dieu est si bien Informé de tous leurs actes. » Sourate 24 verset 30. Dans le verset suivant, on retrouve les modalités pratiques destinées aux femmes, dont le voile. Pour l’auteur, cela fait totalement sens, si l’on prend en compte la vulnérabilité de la femme en ces temps reculés, le voile doit alors être compris comme une mesure de protection plutôt que d’oppression. Il se penche ensuite sur le cas de la France, pays où le voile fait polémique et en vient à conclure que pour une minorité de femmes réellement opprimés, plutôt que de traiter la source de l’oppression, on est prêt à opprimer une majorité de femmes souhaitant porter le voile. Rappelant par souci d’honnêteté que les femmes occidentales sont contraintes à porter le voile dans « quelques pays islamiques » il constate que même si les musulmanes américaines subissent des discriminations leur situation est plus enviable car protégées par la « Civil Rights Law ». Pour conclure, il fait le pari qu’à l’instar du racisme dont l’on a fini par comprendre qu’il n’avait aucune justification possible, on finira peut-être par s’apercevoir que les femmes occidentales ne sont pas aussi libre qu’il n’y parait et que le voile n’est peut-être pas si «injuste» (« unjuste »).
Conséquences
Toujours à l’étranger, à la suite du journal D’Abû Dhabi TheNational et du journal « The Washington Times » le journal Arab News quotidien d’Arabie Saoudite en langue anglaise s’intéresse à la situation des musulmans en occident. Le journal a posté le 4 juillet une critique du livre « Europe’s angry Muslims: The revolt of the second generation» de Robert Leiken, politologue américain spécialiste de l’immigration, publié aux éditions Oxford university press. Suite d’un premier ouvrage publié en 2005, l’auteur réalise ici un focus sur la situation des musulmans là où ils sont le plus présent en Europe, c'est à dire en Angleterre, en France et en Allemagne. Concernant la France, l’auteur s’appuyant sur des travaux menés localement propose la thèse suivante : Les premières vagues d’immigrations concernaient des travailleurs temporaires en provenance d’Afrique du nord, puis en second lieu des exilés politiques qui implantèrent l’idéologie de l’Islam radical. Les premiers, de par leur nombre (désormais 5% de la population européenne), imprégnèrent le continent européen de leur culture et de leur religion. Cependant, peu enclin à la politique ou à tout militantisme aucun problème ne survint avant les années 1980. Si la première génération devait être de passage, la seconde génération est composée de citoyens à part entière désirant s’intégrer. Or celle-ci, en but à la discrimination, à la stigmatisation sur fond de message égalitaire promit par le modèle républicain d'intégration ne peut que constater le décalage entre ses aspirations et la réalité. D’où un ressentiment et une frustration immenses. Or cette jeunesse, se considérant majoritairement comme française, ne pouvant ni se tourner vers ses origines (car rejetées par elles ou les trouvant « passéistes »), ni vers la France, a fini par se tourner vers « the Muslim concept of a global community », une vision idéalisée de l’islam et pour une minorité vers les idées radicales importées dans les années 1970 et relayées par des Imams plus modernes (« with charismatic “street imams” ») que l’on retrouve sur internet véhiculant l’idée que le « déclin » des pays musulmans et dû à l’égarement de leurs citoyens.Au final tous les facteurs rassemblés, le “Muslim postmigrant ‘marginal man’ [who] finds himself suspended between two cultures, neither of which offers him secure footing.” L’auteur aborde ensuite le cas de l’Angleterre, où il considère la situation comme plus critique qu’en France et enfin celui de l’Allemagne. La journaliste Saoudienne fait remarquer que le tableau dressé par Robert Leiken est impartial et devrait être lu par tout raciste ou Islamophobe pour commencer par comprendre avant d’accuser.
Pour finir cette « hyper revue de presse » et afin de "relativiser" nous invitons nos lecteurs à consulter le rapport de l’ONU (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs occupied Palestinian territory) « Five years of blockade: The humanitarian situation in the Gaza strip. » sur la situtation dans la bande de Gaza. La situation présentée est édifiante : pénurie dans tous les domaines, pollution, effondrement économique, de-scolarisation , économie souteraine imposé par le blocus