« [...] depuis quelques années, nous assistons en Belgique et ailleurs en Europe à des débats passionnés autour de ce signe religieux et son interdiction dans les écoles et la fonction publique. Au-delà de la production d’un « problème » du foulard islamique, ce sont nos conceptions et nos représentations de la démocratie, de la laïcité, mais aussi du féminisme et de l'islam, qui sont questionnés.»
Bien que rédigé il y a quelques années déjà, ce texte nous semble tout à fait d'actualité.
Cet article est publié avec l'aimable autorisation de son auteure.
Bien que rédigé il y a quelques années déjà, ce texte nous semble tout à fait d'actualité.
Cet article est publié avec l'aimable autorisation de son auteure.
Le 7 Février 2008, les parlementaires turcs adoptent l'intégralité du projet de révision constitutionnelle aboutissant à la légalisation du foulard islamique à l'Université, au grand dam des défenseurs de la laïcité, qui ont manifesté en masse à Ankara. La question du foulard dit « islamique » représente un des défis majeurs du XXIe siècle sur la scène internationale. Il questionne entre autres, le rapport entre Islam et Occident, deux mondes qui seraient diamétralement opposés. Le concept de « laïcité » est questionné et fait débat, au-delà des frontières en Occident comme dans le monde arabo - musulman.
Alors que le foulard représente le symbole de la visibilité de l’Islam dans l’espace public, il est considéré comme un obstacle majeur à l’émancipation féminine, une menace contre la laïcité et contre une des valeur fondamentale des sociétés européennes : l’égalité des droits entre hommes et femmes.
Ainsi, depuis quelques années, nous assistons en Belgique et ailleurs en Europe à des débats passionnés autour de ce signe religieux et son interdiction dans les écoles et la fonction publique. Au-delà de la production d’un « problème » du foulard islamique, ce sont nos conceptions et nos représentations de la démocratie, de la laïcité, mais aussi du féminisme et de l'islam, qui sont questionnés.
Aujourd’hui, quel bilan tirer de ces débats ? L’esprit de tolérance du principe de laïcité n’est-il pas instrumentalisé au profit d’une « laïcité exclusive » ? Est ce que le foulard est vraiment le symbole de la discrimination de la femme, ne peut-il pas être considéré comme un symbole d’émancipation ? Pourquoi tant de passion et de peur autour de ce signe religieux ? N’est-ce pas une façon de détourner les réels problèmes sociaux et politiques des sociétés européennes, ou une peur inavouée du « péril vert » ? Peut-on parler de l’émancipation de la femme, si on décide de ne pas entendre l’opinion des femmes de confession musulmane dans le processus décisionnel ?
Cette réflexion s'adresse à celles et ceux qui se questionnent sur la réalité du foulard dit islamique et les enjeux véritables de la polémique qui est régulièrement relancée, tout en partageant un même désir, celui de dépassionner les débats et un même refus des manipulations démagogiques.
Les multiples facettes du foulard dit « islamique»
Dans l’inconscient collectif, le foulard n’a d’autres fonctions que d’enfermer la femme musulmane dans l’espace privé, il est synonyme d’oppression et accusé de totalitarisme au point de le comparer à la « croix gammée nazie »[1]. Et pourtant, nous assistons aujourd’hui à une réalité nouvelle : celles de femmes de foi qui n’hésitent plus à investir l’espace public « De stigmatisation et signe d’infériorité, il est en passe de devenir un signe de prise de pouvoir et de prestige. Et cette métamorphose constitue une double déclaration de guerre : d’une part à la conception laïque de l’émancipation féminine, d’autre part à la représentation des hommes musulmans, pour qui le foulard incarne la soumission des femmes »[2]. Nombre de femmes le considèrent désormais comme source de libération et non plus d’oppression.
Alors que ce même foulard a été un temps synonyme de « cache misère », aujourd’hui il traverse les classes sociales : des milieux populaires aux classes bourgeoises. Le sens donné au port du foulard peut aussi varier d’une femme à une autre : tantôt il est vécu comme une quête spirituelle, certaines peuvent le porter par « tradition », d’autres encore le vivent comme un signe identitaire voir comme un étendard politico – religieux selon certains chercheurs …
Quoiqu’il en soit, ce foulard ne cesse de questionner et de déranger … Tant il est chargé de préjugés et de stéréotypes : il est le symbole par excellence de l’asservissement de la femme au service de l’homme.
Par ailleurs, il est instrumentalisé afin de conforter une opposition entre un Occident moderne, éclairé contre un Orient barbare et obscurantiste.
Lors des débats autour du foulard islamique qui ont agité la classe politique mais aussi les mouvements féministes en France et en Belgique : afin de lutter contre le symbole par excellence de l’oppression de la femme, en France, une loi a été votée, et en Belgique, le chef d’établissement peut l’interdire à travers le règlement d’Ordre Intérieur. Or ceux qui justement prétendent se battre pour l’émancipation des femmes, soutiennent et cautionnent une loi et un règlement qui justement renvoient ces écolières vers un espace domestique jugé oppressant par ces mêmes mouvements … Une certaine frange des mouvements féministe auraient dû privilégier la cause pour la libération et la lutte contre toutes les formes de domination et non pas le « symbole ». Nous reviendrons sur ce point.
Dans cette perspective, il convient de préciser que le « voilement » ou le « dévoilement » des femmes ne date pas d’aujourd’hui et a une histoire. À l’époque coloniale déjà, en Algérie, où ces dernières étaient prises en otage au cœur des luttes colonialistes et nationalistes : elles étaient les « gardiennes de la nation » aux yeux des colonisés comme des colonisateurs. Dès le début du XXème siècle certains régimes en place dans le monde arabo musulman ont vu dans le dévoilement des femmes un pas vers la modernité selon le mode occidentale, seul modèle d’émancipation féminine. Prenons à titre d’exemple le cas turc et iranien ou Mustapha Kemal Atatürk et le Shah d’Iran font adopter la tenue dite « occidentale » en imposant le dévoilement pour aller vers plus de modernité. Au Maroc, le roi Mohammed V, père d’Hassan II utilise sa fille comme symbole de libération de la femme marocaine en lui demandant de retirer son foulard en public … Enfin, en Tunisie, Bourguiba interdit formellement le foulard dans la fonction publique. Accéder à la modernité et à la « civilisation » passait par le dévoilement des femmes dans leurs propres pays.
Alors que ce même foulard a été un temps synonyme de « cache misère », aujourd’hui il traverse les classes sociales : des milieux populaires aux classes bourgeoises. Le sens donné au port du foulard peut aussi varier d’une femme à une autre : tantôt il est vécu comme une quête spirituelle, certaines peuvent le porter par « tradition », d’autres encore le vivent comme un signe identitaire voir comme un étendard politico – religieux selon certains chercheurs …
Quoiqu’il en soit, ce foulard ne cesse de questionner et de déranger … Tant il est chargé de préjugés et de stéréotypes : il est le symbole par excellence de l’asservissement de la femme au service de l’homme.
Par ailleurs, il est instrumentalisé afin de conforter une opposition entre un Occident moderne, éclairé contre un Orient barbare et obscurantiste.
Lors des débats autour du foulard islamique qui ont agité la classe politique mais aussi les mouvements féministes en France et en Belgique : afin de lutter contre le symbole par excellence de l’oppression de la femme, en France, une loi a été votée, et en Belgique, le chef d’établissement peut l’interdire à travers le règlement d’Ordre Intérieur. Or ceux qui justement prétendent se battre pour l’émancipation des femmes, soutiennent et cautionnent une loi et un règlement qui justement renvoient ces écolières vers un espace domestique jugé oppressant par ces mêmes mouvements … Une certaine frange des mouvements féministe auraient dû privilégier la cause pour la libération et la lutte contre toutes les formes de domination et non pas le « symbole ». Nous reviendrons sur ce point.
Dans cette perspective, il convient de préciser que le « voilement » ou le « dévoilement » des femmes ne date pas d’aujourd’hui et a une histoire. À l’époque coloniale déjà, en Algérie, où ces dernières étaient prises en otage au cœur des luttes colonialistes et nationalistes : elles étaient les « gardiennes de la nation » aux yeux des colonisés comme des colonisateurs. Dès le début du XXème siècle certains régimes en place dans le monde arabo musulman ont vu dans le dévoilement des femmes un pas vers la modernité selon le mode occidentale, seul modèle d’émancipation féminine. Prenons à titre d’exemple le cas turc et iranien ou Mustapha Kemal Atatürk et le Shah d’Iran font adopter la tenue dite « occidentale » en imposant le dévoilement pour aller vers plus de modernité. Au Maroc, le roi Mohammed V, père d’Hassan II utilise sa fille comme symbole de libération de la femme marocaine en lui demandant de retirer son foulard en public … Enfin, en Tunisie, Bourguiba interdit formellement le foulard dans la fonction publique. Accéder à la modernité et à la « civilisation » passait par le dévoilement des femmes dans leurs propres pays.
Cap sur l’Europe …
Dans l’Union européenne, l’attitude vis-à-vis du voile est loin d’être homogène :
Copenhague, mai 2007, catastrophe symbolique … La Petite Sirène qui trône nue sur son rocher depuis 1913 est retrouvée vêtue d’un voile noir ! Après avoir subie maintes « violences », la voilà voilée … Alors que le débat faisait rage sur la question du foulard, en réaction aux déclarations de la citoyenne Asmaâ Abdoul – Hamid de garder son foulard si elle était élue au parlement danois, le Parti du peuple danois a jugé cet acte comme un affront et souhaite l’interdiction du foulard.
En Allemagne, la cour constitutionnelle avait donné raison à une enseignante afghane qui s’était vue interdire le port du foulard dans une école publique de la région du Bade – Wurtemberg. Les parlements régionaux allemands incitaient alors les écoles de « trouver une réglementation acceptable pour tous ». Et pourtant, mercredi 19 mars 2008, une cour administrative allemande a interdit à une institutrice convertie à l’islam de porter le foulard islamique pendant ses cours dans une école publique, à l’issue d’une longue dispute juridique. La décision prise par le tribunal administratif du Bade-Wurtemberg avalise l’interdiction d’enseigner avec le voile, adoptée en 2004 par l’établissement scolaire de Stuttgart où cette femme musulmane enseigne depuis plus de 30 ans.
Ce jugement va en revanche à l’encontre d’une décision du tribunal administratif de la ville qui, deux ans plus tard, avait donné tort à l’école, au nom de l’égalité de traitement entre les religions. Des religieuses catholiques, avait argumenté le tribunal de Stuttgart, peuvent enseigner avec leur voile dans des écoles publiques du Land.
En Espagne, le foulard islamique est peu soumis à débat public. En cas de conflits, la décision ultime revient aux régions autonomes. En Grèce, des élèves portent le foulard dans les écoles de l'importante minorité musulmane de souche turque de Thrace (nord-est) sans que cela pose de problème.
Enfin, en Belgique, où la question du foulard islamique divise, depuis 2004, les responsables politiques, deux sénateurs francophones de la majorité, la socialiste Anne-Marie Lizin et le libéral Alain Destexhe, réclamèrent une loi "à la française" sur le voile. Pour les deux élus, la Belgique aurait dû adopter des dispositions semblables "à 90%" à celles prévues en France, le terme de "laïcité" étant toutefois remplacé par "neutralité" plus conforme aux traditions belges. Ils évoquent l'égalité homme-femme - affirmée par un article de la constitution belge, la réaffirmation du rôle de l'école "comme lieu d'apprentissage de l'autonomie individuelle et de la conscience critique", ou encore la nécessaire protection des mineures. "À mes collègues qui affirment que le voile émancipe certaines jeunes filles ou relève de leur liberté, je réplique qu'il convient surtout de les protéger contre ceux qui entendent les maintenir dans un statut d'infériorité", explique Alain Destexhe. "Il est profondément anormal que chaque école résolve comme elle peut un problème qui, parfois, est soumis au degré de prosélytisme et de la force d'une communauté musulmane proche", renchérit Anne-Marie Lizin [3]. Il n'existe aucune législation en Belgique interdisant le port du voile à l'école. Toutefois, les directeurs d'établissements scolaires publics ont la possibilité d'inscrire cette interdiction dans les règlements d'école. Une quinzaine d'associations musulmanes se sont élevées contre la proposition des élus belges, estimant qu'"interdire le voile à l'école, dans les hôpitaux et dans les administrations, équivaut à priver le citoyen musulman de la jouissance de ses droits civiques [4].
Dans ce débat, il est central de dire quelques mots sur le cas turc où le foulard a fait son entrée au palais présidentiel par le biais de l’épouse du chef d’état Abdullah Gül … Pire, les députés turcs ont adopté à une écrasante majorité un projet de loi controversé autorisant le port du voile islamique sur les campus, réforme que le camp laïque considère comme une étape supplémentaire dans l'"islamisation" de la société. La réforme portée par le Premier ministre Tayyip Erdogan a été approuvée par 411 voix contre 103 dans un parlement où le parti de la Justice et du Développement (AKP) d'Erdogan, largement majoritaire, était soutenu par les élus du mouvement nationaliste (MHP). Les laïcs dénoncent la régression de la Turquie vers des valeurs archaïques et à l’atteinte de la sacro sainte laïcité au pays de Mustapha Kemal Atatürk.
Copenhague, mai 2007, catastrophe symbolique … La Petite Sirène qui trône nue sur son rocher depuis 1913 est retrouvée vêtue d’un voile noir ! Après avoir subie maintes « violences », la voilà voilée … Alors que le débat faisait rage sur la question du foulard, en réaction aux déclarations de la citoyenne Asmaâ Abdoul – Hamid de garder son foulard si elle était élue au parlement danois, le Parti du peuple danois a jugé cet acte comme un affront et souhaite l’interdiction du foulard.
En Allemagne, la cour constitutionnelle avait donné raison à une enseignante afghane qui s’était vue interdire le port du foulard dans une école publique de la région du Bade – Wurtemberg. Les parlements régionaux allemands incitaient alors les écoles de « trouver une réglementation acceptable pour tous ». Et pourtant, mercredi 19 mars 2008, une cour administrative allemande a interdit à une institutrice convertie à l’islam de porter le foulard islamique pendant ses cours dans une école publique, à l’issue d’une longue dispute juridique. La décision prise par le tribunal administratif du Bade-Wurtemberg avalise l’interdiction d’enseigner avec le voile, adoptée en 2004 par l’établissement scolaire de Stuttgart où cette femme musulmane enseigne depuis plus de 30 ans.
Ce jugement va en revanche à l’encontre d’une décision du tribunal administratif de la ville qui, deux ans plus tard, avait donné tort à l’école, au nom de l’égalité de traitement entre les religions. Des religieuses catholiques, avait argumenté le tribunal de Stuttgart, peuvent enseigner avec leur voile dans des écoles publiques du Land.
En Espagne, le foulard islamique est peu soumis à débat public. En cas de conflits, la décision ultime revient aux régions autonomes. En Grèce, des élèves portent le foulard dans les écoles de l'importante minorité musulmane de souche turque de Thrace (nord-est) sans que cela pose de problème.
Enfin, en Belgique, où la question du foulard islamique divise, depuis 2004, les responsables politiques, deux sénateurs francophones de la majorité, la socialiste Anne-Marie Lizin et le libéral Alain Destexhe, réclamèrent une loi "à la française" sur le voile. Pour les deux élus, la Belgique aurait dû adopter des dispositions semblables "à 90%" à celles prévues en France, le terme de "laïcité" étant toutefois remplacé par "neutralité" plus conforme aux traditions belges. Ils évoquent l'égalité homme-femme - affirmée par un article de la constitution belge, la réaffirmation du rôle de l'école "comme lieu d'apprentissage de l'autonomie individuelle et de la conscience critique", ou encore la nécessaire protection des mineures. "À mes collègues qui affirment que le voile émancipe certaines jeunes filles ou relève de leur liberté, je réplique qu'il convient surtout de les protéger contre ceux qui entendent les maintenir dans un statut d'infériorité", explique Alain Destexhe. "Il est profondément anormal que chaque école résolve comme elle peut un problème qui, parfois, est soumis au degré de prosélytisme et de la force d'une communauté musulmane proche", renchérit Anne-Marie Lizin [3]. Il n'existe aucune législation en Belgique interdisant le port du voile à l'école. Toutefois, les directeurs d'établissements scolaires publics ont la possibilité d'inscrire cette interdiction dans les règlements d'école. Une quinzaine d'associations musulmanes se sont élevées contre la proposition des élus belges, estimant qu'"interdire le voile à l'école, dans les hôpitaux et dans les administrations, équivaut à priver le citoyen musulman de la jouissance de ses droits civiques [4].
Dans ce débat, il est central de dire quelques mots sur le cas turc où le foulard a fait son entrée au palais présidentiel par le biais de l’épouse du chef d’état Abdullah Gül … Pire, les députés turcs ont adopté à une écrasante majorité un projet de loi controversé autorisant le port du voile islamique sur les campus, réforme que le camp laïque considère comme une étape supplémentaire dans l'"islamisation" de la société. La réforme portée par le Premier ministre Tayyip Erdogan a été approuvée par 411 voix contre 103 dans un parlement où le parti de la Justice et du Développement (AKP) d'Erdogan, largement majoritaire, était soutenu par les élus du mouvement nationaliste (MHP). Les laïcs dénoncent la régression de la Turquie vers des valeurs archaïques et à l’atteinte de la sacro sainte laïcité au pays de Mustapha Kemal Atatürk.
Le débat français, la laïcité dévoilée …
Selon l’article 2 de la loi du 9 décembre 2005, « la république ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte », « La France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ». La France est le seul état laïque de l’Union Européenne qui établit une séparation juridique totale de l’église et de l’état.
Depuis le début des années 90, le débat sur le port du foulard islamique fait la une de l’actualité en France et a pris une ampleur disproportionnée.. La question a été relancée en France avec les deux jeunes filles, Alma et Lila, parcequ’elles refusaient de retirer leur voile à l’école. Une loi a donc été adoptée par le parlement français en mars 2004 interdisant les signes religieux ‘ostensibles ‘ à l’école et a divisé les mouvements sociaux et politiques « Le clivage existant en France en effet entre un courant voulant utiliser le pouvoir d’état pour éradiquer la religion et un courant visant a permettre la confrontation pluraliste des croyances et idées s’est prolongé jusqu’à aujourd’hui » [5].
L’objectif de la loi de 1905 est de légiférer sur les conditions de l’exercice des cultes au sein de la république. Il n’est nullement question d’une philosophie anti – cléricale ou négative à l’endroit de la religion qui doit avoir toute sa place dans l’espace démocratique. Les principes sont orientés vers une protection des religions en tant qu’expressions de la liberté de pensée et de croyance comme le soutenait Jean Jaurès. Comme le souligne Catherine Samary, la libre pensée ne doit pas être transformée en « pensée officielle », en « religion d’Etat athée ».
Il ne faut pas être dupe, la loi de mars 2004 est une atteinte directe à la visibilité du foulard islamique dans l’espace public. Pourtant, en 1989, lors des premières « affaires de foulards islamiques »,le conseil d’état avait alors jugé parfaitement compatible le port du foulard et la loi de 1905.
Aussi, nombre de spécialistes de la question que ce débat a malheureusement été instrumentalisée et qu’il a surtout été tronqué. Pour Françoise Lorcerie, les jeunes filles françaises de confession musulmane ont été les premières victimes, mais surtout, elles ont fait les frais de la polémique … Selon le président de la Ligue des Droits de l’Homme, Jean Pierre Dubois, la loi sur le foulard est « une humiliation supplémentaire, parler de réussite est d’un grand cynisme, poursuit-il, en s’en prenant à un symbole, la loi a supprimé la visibilité du problème de l’intégration, mais n’a pas répondu au problème en tant que tel. Qu’est ce que fait cette France de la peur pour aider les jeunes à trouver leur place ? Ces jeunes filles aspirent dans leur immense majorité à faire des études, à exercer un métier, à s’émanciper. Or, une fois de plus on vient de les stigmatiser » ( La Croix, 21.05.2005).
Si le choix de porter le foulard est dénué de toute pression sociale ou familiale, il ne contrevient pas au droit laïque.
D’ailleurs, à l’époque, toutes les voix discordantes furent inaudibles. Aussi, les déclarations du prix Nobel de la Paix 2003, l’Iranienne Shirin Ebadi ( contrairement à celles de Taslima Nasreen) et concernant le port du foulard, furent totalement ignorées par les médias, elle défendait le droit à porter le foulard comme elle dénonçait le fait de l’imposer …
Depuis le début des années 90, le débat sur le port du foulard islamique fait la une de l’actualité en France et a pris une ampleur disproportionnée.. La question a été relancée en France avec les deux jeunes filles, Alma et Lila, parcequ’elles refusaient de retirer leur voile à l’école. Une loi a donc été adoptée par le parlement français en mars 2004 interdisant les signes religieux ‘ostensibles ‘ à l’école et a divisé les mouvements sociaux et politiques « Le clivage existant en France en effet entre un courant voulant utiliser le pouvoir d’état pour éradiquer la religion et un courant visant a permettre la confrontation pluraliste des croyances et idées s’est prolongé jusqu’à aujourd’hui » [5].
L’objectif de la loi de 1905 est de légiférer sur les conditions de l’exercice des cultes au sein de la république. Il n’est nullement question d’une philosophie anti – cléricale ou négative à l’endroit de la religion qui doit avoir toute sa place dans l’espace démocratique. Les principes sont orientés vers une protection des religions en tant qu’expressions de la liberté de pensée et de croyance comme le soutenait Jean Jaurès. Comme le souligne Catherine Samary, la libre pensée ne doit pas être transformée en « pensée officielle », en « religion d’Etat athée ».
Il ne faut pas être dupe, la loi de mars 2004 est une atteinte directe à la visibilité du foulard islamique dans l’espace public. Pourtant, en 1989, lors des premières « affaires de foulards islamiques »,le conseil d’état avait alors jugé parfaitement compatible le port du foulard et la loi de 1905.
Aussi, nombre de spécialistes de la question que ce débat a malheureusement été instrumentalisée et qu’il a surtout été tronqué. Pour Françoise Lorcerie, les jeunes filles françaises de confession musulmane ont été les premières victimes, mais surtout, elles ont fait les frais de la polémique … Selon le président de la Ligue des Droits de l’Homme, Jean Pierre Dubois, la loi sur le foulard est « une humiliation supplémentaire, parler de réussite est d’un grand cynisme, poursuit-il, en s’en prenant à un symbole, la loi a supprimé la visibilité du problème de l’intégration, mais n’a pas répondu au problème en tant que tel. Qu’est ce que fait cette France de la peur pour aider les jeunes à trouver leur place ? Ces jeunes filles aspirent dans leur immense majorité à faire des études, à exercer un métier, à s’émanciper. Or, une fois de plus on vient de les stigmatiser » ( La Croix, 21.05.2005).
Si le choix de porter le foulard est dénué de toute pression sociale ou familiale, il ne contrevient pas au droit laïque.
D’ailleurs, à l’époque, toutes les voix discordantes furent inaudibles. Aussi, les déclarations du prix Nobel de la Paix 2003, l’Iranienne Shirin Ebadi ( contrairement à celles de Taslima Nasreen) et concernant le port du foulard, furent totalement ignorées par les médias, elle défendait le droit à porter le foulard comme elle dénonçait le fait de l’imposer …
Le péril rouge passerait-il au …Vert !
Et si le problème était l’Islam, religion barbare, obscurantiste et … Menace du XXIe siècle ?
Dans « l’Occident et les autres, histoire d’une suprématie », Sophie Bessis note « l’Islam c’est devenu une habitude en Occident, est rendu responsable de tous les archaïsmes des sociétés au sein desquelles il est établi ( …) On s’y est ainsi abondamment servi des propos de la bengalaise Taslima Nasreen qui, en butte à la vindicte des fondamentalistes de son pays, l’a crédité d’à peu près tous les maux dont souffrent les femmes bengalaises, sans faire de distinction en ce qui relève de la religion ou de la coutume, sans voir non plus que la terrible condition faite aux femmes dans l’ensemble du sous-continent indien transcende les appartenances religieuses».
Depuis la chute du bloc dit « communiste », nous assistons à l’élaboration d’un discours dominant qui propage une vision binaire du monde opposant l’Occident et l’Orient, le monde civilisé au monde obscurantiste. Deux mondes seraient en train de s’affronter : le monde judéo chrétien face au monde arabo musulman, son antithèse !
Cette présentation du monde est une régression intellectuelle qui « relègue en arrière plan les identités sociales ».
L’islam est analysé sous l’angle d’un phénomène politico – religieux néfaste au monde occidental et incompatible à la raison, aux valeurs fondatrices des sociétés occidentales, tout comme certains spécialistes autoproclamés des mouvements « islamistes » présentent la religion musulmane comme une religion incapable d’évoluer, de se reformer de l’intérieur et de s’adapter à la modernité … On fait des raccourcis abusifs : Islam = Islamisme = Arabe= Terrorisme … Et la boucle est bouclée !
Les médias et les partis politiques ne cessent d’alimenter cette paranoïa collective en essayant de convaincre d’une future confrontation civilisationnelle … Pour contrer le fameux « péril vert ».
Les débats autour de ce symbole religieux, le foulard islamique, n’est que le symptôme d’une peur parasité par des clichés, liés à la violence, à l’asservissement de la femmes …et à la peur de voir les sociétés européennes s’islamiser par cette « poussée de foulards islamiques » dans l’espace public … Qui met à mal l’identité européenne …
En définitive et pour conclure, les véritables menaces émanent de celles et ceux qui prétendent défendre notre liberté tout en la limitant, de celles et ceux qui prétendent représenter le monde civilisé, la démocratie et la liberté tout en faisant la guerre.
S’agissant du rapport à la laïcité, il y a urgence à promouvoir une relecture, une redéfinition de ce concept à l’aune d’une réalité nouvelle, d’une société en pleine mutation, de la présence « nouvelle » de la communauté musulmane … Bien qu’ancienne !
Dans « l’Occident et les autres, histoire d’une suprématie », Sophie Bessis note « l’Islam c’est devenu une habitude en Occident, est rendu responsable de tous les archaïsmes des sociétés au sein desquelles il est établi ( …) On s’y est ainsi abondamment servi des propos de la bengalaise Taslima Nasreen qui, en butte à la vindicte des fondamentalistes de son pays, l’a crédité d’à peu près tous les maux dont souffrent les femmes bengalaises, sans faire de distinction en ce qui relève de la religion ou de la coutume, sans voir non plus que la terrible condition faite aux femmes dans l’ensemble du sous-continent indien transcende les appartenances religieuses».
Depuis la chute du bloc dit « communiste », nous assistons à l’élaboration d’un discours dominant qui propage une vision binaire du monde opposant l’Occident et l’Orient, le monde civilisé au monde obscurantiste. Deux mondes seraient en train de s’affronter : le monde judéo chrétien face au monde arabo musulman, son antithèse !
Cette présentation du monde est une régression intellectuelle qui « relègue en arrière plan les identités sociales ».
L’islam est analysé sous l’angle d’un phénomène politico – religieux néfaste au monde occidental et incompatible à la raison, aux valeurs fondatrices des sociétés occidentales, tout comme certains spécialistes autoproclamés des mouvements « islamistes » présentent la religion musulmane comme une religion incapable d’évoluer, de se reformer de l’intérieur et de s’adapter à la modernité … On fait des raccourcis abusifs : Islam = Islamisme = Arabe= Terrorisme … Et la boucle est bouclée !
Les médias et les partis politiques ne cessent d’alimenter cette paranoïa collective en essayant de convaincre d’une future confrontation civilisationnelle … Pour contrer le fameux « péril vert ».
Les débats autour de ce symbole religieux, le foulard islamique, n’est que le symptôme d’une peur parasité par des clichés, liés à la violence, à l’asservissement de la femmes …et à la peur de voir les sociétés européennes s’islamiser par cette « poussée de foulards islamiques » dans l’espace public … Qui met à mal l’identité européenne …
En définitive et pour conclure, les véritables menaces émanent de celles et ceux qui prétendent défendre notre liberté tout en la limitant, de celles et ceux qui prétendent représenter le monde civilisé, la démocratie et la liberté tout en faisant la guerre.
S’agissant du rapport à la laïcité, il y a urgence à promouvoir une relecture, une redéfinition de ce concept à l’aune d’une réalité nouvelle, d’une société en pleine mutation, de la présence « nouvelle » de la communauté musulmane … Bien qu’ancienne !
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[1] Hachim Mouna, « le voile dans tous ses états» .
[2] Göle Nilüfer, « Le foulard, symbole d’émancipation ? », Courrier International, No 905, Mars 2008 [4] La laicité à l’école et dans la société française, presse internationale, décembre 2003 - janvier 2004 (http://www.aidh.org/laic/eur-europ.htm)
[1] Hachim Mouna, « le voile dans tous ses états» .
[2] Göle Nilüfer, « Le foulard, symbole d’émancipation ? », Courrier International, No 905, Mars 2008
[3] Le Monde, 8.01.2004.
[5] Samary Catherine, « Pour une alternative laïque contre l’étatisme « civilisateur », Décembre