- Le Coran : une dictée surnaturelle (L. Massignon)
A propos du Coran, Louis Massignon (1883-1962) décrivait lyriquement ce dernier comme « dictée surnaturelle », extrait de son texte :
« Ce Livre n’est pas seulement un code ; il appartient à ce genre de livres très rare, qui ouvre une perspective sur les fins dernières du langage, qui n’est pas un simple outil commercial, un jouet esthétique ou un moulin à idées, mais qui peut avoir prise sur le réel, et, en gauchissant sur la syntaxe, comme un avion sur l’aile, fait « décoller » de terre […].
Le Coran contient, surtout au début chronologique de sa notation, bien des passages en prose rimée, mais la rime s’interrompt quand la pensée l’exige et ne la commande jamais. Telle est la première originalité du Coran. La seconde originalité du Coran, c’est son caractère d’avertissement insinué, pour faire réfléchir, entre les lignes, à une intention maîtresse, au-delà de la voix du Messager transmetteur, un texte « inspiré » ». (Ecrits mémorables II)
- Le Coran : derrière le désordre apparent, l’unité et la cohérence (J. Berque, 1910-1995)
J. Berque écrivait « Ceux qui, sans préparation, abordent cet ensemble [le Coran] se sentent débordés par sa profusion et son apparent désordre. Beaucoup d’Occidentaux parlent d’incohérence : le discours passe d’un sujet à l’autre, sans être poursuivi, et encore non épuisé. Le même thème, le même motif revient çà et là sans régularité discernable. Impossible de se retrouver dans un texte touffu que n’éclaircissent ni les titre de sourates, ni les coupures qu’introduisent arbitrairement les traducteurs, ni les canevas ou autres index dont ils prétendent nous munir. Au total, et malgré quelques beaux morceaux, lecture, dit-on, bien décevante !
Et pourtant, si l’on approfondit l’examen, l’on révisera ces impressions superficielles. […] La dispersion supposée du traitement des thèmes est corrélative à l’unité de l’ensemble. Tout ce papillotement de mots, d’images et de faits, vous ramène à des lignes elles-mêmes convergentes. […] Donc, unité se manifeste en diversité, ce message unitaire constitue un trait essentiel de la forme comme du fond. Il est est tellement prononcé que, si l’on en poursuit la lecture, l’on en vient à se dire que le Coran pourrait se résumer peut-être en un seul mot : celui d’unité de Dieu. Monème géant de l’unicité divine … » (Relire le Coran, Albin Michel, 1993, pp.19-21).
A propos du Coran, Louis Massignon (1883-1962) décrivait lyriquement ce dernier comme « dictée surnaturelle », extrait de son texte :
« Ce Livre n’est pas seulement un code ; il appartient à ce genre de livres très rare, qui ouvre une perspective sur les fins dernières du langage, qui n’est pas un simple outil commercial, un jouet esthétique ou un moulin à idées, mais qui peut avoir prise sur le réel, et, en gauchissant sur la syntaxe, comme un avion sur l’aile, fait « décoller » de terre […].
Le Coran contient, surtout au début chronologique de sa notation, bien des passages en prose rimée, mais la rime s’interrompt quand la pensée l’exige et ne la commande jamais. Telle est la première originalité du Coran. La seconde originalité du Coran, c’est son caractère d’avertissement insinué, pour faire réfléchir, entre les lignes, à une intention maîtresse, au-delà de la voix du Messager transmetteur, un texte « inspiré » ». (Ecrits mémorables II)
- Le Coran : derrière le désordre apparent, l’unité et la cohérence (J. Berque, 1910-1995)
J. Berque écrivait « Ceux qui, sans préparation, abordent cet ensemble [le Coran] se sentent débordés par sa profusion et son apparent désordre. Beaucoup d’Occidentaux parlent d’incohérence : le discours passe d’un sujet à l’autre, sans être poursuivi, et encore non épuisé. Le même thème, le même motif revient çà et là sans régularité discernable. Impossible de se retrouver dans un texte touffu que n’éclaircissent ni les titre de sourates, ni les coupures qu’introduisent arbitrairement les traducteurs, ni les canevas ou autres index dont ils prétendent nous munir. Au total, et malgré quelques beaux morceaux, lecture, dit-on, bien décevante !
Et pourtant, si l’on approfondit l’examen, l’on révisera ces impressions superficielles. […] La dispersion supposée du traitement des thèmes est corrélative à l’unité de l’ensemble. Tout ce papillotement de mots, d’images et de faits, vous ramène à des lignes elles-mêmes convergentes. […] Donc, unité se manifeste en diversité, ce message unitaire constitue un trait essentiel de la forme comme du fond. Il est est tellement prononcé que, si l’on en poursuit la lecture, l’on en vient à se dire que le Coran pourrait se résumer peut-être en un seul mot : celui d’unité de Dieu. Monème géant de l’unicité divine … » (Relire le Coran, Albin Michel, 1993, pp.19-21).
- Fazlur Rahman (1919-1988) : de la nécessité d’approcher le Coran dans sa globalité et dans son unité
« Lorsque des interprètes ont tenté de déduire des lois du Coran in abstracto –par exemple dans le domaine du droit pénal, ce qu’on appelle ḥudûd-, ce fut un échec. Pourquoi ? Parce que le qiyâs, ou raisonnement analogique, outil intellectuel employé pour aller dénicher lois et institutions sociales dans le Coran, ne possédait pas un degré suffisant de perfection. Et au fond, l’imperfection et l’imprécision de cet instrument étaient dues à leur tour à l’absence de méthode adéquate pour comprendre le Coran en lui-même […]. On échouait très généralement à saisir l’unité sous-jacente du Coran et, corrélativement, on se concentrait avec insistance sur la fixation du sens de termes pris dans des versets divers et considérés isolément. Résultat de cette approche « atomiste », les lois étaient souvent dérivées de versets dont l’esprit n’était pas du tout juridique.
Cette incapacité de saisir l’unité profonde du Coran et la conception du monde bien déterminée qui s’en dégage a eu les plus graves conséquences dans le domaine de la pensée théologique. Dans le registre du droit, cette absence relative de conscience de l’unité interne du livre a pu être contrebalancée par l’incorporation de matériaux étrangers, qui a introduit une dimension pratique suffisante ; mais en ce qui concerne la théologie, la même tentative d’insérer des idées étrangères […] s’est avérée désastreuse, au moins dans le cas de l’acharisme, le courant dominant de la théologie sunnite pendant tout le Moyen Age islamique. » (Islam and modernity).
« Lorsque des interprètes ont tenté de déduire des lois du Coran in abstracto –par exemple dans le domaine du droit pénal, ce qu’on appelle ḥudûd-, ce fut un échec. Pourquoi ? Parce que le qiyâs, ou raisonnement analogique, outil intellectuel employé pour aller dénicher lois et institutions sociales dans le Coran, ne possédait pas un degré suffisant de perfection. Et au fond, l’imperfection et l’imprécision de cet instrument étaient dues à leur tour à l’absence de méthode adéquate pour comprendre le Coran en lui-même […]. On échouait très généralement à saisir l’unité sous-jacente du Coran et, corrélativement, on se concentrait avec insistance sur la fixation du sens de termes pris dans des versets divers et considérés isolément. Résultat de cette approche « atomiste », les lois étaient souvent dérivées de versets dont l’esprit n’était pas du tout juridique.
Cette incapacité de saisir l’unité profonde du Coran et la conception du monde bien déterminée qui s’en dégage a eu les plus graves conséquences dans le domaine de la pensée théologique. Dans le registre du droit, cette absence relative de conscience de l’unité interne du livre a pu être contrebalancée par l’incorporation de matériaux étrangers, qui a introduit une dimension pratique suffisante ; mais en ce qui concerne la théologie, la même tentative d’insérer des idées étrangères […] s’est avérée désastreuse, au moins dans le cas de l’acharisme, le courant dominant de la théologie sunnite pendant tout le Moyen Age islamique. » (Islam and modernity).
- Mohammed Arkoun (1928-2010) : Comment lire le Coran aujourd’hui ? Réponse : en dépassant « la consommation idéologique » de la Révélation et en refusant d’avoir recours à la « religion comme levier idéologique pour les dirigeants, repaire politique pour les opposants, refuge moral pour les dominés, instrument de promotion pour les nouveaux cadres de la société »…bref, il faut démythologiser son rapport au texte sacré.
Quelques lignes autour de la nécessité de cette démythologisation :
1- Difficultés de Lire le Coran :
« Le Coran est un de ces textes de portée universelle sur lequel on a trop dit, trop écrit et qui demeure, cependant, mal connu. […] Il est encore plus vrai que le lecteur non musulman ne dispose pas de cette capacité d’émotion religieuse qui demeure le moyen le plus sûr de recevoir le Message. »
« Les musulmans eux-mêmes sont de plus en plus enfermés dans cette impossibilité, puisque eux aussi sont en proie aux ravages des idéologies –religions modernes- qui justifient tous les sacrifices en vue de la croissance économique. Pour eux, homme pour tous les hommes, la motivation profane finit par éliminer la motivation religieuse. »
« Dès lors, le problème primordial que doit poser et tenter de résoudre une présentation actuelle du Coran est celui de savoir comment lire ce Livre aujourd’hui ? Faut-il accumuler des montagnes d’érudition pour faire revivre – le temps d’une lecture !- des significations absentes de notre existence quotidienne ? Peut-on s’en tenir au seul plan de l’analyse conceptuelle et réduire la Parole de Dieu à un simple document déchiffrable par le philologue, intéressant pour l’historien des idées ? »
2- Le Coran insuffisamment pensé par les auteurs musulmans :
« Des questions du même ordre se sont déjà posées dans les milieux juifs et chrétiens au sujet de la Bible et du Nouveau Testament. Des théologiens et des philosophes de grand renom s’efforcent depuis quelques années de dépasser les problématiques classiques pour parler du Dieu révélé conformément aux exigences de l’intelligence contemporaine. Un tél effort n’a jamais été tenté dans la pensée islamique. Celle-ci n’offre rien d’équivalent aux travaux d’un A. Néher pour la pensée juive, d’un J. Daniélou, Y. Congar, J. Maritain, E. Gilson, etc., pour la pensée catholique, K. Barth, R. Bultmann, A. Dumas, etc., pour la pensée protestante. Cette carence s’explique par beaucoup de raisons que nous ne pouvons détailler ici ; elle entraîne malheureusement l’absence du témoignage islamique dans le débat en cours sur la Révélation, la Vérité et l’Histoire. »
3- La nécessité de revenir à l’intention originelle du Coran :
« Tout ce qu’on peut lire sur le sujet sous la plume de musulmans, ce sont des réaffirmations plus ou moins véhémentes du caractère véridique, éternel, parfait du Message reçu et délivré par le prophète Muhammad. « Apologie défensive » plus que quête d’une intelligibilité, la littérature moderne sur le Coran est inférieure à beaucoup d’égards à la littérature classique. Dès lors, la Parole de Dieu contredite, mise en échec par la praxis de nos sociétés actuelles, respectée, mais, en fait, contournée par les musulmans, réduite par l’érudition orientaliste au rang de simple événement culturel, cause d’immobilisme plus que de progrès, attend d’être restaurée dans la plénitude de son Intention en tant qu’interpellation adressée à tous les hommes par ce même Dieu Vivant, Créateur et Juge, révélé dans la Bible. » (Mohammed Arkoun, Lectures du Coran).
Quelques lignes autour de la nécessité de cette démythologisation :
1- Difficultés de Lire le Coran :
« Le Coran est un de ces textes de portée universelle sur lequel on a trop dit, trop écrit et qui demeure, cependant, mal connu. […] Il est encore plus vrai que le lecteur non musulman ne dispose pas de cette capacité d’émotion religieuse qui demeure le moyen le plus sûr de recevoir le Message. »
« Les musulmans eux-mêmes sont de plus en plus enfermés dans cette impossibilité, puisque eux aussi sont en proie aux ravages des idéologies –religions modernes- qui justifient tous les sacrifices en vue de la croissance économique. Pour eux, homme pour tous les hommes, la motivation profane finit par éliminer la motivation religieuse. »
« Dès lors, le problème primordial que doit poser et tenter de résoudre une présentation actuelle du Coran est celui de savoir comment lire ce Livre aujourd’hui ? Faut-il accumuler des montagnes d’érudition pour faire revivre – le temps d’une lecture !- des significations absentes de notre existence quotidienne ? Peut-on s’en tenir au seul plan de l’analyse conceptuelle et réduire la Parole de Dieu à un simple document déchiffrable par le philologue, intéressant pour l’historien des idées ? »
2- Le Coran insuffisamment pensé par les auteurs musulmans :
« Des questions du même ordre se sont déjà posées dans les milieux juifs et chrétiens au sujet de la Bible et du Nouveau Testament. Des théologiens et des philosophes de grand renom s’efforcent depuis quelques années de dépasser les problématiques classiques pour parler du Dieu révélé conformément aux exigences de l’intelligence contemporaine. Un tél effort n’a jamais été tenté dans la pensée islamique. Celle-ci n’offre rien d’équivalent aux travaux d’un A. Néher pour la pensée juive, d’un J. Daniélou, Y. Congar, J. Maritain, E. Gilson, etc., pour la pensée catholique, K. Barth, R. Bultmann, A. Dumas, etc., pour la pensée protestante. Cette carence s’explique par beaucoup de raisons que nous ne pouvons détailler ici ; elle entraîne malheureusement l’absence du témoignage islamique dans le débat en cours sur la Révélation, la Vérité et l’Histoire. »
3- La nécessité de revenir à l’intention originelle du Coran :
« Tout ce qu’on peut lire sur le sujet sous la plume de musulmans, ce sont des réaffirmations plus ou moins véhémentes du caractère véridique, éternel, parfait du Message reçu et délivré par le prophète Muhammad. « Apologie défensive » plus que quête d’une intelligibilité, la littérature moderne sur le Coran est inférieure à beaucoup d’égards à la littérature classique. Dès lors, la Parole de Dieu contredite, mise en échec par la praxis de nos sociétés actuelles, respectée, mais, en fait, contournée par les musulmans, réduite par l’érudition orientaliste au rang de simple événement culturel, cause d’immobilisme plus que de progrès, attend d’être restaurée dans la plénitude de son Intention en tant qu’interpellation adressée à tous les hommes par ce même Dieu Vivant, Créateur et Juge, révélé dans la Bible. » (Mohammed Arkoun, Lectures du Coran).
Indonésie
- Mohammad Iqbal (1876-1938) : Reconstruire son rapport au Coran pour mieux saisir la haute mission qu’il confit à l’homme
« L’enseignement du Coran, qui croit à la possibilité d’une amélioration dans la conduite de l’homme et dans son contrôle des forces naturelles, n’est ni l’optimisme ni le pessimisme. C’est le méliorisme, lequel reconnaît un univers en croissance et qui est animé par l’espoir de la victoire finale de l’homme sur le mal. […].
Dans le récit d’Adam, et de Eve (Awa) contrairement à la Bible « le Coran omet complètement le serpent et l’histoire de la côte. La première omission est manifestement destinée à libérer l’histoire de son cadre phallique et de la conception pessimiste de la vie qu’elle laisse entendre à l’origine. La seconde se propose de faire comprendre que le but du récit coranique n’est pas historique, comme c’est le cas de l’Ancien testament, lequel nous relate l’origine du premier couple humain en guise de prélude à l’histoire d’Israël […]. La légende coranique n’a rien à voir avec la première apparition de l’homme sur cette planète. Son but est plutôt d’indiquer l’élévation de l’homme, à partir d’un état primitif d’appétits instinctifs, jusqu’à la possession consciente d’un mois libre, capable de doute et de désobéissance […].»
« Le Coran ne considère pas non plus la Terre comme un lieu de tortures où une humanité foncièrement mauvaise serait emprisonnée à cause du péché originel. Le premier acte de désobéissance de l’homme fut aussi son premier acte de libre choix ; et c’est pourquoi, d’après le récit coranique, la première transgression d’Adam fut pardonnée. Or, le bien n’est pas affaire de contrainte ; c’est le libre abandon du moi à l’idéal moral, et il provient d’une coopération volontaire d’ego libres. Un être dont les mouvements seraient entièrement déterminés comme ceux d’une machine ne pourrait produire le bien. » (Reconstruire la pensée religieuse de l’islam)
« L’enseignement du Coran, qui croit à la possibilité d’une amélioration dans la conduite de l’homme et dans son contrôle des forces naturelles, n’est ni l’optimisme ni le pessimisme. C’est le méliorisme, lequel reconnaît un univers en croissance et qui est animé par l’espoir de la victoire finale de l’homme sur le mal. […].
Dans le récit d’Adam, et de Eve (Awa) contrairement à la Bible « le Coran omet complètement le serpent et l’histoire de la côte. La première omission est manifestement destinée à libérer l’histoire de son cadre phallique et de la conception pessimiste de la vie qu’elle laisse entendre à l’origine. La seconde se propose de faire comprendre que le but du récit coranique n’est pas historique, comme c’est le cas de l’Ancien testament, lequel nous relate l’origine du premier couple humain en guise de prélude à l’histoire d’Israël […]. La légende coranique n’a rien à voir avec la première apparition de l’homme sur cette planète. Son but est plutôt d’indiquer l’élévation de l’homme, à partir d’un état primitif d’appétits instinctifs, jusqu’à la possession consciente d’un mois libre, capable de doute et de désobéissance […].»
« Le Coran ne considère pas non plus la Terre comme un lieu de tortures où une humanité foncièrement mauvaise serait emprisonnée à cause du péché originel. Le premier acte de désobéissance de l’homme fut aussi son premier acte de libre choix ; et c’est pourquoi, d’après le récit coranique, la première transgression d’Adam fut pardonnée. Or, le bien n’est pas affaire de contrainte ; c’est le libre abandon du moi à l’idéal moral, et il provient d’une coopération volontaire d’ego libres. Un être dont les mouvements seraient entièrement déterminés comme ceux d’une machine ne pourrait produire le bien. » (Reconstruire la pensée religieuse de l’islam)
- Yadh Ben Yachour : le Coran et la question de l’apostasie
Versets coraniques : « Quiconque a renié Allah après avoir cru... - sauf celui qui y a été contraint alors que son cœur demeure plein de la sérénité de la foi - mais ceux qui ouvrent délibérément leur cœur à la mécréance, ceux-là ont sur eux une colère d´Allah et ils ont un châtiment terrible. Il en est ainsi, parce qu´ils ont aimé la vie présente plus que l´au-delà. Et Allah, vraiment, ne guide pas les gens mécréants. Voilà ceux dont Allah a scellé les cœurs, l´ouïe, et les yeux. Ce sont eux les insouciants. » (Coran XVI, 106-109).
« Malgré la fermeté de ces versets au sujet de la rétribution dernière, l’apostasie n’est nullement sanctionnée dans le Coran. Pour des raisons sur lesquelles nous pouvons longuement épiloguer, cette peine fut fondée sur un hadîth du Prophète d’après lequel : « Celui qui change de religion, tuez-le ! ». La science du hadîth admet que cette parole du Prophète est rapportée par un seul compagnon, Ibn Abbâs. Il s’agit par conséquent d’un ahdîth ahâd, appuyé toutefois, dit-on toujours dans la science du hadîth, par un consensus tacite générale (ijmâ’ sukuti).
La peine de mort à l’encontre des apostats a reçu historiquement des applications très nombreuses, en particuliers à des périodes de dissidences et de révoltes politiques et religieuses. Elle est aujourd’hui l’objet d’une réactivation, dans les conflits civils qui, dans le monde musulman, prennent facilement une dimension religieuse, mais également dans des cas individuels qui sont des occasions de politisation du religieux, comme en témoignent les affaires M. Mahmud Taha, Salman Rushdie, Faraj Fouda, Nasr Hamid Abu Zayd. » (L’Odysée des droits de l’homme)
Dans le même sens, Abdelmajid Charfi écrit : « La Révélation ne parle jamais de la charia dans le sens de loi divine, mais lui donne celui de « voie ». sa fonction est d’indiquer la direction que le croyant doit suivre, et qui, de ce point de vue, est obligatoire. Mais, sauf dans de rares cas, elle ne détaille pas les modalités d’application juridique de cette direction […] Les injonctions basées explicitement sur le texte coranique ne représentent qu’une petite partie des préceptes édictés par les fuqaha, qui s’imaginent les avoir tirés du Coran grâce à des méthodes irrécusables. Il est bien plus important de prendre acte du fait que les circonstances ont changé […]. La prohibition des images, qui se justifiait alors par le fait que l’idolâtrie était encore récente, n’a plus de raison d’être, et d’autres questions n’ont pas encore été résolues qui requièrent une solution rapide […] : l’apostasie, le talion en matière de meurtre, le vol, le prêt à intérêt, les rapports entre religion et l’Etat, la famille. […] » (L’islam entre le message et l’histoire).
Versets coraniques : « Quiconque a renié Allah après avoir cru... - sauf celui qui y a été contraint alors que son cœur demeure plein de la sérénité de la foi - mais ceux qui ouvrent délibérément leur cœur à la mécréance, ceux-là ont sur eux une colère d´Allah et ils ont un châtiment terrible. Il en est ainsi, parce qu´ils ont aimé la vie présente plus que l´au-delà. Et Allah, vraiment, ne guide pas les gens mécréants. Voilà ceux dont Allah a scellé les cœurs, l´ouïe, et les yeux. Ce sont eux les insouciants. » (Coran XVI, 106-109).
« Malgré la fermeté de ces versets au sujet de la rétribution dernière, l’apostasie n’est nullement sanctionnée dans le Coran. Pour des raisons sur lesquelles nous pouvons longuement épiloguer, cette peine fut fondée sur un hadîth du Prophète d’après lequel : « Celui qui change de religion, tuez-le ! ». La science du hadîth admet que cette parole du Prophète est rapportée par un seul compagnon, Ibn Abbâs. Il s’agit par conséquent d’un ahdîth ahâd, appuyé toutefois, dit-on toujours dans la science du hadîth, par un consensus tacite générale (ijmâ’ sukuti).
La peine de mort à l’encontre des apostats a reçu historiquement des applications très nombreuses, en particuliers à des périodes de dissidences et de révoltes politiques et religieuses. Elle est aujourd’hui l’objet d’une réactivation, dans les conflits civils qui, dans le monde musulman, prennent facilement une dimension religieuse, mais également dans des cas individuels qui sont des occasions de politisation du religieux, comme en témoignent les affaires M. Mahmud Taha, Salman Rushdie, Faraj Fouda, Nasr Hamid Abu Zayd. » (L’Odysée des droits de l’homme)
Dans le même sens, Abdelmajid Charfi écrit : « La Révélation ne parle jamais de la charia dans le sens de loi divine, mais lui donne celui de « voie ». sa fonction est d’indiquer la direction que le croyant doit suivre, et qui, de ce point de vue, est obligatoire. Mais, sauf dans de rares cas, elle ne détaille pas les modalités d’application juridique de cette direction […] Les injonctions basées explicitement sur le texte coranique ne représentent qu’une petite partie des préceptes édictés par les fuqaha, qui s’imaginent les avoir tirés du Coran grâce à des méthodes irrécusables. Il est bien plus important de prendre acte du fait que les circonstances ont changé […]. La prohibition des images, qui se justifiait alors par le fait que l’idolâtrie était encore récente, n’a plus de raison d’être, et d’autres questions n’ont pas encore été résolues qui requièrent une solution rapide […] : l’apostasie, le talion en matière de meurtre, le vol, le prêt à intérêt, les rapports entre religion et l’Etat, la famille. […] » (L’islam entre le message et l’histoire).