Présentation de l’auteur
Taha Jabir Al-Alwani, mort en 2016
Taha Jabir Al-Alwani est né en Irak en 1935. A l’Université d’al-Azhar il a obtenu un doctorat en Usûl al-fiqh en 1973. Professeur de Usûl al-fiqh à l’Université de Riyad (1975-1985), il est l’un des fondateurs de l’Institut International de la Pensée Islamique (IIIT). Il est également président de l’université des sciences islamiques et sociales à Herndon, USA, et président du Conseil Nord Américain du Fiqh. Sa contribution au savoir inclut le commentaire du manuscrit Al-mahsûl fi ‘ilm usûl al-fiqh (« somme et susbtance dans la science des fondements du droit musulman ») par l’imam Fakhr ad-Dîn ar-Râzî (six volumes). Il est également auteur de : Le Coran et la Sounna : le facteur Temps Espace L’ijtihâd Fondements du droit musulman Ethique du désacord en islam etc.
Fiqh des minorités : nouvelle perspective d'approche du droit
Il nous faut ici rappeler la définition du « fiqh » à partir de laquelle l’auteur nous expose ses idées sur le « fiqh des minorités ». Cette définition, formulée par Ibn Khaldûn (m.1406) et adoptée par Al-Alwani, s’énonce comme suit : « Le fiqh est la connaissance des règles de Dieu, ahkhâm, concernant le comportement et les actes des mukallafûn, ou sujets de droit, que ces actes soient obligatoires, interdits, recommandés, blâmables ou acceptables. Ces règles sont reçues du Coran et de la Sunna et par les moyens que Dieu a mis en place pour les établir. La formulation et l’expression de ces règles, grâce à l’utilisation de ces moyens, constituent ce qu’on appelle le fiqh », cité page 25.
Une fois rappelée cette définition, que l’auteur ne discute pas, il expose aussitôt le cadre dans lequel il entend placer ce « nouveau fiqh ». Un cadre qu’il veut global, transcendant la seule perspective normative dans laquelle cette science a été enfermée, après l’époque fondatrice des imams éponymes. Ainsi, le « fiqh des minorités » ne peut être intégré « au fiqh , écrit-il, dans le sens qu’on lui donne aujourd’hui, à savoir le fiqh de la résolution de problème mineurs. Il devrait plutôt se rattacher à la science du fiqh au sens général, qui englobe toutes les branches théologiques et pratiques de la législation et du droit musulmans. Ce serait dans la droite ligne du sens que le Prophète donnait au mot fiqh dans le hadith : "Celui à que Dieu veut du bien, Il lui rend aisée la compréhension (fiqh) de sa religion". L’imam Abû Hanîfa appelait cette connaissance le "fiqh majeur", ou pourrait dire "macro-fiqh". » (p.27).
Une fois rappelée cette définition, que l’auteur ne discute pas, il expose aussitôt le cadre dans lequel il entend placer ce « nouveau fiqh ». Un cadre qu’il veut global, transcendant la seule perspective normative dans laquelle cette science a été enfermée, après l’époque fondatrice des imams éponymes. Ainsi, le « fiqh des minorités » ne peut être intégré « au fiqh , écrit-il, dans le sens qu’on lui donne aujourd’hui, à savoir le fiqh de la résolution de problème mineurs. Il devrait plutôt se rattacher à la science du fiqh au sens général, qui englobe toutes les branches théologiques et pratiques de la législation et du droit musulmans. Ce serait dans la droite ligne du sens que le Prophète donnait au mot fiqh dans le hadith : "Celui à que Dieu veut du bien, Il lui rend aisée la compréhension (fiqh) de sa religion". L’imam Abû Hanîfa appelait cette connaissance le "fiqh majeur", ou pourrait dire "macro-fiqh". » (p.27).
Fiqh des minorités : textes et contextes
Ce macro-fiqh dans lequel doit s’insérer le fiqh des minorités doit être, selon l’auteur une « discipline spécifique qui prend en compte la relation entre la décision religieuse, les conditions de vie de la communauté et le lieu où elle vit. C’est un fiqh qui s’applique à un groupe spécifique de gens, qui vivent dans des conditions spécifiques, et dont les besoins particuliers peuvent ne pas être appropriés pour d’autres communautés. » (p.27-28). Cette discipline vise donc à marier les textes religieux avec les contextes-nouveaux dans lesquels vit une partie de la communauté musulmane à travers le monde. Son exercice exigera donc, des juristes, une « vaste connaissance des différentes disciplines des sciences sociales, en particulier la sociologie, l’économie, les sciences et les relations internationales » (p.28). Des sciences dont la connaissance peut permettre de mieux cerner les contextes et les enjeux qui balisent la vie des minorités musulmanes.
Changement de paradigme :
C’est dans cette perspective que l’auteur considère le paradigme du fiqh classique comme « désuet ». Désuet dans le sens où le schéma ancien oppose deux individus se faisant face : l’un, comme « solliciteur incapable de trouver une règle islamique pour un problème auquel il est confronté » et, l’autre, comme un « savant dont la seule responsabilité consiste à produire une fatwâ ou un avis juridique » (p.28).
Ainsi, l’ancien paradigme du fiqh respecte le schéma suivant :
Solliciteur [une/des question (s)] =====> Juriste [une/des réponse (s)]
Dans ce schéma classique, le juriste se limitait à trouver une réponse dans le « catalogue de solutions » disponibles dans les différentes écoles. Ainsi, il ne « répond pas à la question posée » par le solliciteur mais cherche à la morfondre dans le moule des questions soulevées jadis (p. 28).
Et la déduction/réponse du juriste était donc opérée à l’intérieur d’une école, elle est ainsi basée sur le taqlid, un suivisme que Al-Alwani qualifie d’exagéré : « une telle approche est extrêmement peu scientifique, héritage d’une époque où la pratique de l’adhésion traditionnelle à la doctrine établie (taqlîd) était exagérée par les membres illettrés de la société, qui trouvaient plus facile de suivre et d’imiter leurs maîtres et leurs prédécesseurs » (p.28).
Changement de paradigme :
C’est dans cette perspective que l’auteur considère le paradigme du fiqh classique comme « désuet ». Désuet dans le sens où le schéma ancien oppose deux individus se faisant face : l’un, comme « solliciteur incapable de trouver une règle islamique pour un problème auquel il est confronté » et, l’autre, comme un « savant dont la seule responsabilité consiste à produire une fatwâ ou un avis juridique » (p.28).
Ainsi, l’ancien paradigme du fiqh respecte le schéma suivant :
Solliciteur [une/des question (s)] =====> Juriste [une/des réponse (s)]
Dans ce schéma classique, le juriste se limitait à trouver une réponse dans le « catalogue de solutions » disponibles dans les différentes écoles. Ainsi, il ne « répond pas à la question posée » par le solliciteur mais cherche à la morfondre dans le moule des questions soulevées jadis (p. 28).
Et la déduction/réponse du juriste était donc opérée à l’intérieur d’une école, elle est ainsi basée sur le taqlid, un suivisme que Al-Alwani qualifie d’exagéré : « une telle approche est extrêmement peu scientifique, héritage d’une époque où la pratique de l’adhésion traditionnelle à la doctrine établie (taqlîd) était exagérée par les membres illettrés de la société, qui trouvaient plus facile de suivre et d’imiter leurs maîtres et leurs prédécesseurs » (p.28).
Vers un nouveau paradigme juridique
Al-Alwani plaide, par conséquent, pour un nouveau paradigme visant à suppléer et à corriger les insuffisances de l’ancien paradigme qui, jusqu’à nos jours, sert de "méthode" aux juristes.
L’auteur propose donc un nouveau paradigme que nous schématisons ci-contre pour ensuite exposer sa formulation.
L’auteur propose donc un nouveau paradigme que nous schématisons ci-contre pour ensuite exposer sa formulation.
Légende :
LPQ : La pertinence de la question
LVF : La validité de sa formulation
LSTQ : les sciences nécessaires pour traiter la question soumise
SP1 : Solutions Possibles
SP2 : Solutions Proposées (appropriées)
Toutes questions posées au juriste, dans ce nouveau schéma, donnent lieu à un questionnement épistémologique allant de la pertinence de la question posée à une interrogation sur les connaissances nécessaires à sa résolution, avec la prise en considération du climat pyschocial qui a donné naissance aux questions soulevées.
Si la formulation de la question posée n’est pas valide, le juriste doit avoir la capacité de reformuler la question pour l’orienter vers les principes éthiques de l’islam : « Le Coran nous a transmis une approche méthodique qui décompose les problèmes et reconstruit les questions une fois qu’on y a répondu. Par exemple : Ils t’interrogent au sujet des nouvelles lunes. Dis : " ce sont des indications à l’usage des hommes et pour le pèlerinage." (II, 189). La question [dans ce verset coranique], telle qu’elle était formulée à l’origine par les juifs de Médine, concernait les phases de la lune et la raison de leur apparition. Pourtant, dans le Coran, elle est reconstruite pour traiter des fonctions de la lune, en reliant sa taille apparente et son orbite à la détermination d’informations concernant le temps et les dates, que l’humanité recherche en permanence. » (p.29).
Un exemple de reformulation : vers le sens des responsabilités
Al-Alwani, pour rester coller à la réalité des minorités musulmanes, nous propose un exemple de reformulation d’une requête touchant à la situation de cette minorité :
(exemple de) question initiale : « les minorités musulmanes peuvent-elles participer à la vie politique du pays hôte où les non musulmans sont majoritaires et où le système politique ne suit pas les préceptes islamiques ».
Cette question est posée, selon le Sheikh Al-Alwani, sur une « tonalité négative ». Cette tonalité ne dit rien sur les conditions d’existence des musulmans dans ces pays. Autrement dit, elle est en abstraction par rapport au « contexte d’existence » de ces populations.
Reformulation : « quelle est la position de l’islam concernant un groupe de musulmans qui se trouvent vivre au milieu d’une majorité non musulmane, dont le système de gouvernement leur permet d’observer et de pratiquer les obligations islamiques qui ne menacent pas l’ordre public ? »
Dans la reformulation, le juriste passe à une « tonalité positive et nuancée ». La reformulation intègre le « contexte d’existence » pour mieux situer la discursivité juridique dans le contexte. Il s’agit d’une mise en situation.
Ainsi, le contexte permet de constater que les populations bénéficient : (voir p.30) de la liberté de culte, du statut et de la reconnaissance de citoyen, de droits politiques, des libertés d’entreprendre et d’organisations, etc. L’interrogation du juriste face à ces éléments : une « telle minorité doit-elle renoncer à ses droits et ignorer ces opportunités par crainte d’être assimilée dans la majorité non-musulmane ou influencée par elle ? » (p.30).
Ainsi reformulée, le juriste donne à la fois une orientation positive à la question initiale et permet aussi d’aborder cette dernière avec toute l’épaisseur qu’exige le « sens des responsabilités », selon Al-Alwani. Par conséquent, « au lieu de rechercher une autorisation pour justifier une situation négative, le débat en vient à traiter d’obligations, d’action positive et de rôles constructifs. » (p.30).
Nous passons d’une question sèche, brute, à une question fécondée par les réalités sociales, politiques, etc. ; présentée ainsi, « la question conserve les objectifs de la question d’origine, mais elle témoigne d’un réel sens des responsabilités, et oriente la réponse dans une direction plus constructive. » (p.30).
LPQ : La pertinence de la question
LVF : La validité de sa formulation
LSTQ : les sciences nécessaires pour traiter la question soumise
SP1 : Solutions Possibles
SP2 : Solutions Proposées (appropriées)
Toutes questions posées au juriste, dans ce nouveau schéma, donnent lieu à un questionnement épistémologique allant de la pertinence de la question posée à une interrogation sur les connaissances nécessaires à sa résolution, avec la prise en considération du climat pyschocial qui a donné naissance aux questions soulevées.
Si la formulation de la question posée n’est pas valide, le juriste doit avoir la capacité de reformuler la question pour l’orienter vers les principes éthiques de l’islam : « Le Coran nous a transmis une approche méthodique qui décompose les problèmes et reconstruit les questions une fois qu’on y a répondu. Par exemple : Ils t’interrogent au sujet des nouvelles lunes. Dis : " ce sont des indications à l’usage des hommes et pour le pèlerinage." (II, 189). La question [dans ce verset coranique], telle qu’elle était formulée à l’origine par les juifs de Médine, concernait les phases de la lune et la raison de leur apparition. Pourtant, dans le Coran, elle est reconstruite pour traiter des fonctions de la lune, en reliant sa taille apparente et son orbite à la détermination d’informations concernant le temps et les dates, que l’humanité recherche en permanence. » (p.29).
Un exemple de reformulation : vers le sens des responsabilités
Al-Alwani, pour rester coller à la réalité des minorités musulmanes, nous propose un exemple de reformulation d’une requête touchant à la situation de cette minorité :
(exemple de) question initiale : « les minorités musulmanes peuvent-elles participer à la vie politique du pays hôte où les non musulmans sont majoritaires et où le système politique ne suit pas les préceptes islamiques ».
Cette question est posée, selon le Sheikh Al-Alwani, sur une « tonalité négative ». Cette tonalité ne dit rien sur les conditions d’existence des musulmans dans ces pays. Autrement dit, elle est en abstraction par rapport au « contexte d’existence » de ces populations.
Reformulation : « quelle est la position de l’islam concernant un groupe de musulmans qui se trouvent vivre au milieu d’une majorité non musulmane, dont le système de gouvernement leur permet d’observer et de pratiquer les obligations islamiques qui ne menacent pas l’ordre public ? »
Dans la reformulation, le juriste passe à une « tonalité positive et nuancée ». La reformulation intègre le « contexte d’existence » pour mieux situer la discursivité juridique dans le contexte. Il s’agit d’une mise en situation.
Ainsi, le contexte permet de constater que les populations bénéficient : (voir p.30) de la liberté de culte, du statut et de la reconnaissance de citoyen, de droits politiques, des libertés d’entreprendre et d’organisations, etc. L’interrogation du juriste face à ces éléments : une « telle minorité doit-elle renoncer à ses droits et ignorer ces opportunités par crainte d’être assimilée dans la majorité non-musulmane ou influencée par elle ? » (p.30).
Ainsi reformulée, le juriste donne à la fois une orientation positive à la question initiale et permet aussi d’aborder cette dernière avec toute l’épaisseur qu’exige le « sens des responsabilités », selon Al-Alwani. Par conséquent, « au lieu de rechercher une autorisation pour justifier une situation négative, le débat en vient à traiter d’obligations, d’action positive et de rôles constructifs. » (p.30).
Nous passons d’une question sèche, brute, à une question fécondée par les réalités sociales, politiques, etc. ; présentée ainsi, « la question conserve les objectifs de la question d’origine, mais elle témoigne d’un réel sens des responsabilités, et oriente la réponse dans une direction plus constructive. » (p.30).
Les raisons d'un fiqh des minorités...
La présence des musulmans dans des pays « extérieurs à la sphère historique et géographique de l’islam » (p.31) soulève des questions qui dépassent, selon Al-Alwani, les « questions personnelles et limitées telles que le caractère halâl de la nourriture, la détermination visuelle de la nouvelle lune ou le mariage avec des femmes non-musulmanes. » (p.31).
Ces nouvelles questions sont beaucoup plus profondes et plus « importantes ». Elles concernent, en effet, des interrogations sur : l’identité musulmane, l’implication sociale, politique, économique, etc., des minorités à la vie de la Cité, la destinée de l’islam en dehors du dâr al ijâba [1], l’universalité de l’islam, la question de la pluralité confessionnelle : les relations de l’islam avec les autres communautés de foi, dans une dimension intra islamique : quel lien doit-il existe entre ces « minorités » et la « majorité » du dâr al-ijâba, etc. Des juristes avec une vision restreinte de ces problématiques nouvelles ont apporté des réponses « simplistes » à ces questions selon le Sheikh (p.31). Car elles sont fondées sur la vision ancienne des rapports entre dâr al-islâm et dâr al-harb [2]. Elles ne voient donc pas que le monde a changé et que cela impose au juriste de changer sa grille de lecture des questions qui lui sont soumises. Or, l’approche juridique classique a, sur les minorités, des conséquences néfastes comme : paralyser la contribution des « minorités » dans les pays où ils se trouvent, construire une vision qui isole les minorités musulmanes au sein de leur société, faire apparaitre l’islam comme une « religion statique », incapable d’embrasser les questions relatives au progrès, au développement, à la modernité. (p.32).
Ces nouvelles questions sont beaucoup plus profondes et plus « importantes ». Elles concernent, en effet, des interrogations sur : l’identité musulmane, l’implication sociale, politique, économique, etc., des minorités à la vie de la Cité, la destinée de l’islam en dehors du dâr al ijâba [1], l’universalité de l’islam, la question de la pluralité confessionnelle : les relations de l’islam avec les autres communautés de foi, dans une dimension intra islamique : quel lien doit-il existe entre ces « minorités » et la « majorité » du dâr al-ijâba, etc. Des juristes avec une vision restreinte de ces problématiques nouvelles ont apporté des réponses « simplistes » à ces questions selon le Sheikh (p.31). Car elles sont fondées sur la vision ancienne des rapports entre dâr al-islâm et dâr al-harb [2]. Elles ne voient donc pas que le monde a changé et que cela impose au juriste de changer sa grille de lecture des questions qui lui sont soumises. Or, l’approche juridique classique a, sur les minorités, des conséquences néfastes comme : paralyser la contribution des « minorités » dans les pays où ils se trouvent, construire une vision qui isole les minorités musulmanes au sein de leur société, faire apparaitre l’islam comme une « religion statique », incapable d’embrasser les questions relatives au progrès, au développement, à la modernité. (p.32).
Objet de ce fiqh des minorités...
Cette vision juridique rénovée et renouvelée doit se consacrer particulièrement, selon l’auteur, aux « questions qui concernent les minorités musulmanes vivant parmi des majorités non musulmanes et s’efforçant de préserver leur identité à travers des coutumes, des législations et des lois quelque peu différentes » (p.61).
Compte tenu des questions complexes, exposées ci-dessus, auxquelles ce fiqh doit faire face et compte tenu des outils qu’il exige (l’intégration des sciences sociales et humaines comme outils de compréhension), il est « une discipline collective et ne devrait pas être pratiqué individuellement. » (p.61)
L’ensemble de ces questions entremêlées et croisées ne peut être traitée, selon Al-Alwani, que dans une vision « globale et ouverte » et dans une démarche « collective ». La vision globale et ouverte exige « l’apport collectif de nombreux savants et spécialistes, venant de différentes disciplines sociales et religieuses. Ces personnes doivent examiner et étudier la question sous tous les angles, en particulier ceux de nature générale, qui affectent le futur des minorités musulmanes, de façon à formuler les problèmes correctement et à en rechercher les solutions dans le fiqh » (p.62).
Des exemples de collaboration possible :
Sur une question touchant, par exemple, l’économie, elle peut être « traitée conjointement par un économiste, un expert juridique et un juriste religieux, chacun traitant le sujet à partir de son point de vue particulier » (p.62). Il ne s’agit donc pas de faire du sociologue, de l’économiste, de l’expert comptable ou du politologue des « juristes religieux » mais d’aller vers une production juridique qui s’effectue dans l’interconnaissance.
Pour fructifier une production juridique dans l’interconnaissance, Al-Alwani pense, qu’il faut développer des institutions mettant en contact les juristes avec les autres spécialités (voir p.64) et sortir d’une pratique enclavée du droit.
Il faut dépasser le seul club des experts du fiqh. En effet pour Al-Alwani, les « conseils de fiqh » (p.64), tels qu’ils existent aujourd’hui ne sont pas adéquats pour une telle tâche. Ces conseils « reproduisent d’anciennes fatwâ-s [responsa ; réponses juridiques], dans un langage contemporain ou en usant d’une langue vernaculaire. Il nous faut des interprétations originales qui répondent aux problèmes des minorités d’une façon qui soit libre des effets négatifs généralement associés au fiqh de l’opportunité passagère ou de la contrainte pressante » (p.64).
Le fiqh des minorités s’inscrit donc dans une double nécessité : d’une part répondre aux questions spécifiques que soulève la présence des minorités musulmanes dans le monde (hors des pays majoritairement musulmans) et, d’autre part, désenclaver la pratique juridique et l’inscrire dans l’interconnaissance.
_________________________
[1] Terre de la concertation et de l’acceptation complète de l’islam
[2] dâr al-islâm =Terre de l’islam (terre où l’islam est pratiquée) ; dâr al-harb = Territoire de guerre, hostile à l’Islam.
Compte tenu des questions complexes, exposées ci-dessus, auxquelles ce fiqh doit faire face et compte tenu des outils qu’il exige (l’intégration des sciences sociales et humaines comme outils de compréhension), il est « une discipline collective et ne devrait pas être pratiqué individuellement. » (p.61)
L’ensemble de ces questions entremêlées et croisées ne peut être traitée, selon Al-Alwani, que dans une vision « globale et ouverte » et dans une démarche « collective ». La vision globale et ouverte exige « l’apport collectif de nombreux savants et spécialistes, venant de différentes disciplines sociales et religieuses. Ces personnes doivent examiner et étudier la question sous tous les angles, en particulier ceux de nature générale, qui affectent le futur des minorités musulmanes, de façon à formuler les problèmes correctement et à en rechercher les solutions dans le fiqh » (p.62).
Des exemples de collaboration possible :
Sur une question touchant, par exemple, l’économie, elle peut être « traitée conjointement par un économiste, un expert juridique et un juriste religieux, chacun traitant le sujet à partir de son point de vue particulier » (p.62). Il ne s’agit donc pas de faire du sociologue, de l’économiste, de l’expert comptable ou du politologue des « juristes religieux » mais d’aller vers une production juridique qui s’effectue dans l’interconnaissance.
Pour fructifier une production juridique dans l’interconnaissance, Al-Alwani pense, qu’il faut développer des institutions mettant en contact les juristes avec les autres spécialités (voir p.64) et sortir d’une pratique enclavée du droit.
Il faut dépasser le seul club des experts du fiqh. En effet pour Al-Alwani, les « conseils de fiqh » (p.64), tels qu’ils existent aujourd’hui ne sont pas adéquats pour une telle tâche. Ces conseils « reproduisent d’anciennes fatwâ-s [responsa ; réponses juridiques], dans un langage contemporain ou en usant d’une langue vernaculaire. Il nous faut des interprétations originales qui répondent aux problèmes des minorités d’une façon qui soit libre des effets négatifs généralement associés au fiqh de l’opportunité passagère ou de la contrainte pressante » (p.64).
Le fiqh des minorités s’inscrit donc dans une double nécessité : d’une part répondre aux questions spécifiques que soulève la présence des minorités musulmanes dans le monde (hors des pays majoritairement musulmans) et, d’autre part, désenclaver la pratique juridique et l’inscrire dans l’interconnaissance.
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[1] Terre de la concertation et de l’acceptation complète de l’islam
[2] dâr al-islâm =Terre de l’islam (terre où l’islam est pratiquée) ; dâr al-harb = Territoire de guerre, hostile à l’Islam.