Pour étudier la «raison politique arabe », Al Jabri a fait appel à un ensemble de concepts qu’il a emprunté aux sciences sociales tels l’inconscient politique, l’imaginaire social, l’espace social, etc.
Cet article est publié avec l'aimable autorisation de l'auteur. Il a déjà fait l'objet d'une publication dans le journal le marocain le Matin
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Mohammed Abed Al Jabri se présente à nous en tant que personnalité intellectuelle et humaine multidimensionnelle. Il a pu forger cette personnalité par le travail assidu, dans l’enseignement, la recherche, l’écriture et l’engagement politique. Il l’a construite à l’intérieur d’un corpus qui se distingue par une originalité, une cohérence et un équilibre particuliers dans la production intellectuelle arabe. Aucun chercheur dans l’histoire des idées arabes ne peut ignorer ou rester indifférent face à son projet intellectuel. Al Jabri s’est imposé comme une référence incontournable en forgeant un style nouveau d’écriture, une approche méthodologique originale, et un ensemble de concepts qu’il a pu élaborer avec une patience et une passion rares. La préoccupation majeure qui a mobilisé Al Jabri consiste dans la construction d’une « théorie critique » arabe, qui rompt avec les traditions de rumination, de traduction approximative et d’éclectisme. Al Jabri affronte ses objets à partir d’une culture ancrée dans le patrimoine, maitrisant son « capital symbolique » dont il est habitué au lexique, aux significations, aux personnages et à ses différents enjeux.
Il n’a jamais cessé d’être à l’écoute de la production de la pensée occidentale. Ce qui lui a permis d’accorder un intérêt particulier à la leçon épistémologique et au jugement critique des méthodes et des concepts. Dans la personnalité d’Al Jabri interagit l’érudit de la tradition (athurath) ; le lecteur de la pensée contemporaine, l’acteur pédagogique et le connaisseur du monde de la politique. Quatre dimensions se présentent, chaque fois et de manières inégales, dans les plis de ses textes, même s’il s’agit de ses écrits les plus abstraits, ce qu’il cherchait à éviter dans la plupart de ses livres. Le lecteur peut, aisément, percevoir ces préoccupations, même dans ses livres les plus courts qu’il écrivit par souci pédagogique. Il fut un grand constructeur de livres. Il les élaborait à partir d’une architecture qui perturbe tout lecteur à la recherche de la facilité, ou guidé par des intentions éclectiques ou opportunistes. La structuration méthodologique qu’il a forgée et la langue éloquemment fluide dont il avait la maîtrise expliquent la cohérence et la complémentarité de ses livres.
Il n’a jamais cessé d’être à l’écoute de la production de la pensée occidentale. Ce qui lui a permis d’accorder un intérêt particulier à la leçon épistémologique et au jugement critique des méthodes et des concepts. Dans la personnalité d’Al Jabri interagit l’érudit de la tradition (athurath) ; le lecteur de la pensée contemporaine, l’acteur pédagogique et le connaisseur du monde de la politique. Quatre dimensions se présentent, chaque fois et de manières inégales, dans les plis de ses textes, même s’il s’agit de ses écrits les plus abstraits, ce qu’il cherchait à éviter dans la plupart de ses livres. Le lecteur peut, aisément, percevoir ces préoccupations, même dans ses livres les plus courts qu’il écrivit par souci pédagogique. Il fut un grand constructeur de livres. Il les élaborait à partir d’une architecture qui perturbe tout lecteur à la recherche de la facilité, ou guidé par des intentions éclectiques ou opportunistes. La structuration méthodologique qu’il a forgée et la langue éloquemment fluide dont il avait la maîtrise expliquent la cohérence et la complémentarité de ses livres.
« Libérer la culture de la politique »
Dans « la question culturelle» (1994) il aborde des sujets inhérents aux préoccupations d’un projet habité par un souci systémique évident. Et comme tous ceux qui tendent à former un système, il s’est vu contraint de simplifier son mode analytique, son référentiel et son ordre de pensée pour toucher un large public. Il s’adressait autant à ceux qui s’intéressent à ce que Hicham Djaït appelle « la philosophie de la culture » qu’aux couches moyennes.
Al Jabri considère que la « question culturelle », dans son acception la plus large, est aujourd’hui « le moteur de l’histoire ». Elle est « la question des questions ». Elle ne peut être traitée, dans le contexte arabe, qu’a travers une réflexion approfondie sur le terme arabe du mot thaqafa (culture), dans la mesure où elle acquiert une fonction historique dont la finalité est le dépassement du simple cadre géographique dans le renforcement des tendances unionistes et fédératrices, surtout que l’état actuel de cette culture reflète une certaine « conscience malheureuse », incapable de régler ses comptes avec le passé. Or se libérer du passé ne peut s’accomplir qu’en se l’appropriant. Le drame des Arabes c’est qu’ils sont incapables de réfléchir à l’avenir sans se référer au passé. C’est pour cette raison qu’il est impossible de trouver une voie de l’avenir si on ne maîtrise pas consciemment la voie du passé. En plus de la conscience malheureuse, Al Jabri observe que le climat culturel arabe actuel est malade et ambigu. Malade à cause de la dépendance de schémas préétablis et malheureusement inadaptés, et ambigu parce que la « raison » avec laquelle on interprète le passé ; on explique le présent et on légifère le futur, est brouillée, perturbée aussi bien par le poids de l’historicité que par la domination de ce qu’il appelle « la culture de la perception » véhiculée par les médias audiovisuels. La « politique de la conscience » n’est pas le seul défi à affronter, il faudrait, aussi, aux yeux d’Al Jabri, « libérer la culture de la politique », car cette dernière a dominé la culture et l’a complètement étouffée. Et ce n’est nullement une spécificité arabe. La politique est un pouvoir, la culture est une liberté. Revendiquer la libération de la culture suppose une stratégie tridimensionnelle : la première est politique. Elle a pour finalité l’instauration d’une véritable démocratie ; la deuxième dimension est socio-économique. Elle a pour objectif un développement national ; et enfin une dimension culturelle qui consiste dans la construction d’une culture arabe moderne à partir d’une synthèse créatrice de la modernité et l’authenticité. Ce projet civilisationnel nécessite, pour Al Jabri, la constitution d’un « bloc historique » (Koutla Tarikhiya) susceptible d’établir un consensus intellectuel entre tous les courants politiques, les classes et les groupes sociaux, autour des grands objectifs nationaux, appuyés par une conscience collective des enjeux culturels de ce projet. Il s’agit, sans doute, d’une conception intégrée et d’un programme « politique » clair. Or, où commence l’intellectuel et jusqu'à quelle limite interfère-t-il avec le politique ? Est-ce Al Jabri, l’intellectuel, qui formule les détails d’un projet culturel ou bien Al Jabri, le politique, traumatisé par le déchirement, le retard, la répression et la démission qui caractérisent le monde arabe . Est-ce que la réflexion sur la question culturelle, dans le cadre d’une forme de prédication à un « bloc historique », constitue un effort intellectuel au nom de la politique ou bien un acte politique sous couvert de culture ?
Les chercheurs sont unanimes pour qualifier la pensée arabo-musulmane, depuis ses débuts, comme étant une pensée traversée par des considérations d'ordre politique. Elle est investie par des enjeux de pouvoir et des conflits pour l'acquisition de légitimités chaque fois contestées. Les pouvoirs politiques arabomusulmans développèrent, souvent, des structures d'apologie à l'intérieur du champ scientifique et intellectuel. Les exemples ne manquent pas dans les écrits des juristes, des poètes, des philosophes et des écrivains. Cette imbrication de la pensée et de la politique n'a cependant pas permis de former une pensée politique systémique, particulièrement dans les périodes moderne et contemporaine. Le champ culturel arabe, en effet, a expérimenté des doctrines et des courants dans le processus de la construction étatique postcolonial. Ces tentatives sont restées prisonnières de contraintes pratiques liées aux stratégies de pouvoir sans pour autant accéder au niveau de l’élaboration d'une théorie politique. C'est pour cette raison que la plupart des courants politiques dans le monde arabe sont restés sous forme de projets, dépourvus de tout fondement théorique. Les tendances salafie réformiste, libérale, marxiste et les tentatives éclectiques, ont toutes été mises à l'essai dans la pratique politique arabe sans qu'aucune d'entre elles n'ait pu réaliser ses slogans afin de créer un champ politique répondant, véritablement, aux conditions de la modernisation politique
Al Jabri considère que la « question culturelle », dans son acception la plus large, est aujourd’hui « le moteur de l’histoire ». Elle est « la question des questions ». Elle ne peut être traitée, dans le contexte arabe, qu’a travers une réflexion approfondie sur le terme arabe du mot thaqafa (culture), dans la mesure où elle acquiert une fonction historique dont la finalité est le dépassement du simple cadre géographique dans le renforcement des tendances unionistes et fédératrices, surtout que l’état actuel de cette culture reflète une certaine « conscience malheureuse », incapable de régler ses comptes avec le passé. Or se libérer du passé ne peut s’accomplir qu’en se l’appropriant. Le drame des Arabes c’est qu’ils sont incapables de réfléchir à l’avenir sans se référer au passé. C’est pour cette raison qu’il est impossible de trouver une voie de l’avenir si on ne maîtrise pas consciemment la voie du passé. En plus de la conscience malheureuse, Al Jabri observe que le climat culturel arabe actuel est malade et ambigu. Malade à cause de la dépendance de schémas préétablis et malheureusement inadaptés, et ambigu parce que la « raison » avec laquelle on interprète le passé ; on explique le présent et on légifère le futur, est brouillée, perturbée aussi bien par le poids de l’historicité que par la domination de ce qu’il appelle « la culture de la perception » véhiculée par les médias audiovisuels. La « politique de la conscience » n’est pas le seul défi à affronter, il faudrait, aussi, aux yeux d’Al Jabri, « libérer la culture de la politique », car cette dernière a dominé la culture et l’a complètement étouffée. Et ce n’est nullement une spécificité arabe. La politique est un pouvoir, la culture est une liberté. Revendiquer la libération de la culture suppose une stratégie tridimensionnelle : la première est politique. Elle a pour finalité l’instauration d’une véritable démocratie ; la deuxième dimension est socio-économique. Elle a pour objectif un développement national ; et enfin une dimension culturelle qui consiste dans la construction d’une culture arabe moderne à partir d’une synthèse créatrice de la modernité et l’authenticité. Ce projet civilisationnel nécessite, pour Al Jabri, la constitution d’un « bloc historique » (Koutla Tarikhiya) susceptible d’établir un consensus intellectuel entre tous les courants politiques, les classes et les groupes sociaux, autour des grands objectifs nationaux, appuyés par une conscience collective des enjeux culturels de ce projet. Il s’agit, sans doute, d’une conception intégrée et d’un programme « politique » clair. Or, où commence l’intellectuel et jusqu'à quelle limite interfère-t-il avec le politique ? Est-ce Al Jabri, l’intellectuel, qui formule les détails d’un projet culturel ou bien Al Jabri, le politique, traumatisé par le déchirement, le retard, la répression et la démission qui caractérisent le monde arabe . Est-ce que la réflexion sur la question culturelle, dans le cadre d’une forme de prédication à un « bloc historique », constitue un effort intellectuel au nom de la politique ou bien un acte politique sous couvert de culture ?
Les chercheurs sont unanimes pour qualifier la pensée arabo-musulmane, depuis ses débuts, comme étant une pensée traversée par des considérations d'ordre politique. Elle est investie par des enjeux de pouvoir et des conflits pour l'acquisition de légitimités chaque fois contestées. Les pouvoirs politiques arabomusulmans développèrent, souvent, des structures d'apologie à l'intérieur du champ scientifique et intellectuel. Les exemples ne manquent pas dans les écrits des juristes, des poètes, des philosophes et des écrivains. Cette imbrication de la pensée et de la politique n'a cependant pas permis de former une pensée politique systémique, particulièrement dans les périodes moderne et contemporaine. Le champ culturel arabe, en effet, a expérimenté des doctrines et des courants dans le processus de la construction étatique postcolonial. Ces tentatives sont restées prisonnières de contraintes pratiques liées aux stratégies de pouvoir sans pour autant accéder au niveau de l’élaboration d'une théorie politique. C'est pour cette raison que la plupart des courants politiques dans le monde arabe sont restés sous forme de projets, dépourvus de tout fondement théorique. Les tendances salafie réformiste, libérale, marxiste et les tentatives éclectiques, ont toutes été mises à l'essai dans la pratique politique arabe sans qu'aucune d'entre elles n'ait pu réaliser ses slogans afin de créer un champ politique répondant, véritablement, aux conditions de la modernisation politique
La complexité du politique
Ce rapport paradoxal entre l’idéel et le réel, la théorie et le comportement dans la politique arabe, n'a pas encore été soumis, selon Al Jabri, à une véritable analyse des fondements et des modes d'expressions, que ce soit de l'intérieur des différents pouvoirs ou au sein des partis et des forces de l'opposition qui se sont succédés dans les pays arabes.
Le terrain est certainement mitigé, et la tâche n'est pas mince. Car la complexité du politique, de l'idéologie et l'intensité des conflits alimentés par la quête du pouvoir n'offrent pas au chercheur les moyens susceptibles d'interpeller, scientifiquement, les mécanismes de la pratique politique arabe. Toutefois, on trouve une multitude d'écrits et de livres traitant des questions politiques, soit à partir d’un pays déterminé, ou touchant- en généralisant, et parfois d'une manière arbitraire- l'ensemble des expériences politiques arabes. Les problèmes de la légitimité, de l’Etat, de la démocratie, de la laïcité, de la chari'a, des partis politiques, des régimes parlementaire, militaire et oligarchique, de la souveraineté et de la société civile, etc., sont traités dans des livres et des thèses de chercheurs arabes. Seulement, le dispositif conceptuel, la méthodologie, le type d'argumentation et l'effort de synthétisation théorique font, généralement, défaut. Le livre de Mohammed Abed Al Jabri «La raison politique arabe, déterminations et manifestations » (1990) constitue un moment très important dans le cadre de la réflexion sur les fondements de la pensée politique arabe, d’autant plus que ce livre forme la troisième partie de sa critique des structures de la Raison. Ce qui préoccupe Al Jabri dans ce livre, en plus de la question du statut de la politique dans la pensée arabe médiévale et moderne, c’est de développer sa tentative de théorisation esquissée dans les deux premiers tomes de sa Critique. La Raison politique arabe, depuis ses débuts, est déterminée, corrélativement, par trois composantes : la croyance (al aquidha), la tribu (al quabilah) et le butin (al rhannimah).
Ces trois éléments constitutifs trouvent, chaque fois, leurs modes d’expressions dans l’Etat de ce qu’il nomme «l’appropriation politique » ou « la mythologie d’al Imama », dans les différents mouvements qui prêchent les Lumières dans la tradition arabo-musulmane, dans le patrimoine sultanien ou dans la jurisprudence politique.
Le terrain est certainement mitigé, et la tâche n'est pas mince. Car la complexité du politique, de l'idéologie et l'intensité des conflits alimentés par la quête du pouvoir n'offrent pas au chercheur les moyens susceptibles d'interpeller, scientifiquement, les mécanismes de la pratique politique arabe. Toutefois, on trouve une multitude d'écrits et de livres traitant des questions politiques, soit à partir d’un pays déterminé, ou touchant- en généralisant, et parfois d'une manière arbitraire- l'ensemble des expériences politiques arabes. Les problèmes de la légitimité, de l’Etat, de la démocratie, de la laïcité, de la chari'a, des partis politiques, des régimes parlementaire, militaire et oligarchique, de la souveraineté et de la société civile, etc., sont traités dans des livres et des thèses de chercheurs arabes. Seulement, le dispositif conceptuel, la méthodologie, le type d'argumentation et l'effort de synthétisation théorique font, généralement, défaut. Le livre de Mohammed Abed Al Jabri «La raison politique arabe, déterminations et manifestations » (1990) constitue un moment très important dans le cadre de la réflexion sur les fondements de la pensée politique arabe, d’autant plus que ce livre forme la troisième partie de sa critique des structures de la Raison. Ce qui préoccupe Al Jabri dans ce livre, en plus de la question du statut de la politique dans la pensée arabe médiévale et moderne, c’est de développer sa tentative de théorisation esquissée dans les deux premiers tomes de sa Critique. La Raison politique arabe, depuis ses débuts, est déterminée, corrélativement, par trois composantes : la croyance (al aquidha), la tribu (al quabilah) et le butin (al rhannimah).
Ces trois éléments constitutifs trouvent, chaque fois, leurs modes d’expressions dans l’Etat de ce qu’il nomme «l’appropriation politique » ou « la mythologie d’al Imama », dans les différents mouvements qui prêchent les Lumières dans la tradition arabo-musulmane, dans le patrimoine sultanien ou dans la jurisprudence politique.
«La raison politique arabe»
Dès l’introduction de son ouvrage, Al Jabri met son lecteur en garde, pour ne pas confondre les grilles de lecture. Les deux premiers tomes de sa Critique diffèrent, au niveau de leurs appareils épistémologiques, de celui sur la pensée politique. Pour Al Jabri , le lecteur sera déçu s'il s’attend de la part de l'auteur à une présentation de la «raison politique arabe » dans le cadre de sa classification tripartite du système cognitif de la culture arabe : rhétorique (bayan), gnose (Irfane), démonstration (burhane) . Ce système répond aux conditions d'analyse de la Raison « pure » Et si on reproduit les mêmes critères d'approche et d'évaluation, on tombera, nécessairement, dans un discours répétitif à propos du califat chez les orthodoxes et de la formation du système cognitif rhétorique ; ou de la wilaqya et d'Al Imama dans le cadre du système cognitif gnostique, ou bien de la «cité idéale », au moment où les deux premiers tomes ont expliqué la manière avec laquelle « Al Farabi » a pu intégrer le système cognitif démonstratif d'Aristote dans la culture arabe.
Il est admis que chaque raison politique est orientée, d'une manière ou d'une autre, par un certain savoir, mais seulement en sa qualité de «raison » et non en tant que «politique ». Au cas où cette raison se lie, politiquement, à ce savoir, elle n'en reste pas moins dépendante, car cette raison tentera, toujours, d'investir ce savoir dans sa stratégie de décision. Si la Raison politique n'est pas seulement rhétorique, gnostique ou démonstrative, parce qu'elle intègre les catégories et les mécanismes des différents systèmes de savoir, la politique est fondée sur le pragmatisme et les considérations utilitaires. La Raison politique pour Al Jabri, est une « raison » parce que « les déterminants de l’action politique et ses manifestations obéissent totalement à une logique interne qui les gouvernent et organisent leur rapport. Une logique fondée sur des principes et des mécanismes susceptibles d’être décrits et analysés. Cette Raison, aussi, est « politique » car sa fonction ne consiste guère à produire le savoir mais à exercer le pouvoir de gouverner, ou bien de montrer les stratégies de son exercice ».
Pour étudier la «raison politique arabe », Al Jabri a fait appel à un ensemble de concepts qu'il a emprunté aux sciences sociales tels l'inconscient politique, l’imaginaire social, l'espace social, etc. Dans les deux premiers tomes de sa Critique de la Raison arabe « pure », Al Jabri a insisté, d'une manière ferme, sur une approche épistémologique stricte. Ce qui l'intéressait, c'étaient les concepts, leurs fondements, leurs formations et leurs portées cognitives. Pour cela il a exclu tout ce qui perturbe le rationalisme rigoureux de son approche. Dans la Raison politique arabe, El Jabri s'est trouvé contraint d'intégrer des concepts issus de la psychanalyse, de l’'anthropologie politique et de la sociologie. La Raison politique possède un caractère concret que le seul rationalisme «pur » ne peut déconstruire ni dévoiler. L'imaginaire, les expressions de l’inconscient, les non-dits du discours politique ou le discours de la politique, les pathologies du pouvoir, etc. sont des repères et des indices d’analyse indispensables. Ce livre ne prétend pas à l’exhaustivité, malgré son caractère volumineux, son dispositif conceptuel et son corpus. Il constitue le troisième temps d’une réflexion, très ambitieuse, sur les fondements de la culture arabe médiévale prêchant une véritable modernité politique et culturelle. Le troisième livre se veut une invitation au « renouveau de la raison politique arabe » en transformant « la tribu dans notre société en une non-tribu », « le butin en une économie d’impôt » et « la croyance en une simple opinion ». Tout cela ne peut se faire qu’à partir du moment où la prise de conscience de la « nécessité de la démocratie doit passer par la conscience des origines et des fondements du despotisme ». La sortie de l’autoritarisme, la démocratisation de l’Etat et de la société, l’implantation des valeurs de l’effort, du mérite, de la créativité et l’adoption des principes du monde moderne, en économie, en politique et dans la culture. Tels sont les principaux objectifs qu’Al Jabri n’a cessé de défendre dans son long parcours de pédagogue, de militant et d’intellectuel d’une envergure rare.
Il est admis que chaque raison politique est orientée, d'une manière ou d'une autre, par un certain savoir, mais seulement en sa qualité de «raison » et non en tant que «politique ». Au cas où cette raison se lie, politiquement, à ce savoir, elle n'en reste pas moins dépendante, car cette raison tentera, toujours, d'investir ce savoir dans sa stratégie de décision. Si la Raison politique n'est pas seulement rhétorique, gnostique ou démonstrative, parce qu'elle intègre les catégories et les mécanismes des différents systèmes de savoir, la politique est fondée sur le pragmatisme et les considérations utilitaires. La Raison politique pour Al Jabri, est une « raison » parce que « les déterminants de l’action politique et ses manifestations obéissent totalement à une logique interne qui les gouvernent et organisent leur rapport. Une logique fondée sur des principes et des mécanismes susceptibles d’être décrits et analysés. Cette Raison, aussi, est « politique » car sa fonction ne consiste guère à produire le savoir mais à exercer le pouvoir de gouverner, ou bien de montrer les stratégies de son exercice ».
Pour étudier la «raison politique arabe », Al Jabri a fait appel à un ensemble de concepts qu'il a emprunté aux sciences sociales tels l'inconscient politique, l’imaginaire social, l'espace social, etc. Dans les deux premiers tomes de sa Critique de la Raison arabe « pure », Al Jabri a insisté, d'une manière ferme, sur une approche épistémologique stricte. Ce qui l'intéressait, c'étaient les concepts, leurs fondements, leurs formations et leurs portées cognitives. Pour cela il a exclu tout ce qui perturbe le rationalisme rigoureux de son approche. Dans la Raison politique arabe, El Jabri s'est trouvé contraint d'intégrer des concepts issus de la psychanalyse, de l’'anthropologie politique et de la sociologie. La Raison politique possède un caractère concret que le seul rationalisme «pur » ne peut déconstruire ni dévoiler. L'imaginaire, les expressions de l’inconscient, les non-dits du discours politique ou le discours de la politique, les pathologies du pouvoir, etc. sont des repères et des indices d’analyse indispensables. Ce livre ne prétend pas à l’exhaustivité, malgré son caractère volumineux, son dispositif conceptuel et son corpus. Il constitue le troisième temps d’une réflexion, très ambitieuse, sur les fondements de la culture arabe médiévale prêchant une véritable modernité politique et culturelle. Le troisième livre se veut une invitation au « renouveau de la raison politique arabe » en transformant « la tribu dans notre société en une non-tribu », « le butin en une économie d’impôt » et « la croyance en une simple opinion ». Tout cela ne peut se faire qu’à partir du moment où la prise de conscience de la « nécessité de la démocratie doit passer par la conscience des origines et des fondements du despotisme ». La sortie de l’autoritarisme, la démocratisation de l’Etat et de la société, l’implantation des valeurs de l’effort, du mérite, de la créativité et l’adoption des principes du monde moderne, en économie, en politique et dans la culture. Tels sont les principaux objectifs qu’Al Jabri n’a cessé de défendre dans son long parcours de pédagogue, de militant et d’intellectuel d’une envergure rare.
Bibliographie de Mohamed Abed Al-Jabri
- 1970 (Ar), Tribalisme et Etat: repères pour une théorie khaldounienne de l’histoire musulmane.
- 1973 (Ar), Lumières sur les problèmes d’enseignement au Maroc.
- 1976 (Ar), Introduction à la philosophie des sciences (2 tomes).
- 1977 (Ar), Pour une vision progressiste de nos problèmes intellectuels et éducatifs.
- 1980 (Ar), Nous et la tradition. Lectures contemporaine de notre patrimoine philosophique (réed. 2006).
- 1982 (Ar), Le discours arabe contemporain: étude analytique et critique.
- 1984 (Ar), La formation de la raison arabe.
- 1986 (Ar), La structure de la raison arabe.
- 1988 (Ar), Les politiques d’enseignement dans le Maghreb arabe.
- 1988 (Ar), Problématiques de la pensée arabe contemporaine.
- 1988 (Ar), Le Maroc contemporain: particularité et identité... modernité et développement.
- 1990 (Ar), La raison politique arabe.
- 1990 (Ar), Le dialogue de l’Orient et de l’Occident (avec Hassan Hanafi).
- 1991 (Ar), Tradition et modernité: études et débats.
- 1994 (Fr), Introduction à la critique de la raison arabe, traduit de l’arabe par Ahmed Mahfoud et Marc Geoffroy, Paris, éd. La Découverte (ISBN 270712379X)
- 1994 (Ar), La question culturelle.
- 1995 (Ar), Les intellectuels dans la civilisation arabomusulmane: l’infortune d’Ibn Hanbal et le drame d’Averroès.
- 1995 (Ar), La question de l’identité: l’arabité, l’islam et... l’occident.
- 1996 (Ar), Religion, Etat et l’application de la Loi religieuse (Charia).
- 1996 (Ar), Le projet du Renouveau arabe.
- 1997 (Ar), La démocratie et les droits de l’homme.
- 1997 (Ar), Quelques sujets de la pensée contemporaine.
- 1997 (Ar), Point de vue: vers la reconstruction des sujets intellectuels de la pensée arabe contemporaine.
- 1997 (Ar), Archéologie de la mémoire: de loin.
- 1998 (Ar), Averroès : biographie et pensée.
- 1999 (En), Arab-Islamic Philosophy: A Contemporary Critique. Trans. Aziz Abbassi. Austin: University of Texas Press, 1999. (ISBN 0-292-70480-1)
- 2001 (Ar), La raison éthique arabe.
- 2005 (Ar), Critique du besoin à la réforme.
- 2006 (Ar), Introduction au Coran.
- 2008 (Ar), La compréhension du Coran.
- 1973 (Ar), Lumières sur les problèmes d’enseignement au Maroc.
- 1976 (Ar), Introduction à la philosophie des sciences (2 tomes).
- 1977 (Ar), Pour une vision progressiste de nos problèmes intellectuels et éducatifs.
- 1980 (Ar), Nous et la tradition. Lectures contemporaine de notre patrimoine philosophique (réed. 2006).
- 1982 (Ar), Le discours arabe contemporain: étude analytique et critique.
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- 1988 (Ar), Les politiques d’enseignement dans le Maghreb arabe.
- 1988 (Ar), Problématiques de la pensée arabe contemporaine.
- 1988 (Ar), Le Maroc contemporain: particularité et identité... modernité et développement.
- 1990 (Ar), La raison politique arabe.
- 1990 (Ar), Le dialogue de l’Orient et de l’Occident (avec Hassan Hanafi).
- 1991 (Ar), Tradition et modernité: études et débats.
- 1994 (Fr), Introduction à la critique de la raison arabe, traduit de l’arabe par Ahmed Mahfoud et Marc Geoffroy, Paris, éd. La Découverte (ISBN 270712379X)
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- 1995 (Ar), Les intellectuels dans la civilisation arabomusulmane: l’infortune d’Ibn Hanbal et le drame d’Averroès.
- 1995 (Ar), La question de l’identité: l’arabité, l’islam et... l’occident.
- 1996 (Ar), Religion, Etat et l’application de la Loi religieuse (Charia).
- 1996 (Ar), Le projet du Renouveau arabe.
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- 1999 (En), Arab-Islamic Philosophy: A Contemporary Critique. Trans. Aziz Abbassi. Austin: University of Texas Press, 1999. (ISBN 0-292-70480-1)
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