Aujourd’hui, la théorie du choc des civilisations, émise par l’universitaire américain Samuel Huntington, est indéniablement plus pertinente que jamais dans l’esprit de nombreuses personnes. S’agissant des relations entre l’Occident et le monde musulman, on a souvent tendance à considérer que les valeurs occidentales et musulmanes sont tout simplement incompatibles.
En ce sens, l’argument de Samuel Huntington selon lequel la période succédant à la guerre froide n’est pas définie selon l’antagonisme des idéologies et des économies mais plutôt par la différence des cultures, a été véritablement prophétique. En effet, la culture est devenue un facteur essentiel de différenciation, bien qu’elle soit souvent perçue de manière trop statique.
Cependant d’une manière générale, les conclusions de l’universitaire américain ont suscité un certain malaise. Si ce qu’il dit était vrai, le monde serait voué à un avenir assez sombre. Les différences culturelles propices à une diversité dynamique ne seraient pas essentielles mais plutôt néfastes. Selon les détracteurs de Samuel Huntington, celui-ci voit le verre à moitié vide. Pour eux, d’une manière générale, l’interaction entre les différentes civilisations et la mondialisation sont plutôt encourageantes.
Les deux points de vue ont des arguments valables. Samuel Huntington était un visionnaire : en un sens, il s’est rendu compte que l’antagonisme idéologique n’était plus une cause de conflit même si ce facteur est toujours présent dans les esprits (mais son argument relatif à l’économie est moins convainquant). Il est cependant aussi vrai que l’universitaire américain a une vision apocalyptique des relations internationales – c’est une vision de discorde et d’hostilité éternelles.
Parler de disparités entre les valeurs occidentales et musulmanes n’est pas mauvais en soi, mais si l’on considère que celles-ci sont figées, on passe à côté de la question car la culture s’adapte facilement et l’être humain est capable de modifier son comportement culturel selon son environnement.
Si l’on veut remettre en question la théorie de Samuel Huntington, il faut le faire du point de vue des perceptions. Pour un grand nombre d’Occidentaux, le Printemps arabe constitue un exemple parfait de cette théorie : ce qui au début était une aspiration à la démocratie et à la liberté a abouti à l’avènement de mouvements islamistes (qui croient à un islam politique) qui ne sont ni démocratiques ni tolérants et cherchent notamment à imposer une législation restrictive vis-à-vis des femmes, qui constituent une portion importante de la population des pays concernés.
La réalité réside dans la nuance. Par exemple, l’Egypte et la Tunisie, où les Frères musulmans et le parti Ennahda sont au pouvoir, ont connu des changements inédits par rapport à l’époque des anciens régimes de ces pays. Ces deux partis sont néanmoins de plus en plus contestés car ils ne tiennent pas comptent des organes représentatifs et s’arrogent des pouvoirs qui leur permettent de limiter certaines libertés, comme notamment la liberté d’expression.
Il faut à tout prix prendre conscience des ramifications politiques sous-jacentes des révoltes arabes pour saisir ce qui se passe. L’idée selon laquelle, les aspirations des sociétés arabes et celles des sociétés occidentales sont tout à fait incompatibles est simpliste et erronée. Par ailleurs, il est tout aussi naïf de s’attendre que les sociétés arabes en ébullition embrassent sans réserve les valeurs occidentales telles que la laïcité et la primauté de l’individu au détriment du groupe.
En ce sens, l’argument de Samuel Huntington selon lequel la période succédant à la guerre froide n’est pas définie selon l’antagonisme des idéologies et des économies mais plutôt par la différence des cultures, a été véritablement prophétique. En effet, la culture est devenue un facteur essentiel de différenciation, bien qu’elle soit souvent perçue de manière trop statique.
Cependant d’une manière générale, les conclusions de l’universitaire américain ont suscité un certain malaise. Si ce qu’il dit était vrai, le monde serait voué à un avenir assez sombre. Les différences culturelles propices à une diversité dynamique ne seraient pas essentielles mais plutôt néfastes. Selon les détracteurs de Samuel Huntington, celui-ci voit le verre à moitié vide. Pour eux, d’une manière générale, l’interaction entre les différentes civilisations et la mondialisation sont plutôt encourageantes.
Les deux points de vue ont des arguments valables. Samuel Huntington était un visionnaire : en un sens, il s’est rendu compte que l’antagonisme idéologique n’était plus une cause de conflit même si ce facteur est toujours présent dans les esprits (mais son argument relatif à l’économie est moins convainquant). Il est cependant aussi vrai que l’universitaire américain a une vision apocalyptique des relations internationales – c’est une vision de discorde et d’hostilité éternelles.
Parler de disparités entre les valeurs occidentales et musulmanes n’est pas mauvais en soi, mais si l’on considère que celles-ci sont figées, on passe à côté de la question car la culture s’adapte facilement et l’être humain est capable de modifier son comportement culturel selon son environnement.
Si l’on veut remettre en question la théorie de Samuel Huntington, il faut le faire du point de vue des perceptions. Pour un grand nombre d’Occidentaux, le Printemps arabe constitue un exemple parfait de cette théorie : ce qui au début était une aspiration à la démocratie et à la liberté a abouti à l’avènement de mouvements islamistes (qui croient à un islam politique) qui ne sont ni démocratiques ni tolérants et cherchent notamment à imposer une législation restrictive vis-à-vis des femmes, qui constituent une portion importante de la population des pays concernés.
La réalité réside dans la nuance. Par exemple, l’Egypte et la Tunisie, où les Frères musulmans et le parti Ennahda sont au pouvoir, ont connu des changements inédits par rapport à l’époque des anciens régimes de ces pays. Ces deux partis sont néanmoins de plus en plus contestés car ils ne tiennent pas comptent des organes représentatifs et s’arrogent des pouvoirs qui leur permettent de limiter certaines libertés, comme notamment la liberté d’expression.
Il faut à tout prix prendre conscience des ramifications politiques sous-jacentes des révoltes arabes pour saisir ce qui se passe. L’idée selon laquelle, les aspirations des sociétés arabes et celles des sociétés occidentales sont tout à fait incompatibles est simpliste et erronée. Par ailleurs, il est tout aussi naïf de s’attendre que les sociétés arabes en ébullition embrassent sans réserve les valeurs occidentales telles que la laïcité et la primauté de l’individu au détriment du groupe.
S’attendre à une adhésion totale tout comme la déclarer impossible, c’est croire que dans l’absolu, la culture finit par prendre le dessus.
Au cours des douze dernières années qui se sont écoulées depuis les événements du 11 septembre 2001, les Occidentaux se sont familiarisés avec le monde musulman et ses complexités. Ils en ont désormais une meilleure compréhension et les bouleversements survenus dans cette région ont modifié leur perception manichéenne de celle-ci. Dès le début de leur révolte, il y a deux ans, les Syriens n’ont pas hésité à demander l’aide de l’Occident. Quant aux Américains et aux Européens, ils ont tout de suite vu d’un bon œil le renversement de potentats pro-occidentaux.
La liberté pour un Syrien ou un Egyptien est la même que pour un Français ou un Américain, même si le contrat social choisi pour garantir celle-ci diffère selon les uns et les autres. Certains pencheront plutôt pour la laïcité, d’autres pour la religion. Mais si le contrat social choisi finit par miner la liberté, alors tôt ou tard, cela aboutira inévitablement à de nouvelles révoltes.
Samuel Huntington avait raison de considérer la culture comme une sorte de frontière entre les sociétés occidentales et orientales. Mais les frontières changent sans cesse, elles sont perméables aux valeurs qui traversent les cultures par osmose. Il est faux de croire que les cultures sont autarciques et immuables, il est tout aussi faux de supposer que les distinctions culturelles tendent toujours à disparaître. Il existe un juste milieu : les valeurs sont transposables, l’identité est plus captivante lorsque qu’elle ne nous enchaîne pas par les valeurs qui la définissent.
En parténariat avec CGNews.
Au cours des douze dernières années qui se sont écoulées depuis les événements du 11 septembre 2001, les Occidentaux se sont familiarisés avec le monde musulman et ses complexités. Ils en ont désormais une meilleure compréhension et les bouleversements survenus dans cette région ont modifié leur perception manichéenne de celle-ci. Dès le début de leur révolte, il y a deux ans, les Syriens n’ont pas hésité à demander l’aide de l’Occident. Quant aux Américains et aux Européens, ils ont tout de suite vu d’un bon œil le renversement de potentats pro-occidentaux.
La liberté pour un Syrien ou un Egyptien est la même que pour un Français ou un Américain, même si le contrat social choisi pour garantir celle-ci diffère selon les uns et les autres. Certains pencheront plutôt pour la laïcité, d’autres pour la religion. Mais si le contrat social choisi finit par miner la liberté, alors tôt ou tard, cela aboutira inévitablement à de nouvelles révoltes.
Samuel Huntington avait raison de considérer la culture comme une sorte de frontière entre les sociétés occidentales et orientales. Mais les frontières changent sans cesse, elles sont perméables aux valeurs qui traversent les cultures par osmose. Il est faux de croire que les cultures sont autarciques et immuables, il est tout aussi faux de supposer que les distinctions culturelles tendent toujours à disparaître. Il existe un juste milieu : les valeurs sont transposables, l’identité est plus captivante lorsque qu’elle ne nous enchaîne pas par les valeurs qui la définissent.
En parténariat avec CGNews.
Le livre "The Clash of Civilizations" de Samuel Huntington, devenu un bestseller
*Michael Young, voir ses écrits ici .