Deux ans après les premières révoltes des différents peuples arabes, ce que l’on nomme communément en occident le « Printemps Arabe » semble peiner à tenir ses promesses. Faut-il s’en inquiéter ? Sommes-nous simplement face à la marche normale de l’histoire ?
Au commencement « simples » révoltes, ces mouvements se sont mués en révolution. Après avoir chassés les dictateurs d’hier, dans les pays où la parole a été donnée aux urnes, des partis Musulmans se sont hissés au pouvoir, augurant d’un nouvel ordre politique. Néanmoins, même si dans le même temps nous prenons en considération que ces peuples sont majoritairement composés de musulmans, cette accession au pouvoir des "partis religieux" rend-elle légitime, l’appellation de « Printemps Musulman » utilisée par certains ?... La diversité du « monde Musulman », qui ne peut pas être réduit aux pays du Maghreb et du Moyen-Orient, mais aussi la diversité des acteurs (internes comme externes) impliqués dans les processus de mobilisation ainsi que les nouvelles réalités sociopolitiques émergeantes laissent à penser que cette appellation n’est pas nécessairement appropriée. En revanche, nous pouvons penser que ces mouvements ont, ou auront, à plus ou moins long terme, une influence sur l’ensemble du « monde Musulman ».
En sonnant le glas des régimes autoritaires arabes, ces révoltes marquent la clôture d’un cycle pendant qu’un nouveau cycle prend place. En ce sens, nous pouvons parler de révolution, et ce d’autant plus que dans la langue arabe, révolte et révolution sont un seul et même mot : ثَوْرة (thawra). Pour autant, le terme « révolution » suggère des transformations plus profondes, et de fait, les aspirations de ces peuples sont nombreuses et pas uniquement d’ordre politique. A la hauteur du mépris infligé, des frustrations accumulées. En premier lieu, il apparait clairement que ceux-ci réclament la mise en place d’un nouvel ordre social, d’un nouvel ordre moral, d’un nouvel ordre économique, à plus de justice de façon à garantir l'égalité devant la loi, l'égalité des chances, et donc au final à ce que les occidentaux nomment la « Démocratie » [1]. C’est pourquoi, prenant en main leur destin, ces hommes et ces femmes accomplissent une « révolution de la liberté ».
Pendant ce temps, oubliant que les révolutions des siècles des lumières ont pris près d’un siècle, les observateurs occidentaux s’interrogent : Au regard de la situation actuelle, l'an II du printemps arabe ne consacre-t-il pas l'échec de l'islamisme au pouvoir ? Ils ressassent les sempiternelles questions : l’Islam peut-il être politique ? L’islam est-il compatible avec la démocratie ? Ce faisant, d’une part ils feignent d’oublier, qu’à l’instar du modèle turc et du modèle indonésien, les régimes mis en place l’ont été démocratiquement et d’autre part ils évitent soigneusement de se questionner sur le rôle qu’ils ont joué dans la région pendant les décennies passées, lorsqu’ils accordaient leur soutien aux régimes autoritaires. Et pourtant, ne peut-on pas considérer que les poncifs sur l’islam et sa nature rétrograde ou sur le sentiment de fatalisme qui aurait dominé ces sociétés, souvent véhiculés par les média occidentaux ont été invalidés par les images de ces peuples nous rappelant qu’il était encore possible de mourir pour la liberté et la dignité ?
D’ailleurs, posons-nous la question de savoir quels peuples, en réalité, s’inscrivent désormais dans la « modernité ». D’un côté, un continent en récession économique, où chacun s’accroche à ses acquis, s’interrogeant sur son identité, le plus souvent prisonnier d’une grille de lecture « ethno-centrée » dominé par l’obsession de « la menace islamiste » et où nous assistons à la montée quotidienne de l’Islamophobie (rappelant parfois certaines heures sombres du XXème siècle). De l’autre côté, des peuples dont les hommes et les femmes qui meurent chaque jour pour les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité. Pendant qu’ici des commissions parlementaires se réunissent pour « légiférer sur les tenues vestimentaires », des jeunes se sacrifient pour avoir le droit d’avoir des parlementaires.
Bien entendu, il ne s’agit pas non plus de tomber dans un optimisme béat. Le futur reste à construire. La situation est complexe. Les dimensions à prendre en compte sont nombreuses : dimension politique, sociale, confessionnelle, ethnique et enfin géopolitique. Aucune option n’est à exclure. Les incertitudes sont nombreuses. Une seule certitude : les régimes religieux nouvellement mis en place ne pourront pas ignorer la réalité. Exercer le pouvoir, c’est avant tout se confronter à la réalité. Aussi, au travers des débats qui ne manqueront pas de se tenir et des compromis qui en résulteront, nous pouvons penser que nous assistons à l’éclosion d’un nouvel ordre, d’un nouveau paradigme. Après tout, les modèles turc, indonésien et malaisien, sont là pour nous prouver qu’identité islamique, développement économique et démocratie politique ne sont pas incompatibles.
D’ailleurs, posons-nous la question de savoir quels peuples, en réalité, s’inscrivent désormais dans la « modernité ». D’un côté, un continent en récession économique, où chacun s’accroche à ses acquis, s’interrogeant sur son identité, le plus souvent prisonnier d’une grille de lecture « ethno-centrée » dominé par l’obsession de « la menace islamiste » et où nous assistons à la montée quotidienne de l’Islamophobie (rappelant parfois certaines heures sombres du XXème siècle). De l’autre côté, des peuples dont les hommes et les femmes qui meurent chaque jour pour les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité. Pendant qu’ici des commissions parlementaires se réunissent pour « légiférer sur les tenues vestimentaires », des jeunes se sacrifient pour avoir le droit d’avoir des parlementaires.
Bien entendu, il ne s’agit pas non plus de tomber dans un optimisme béat. Le futur reste à construire. La situation est complexe. Les dimensions à prendre en compte sont nombreuses : dimension politique, sociale, confessionnelle, ethnique et enfin géopolitique. Aucune option n’est à exclure. Les incertitudes sont nombreuses. Une seule certitude : les régimes religieux nouvellement mis en place ne pourront pas ignorer la réalité. Exercer le pouvoir, c’est avant tout se confronter à la réalité. Aussi, au travers des débats qui ne manqueront pas de se tenir et des compromis qui en résulteront, nous pouvons penser que nous assistons à l’éclosion d’un nouvel ordre, d’un nouveau paradigme. Après tout, les modèles turc, indonésien et malaisien, sont là pour nous prouver qu’identité islamique, développement économique et démocratie politique ne sont pas incompatibles.
Toutes ces interrogations ont été partagées fin 2012, lors de conférences organisés par l’IRIS et intitulées "Le Printemps Arabe peut-il devenir un Printemps Islamique, et dans quel sens?" Nous en proposons un compte rendu ainsi que les enregistrements ici. Celles-ci ont rassemblé M. Anwar Ibrahim, chef de l’opposition, ancien Premier ministre malaisien, S.E.M. Pierre Lafrance, ancien Ambassadeur de France en Iran et au Pakistan, M. Beddy Ebnou, directeur de l’ASRC, M. Anas Sheik Ali, Président de l’AMSS, Denis Sieffert, directeur de la rédaction de l’hebdomadaire français Politis et Didier Billion, directeur des études de l’IRIS.
Simultanément, nous avons adressé trois questions sur la même thématique à plusieurs spécialistes représentant différentes sensibilités. Le style et le ton des réponses varient d’un auteur à l’autre. Nous vous laissons découvrir les réponses de Nicolas Dot-Pouillard (chercheur à l’Institut Français du Proche-Orient), d'Alain Chouet, (ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE), de Sébastien Boussois politologue et spécialiste des relations internationales, de Cédric Baylocq, anthropologue, post doctorant au Centre Jacques Berque à Rabat, de Clèment Steuer, docteur en science politique du CEDEJ encore de Charles Saint-Prot (Directeur de l’Observatoire d’études géopolitiques) en cliquant sur chacun des liens.
Soulignant ces réponses, sur le même sujet et dans le même esprit, le lecteur retrouvera deux textes sur la révolution tunisienne. Le premier, s’intitulant « Une révolution trahie ? Sur le soulèvement tunisien et la transition démocratique » par Leyla Dakhli (chercheure associée à la Chaire d’histoire du monde arabe contemporain au Collège de France ainsi qu'au CNRS) [1]. Le second est constitué par l’avant-propos du dernier ouvrage de Nicolas Dot-Pouillard paru aux éditions l’harmattan: « Tunisie : la révolution et ses passés ». Ces deux textes sont accompagnés d’un article de Malika Hamidi (Directrice générale de l'European Muslim Network, Bruxelles) intitulé « Les militantes du monde arabe : entre «récompense» et oubli… », nous rappelant la place des femmes dans ces mouvements.
Nous nous sommes ensuite intéressés à la «compatibilité » entre Islam et « Démocratie », sur le terrain, de façon pratique, telle qu'elle peut être évaluée au travers des réalités, des évènements, des vécus du « Printemps Arabe ». Pour ce faire nous avons traduit un texte de Nader Hashmi Assistant Professor and Director, Center for Middle East Studies rédigé en février dernier :« Islamisme et laïcité après le Printemps arabe: Les « multiples modernités » des Musulmans ». Dans ce denier, à l’instar de Shmuel Eisenstadt, l'auteur pense que les voies d'accession à la démocratie sont multiples et que ce qui vaut pour l’occident n’est pas nécessairement valable pour d’autres cultures.Ensuite nous avons réalisé le résumé d'un d'essai du politologue, « transitologue » Alfred C.Stepan publié en avril 2012 dans « Journal of democracy » et intitulé « Tunisia’s Transition and the Twin Tolerations » . A partir de l’exemple Tunisien, Alfred Stepan, nous montre en quoi et pourquoi nous pouvons considérer que le processus de transition démocratique en œuvre en Tunisie à la suite du mouvement du « printemps arabe » répond aux critères du modèle nommé de la « double tolérance » (« twin tolerations » ) et ce faisant, comment ce pays semblent ouvrir de nouvelles voies d’accession à la « démocratie ».
Nous présentons ensuite la recension d’un ouvrage traitant du même sujet, portant sur la situation au Maroc : « Le Cheikh et le Calife, Sociologie religieuse de l’islam politique au Maroc » de Youssef Belal. Le lecteur pourra aussi relire la recension de l’ouvrage collectif « L'Europe et l'Islam : la liberté ou la peur ? », dirigé par Thierry Fabre l’organisateur des « Rencontres d’Averroès » traitant du printemps arabe.
Par ailleurs, nous avons choisi de republier un très ancien article d’Ahmed Moatassime (chercheur au CNRS et professeur à l’Institut d’Études du Développement Économique et Social à Paris.) : « Islam et développement politique » initialement publié dans la revue « Tiers Monde ». Il s’agit d’un « rappel historique et contemporain [qui] ne s'adresse pas aux spécialistes. […] qui se destine avant tout aux lecteurs non islamisants : chercheurs, enseignants, étudiants ou autres. ». Nous l’avons scindé en deux parties, qui nous semblent pouvoir être consultées indépendamment :
Enfin, en complément, il sera possible au lecteur de relire notre rencontre avec de Michaël Privot , de consulter l’article « Valeurs universelles et démocratie musulmane par Anwar Ibrahim » ou bien l'article «Syrie : un enjeu géopolitique régional » ou encore les articles suivants figurant dans la rubrique « Revue de presse » et intitulés :
Simultanément, nous avons adressé trois questions sur la même thématique à plusieurs spécialistes représentant différentes sensibilités. Le style et le ton des réponses varient d’un auteur à l’autre. Nous vous laissons découvrir les réponses de Nicolas Dot-Pouillard (chercheur à l’Institut Français du Proche-Orient), d'Alain Chouet, (ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE), de Sébastien Boussois politologue et spécialiste des relations internationales, de Cédric Baylocq, anthropologue, post doctorant au Centre Jacques Berque à Rabat, de Clèment Steuer, docteur en science politique du CEDEJ encore de Charles Saint-Prot (Directeur de l’Observatoire d’études géopolitiques) en cliquant sur chacun des liens.
Soulignant ces réponses, sur le même sujet et dans le même esprit, le lecteur retrouvera deux textes sur la révolution tunisienne. Le premier, s’intitulant « Une révolution trahie ? Sur le soulèvement tunisien et la transition démocratique » par Leyla Dakhli (chercheure associée à la Chaire d’histoire du monde arabe contemporain au Collège de France ainsi qu'au CNRS) [1]. Le second est constitué par l’avant-propos du dernier ouvrage de Nicolas Dot-Pouillard paru aux éditions l’harmattan: « Tunisie : la révolution et ses passés ». Ces deux textes sont accompagnés d’un article de Malika Hamidi (Directrice générale de l'European Muslim Network, Bruxelles) intitulé « Les militantes du monde arabe : entre «récompense» et oubli… », nous rappelant la place des femmes dans ces mouvements.
Nous nous sommes ensuite intéressés à la «compatibilité » entre Islam et « Démocratie », sur le terrain, de façon pratique, telle qu'elle peut être évaluée au travers des réalités, des évènements, des vécus du « Printemps Arabe ». Pour ce faire nous avons traduit un texte de Nader Hashmi Assistant Professor and Director, Center for Middle East Studies rédigé en février dernier :« Islamisme et laïcité après le Printemps arabe: Les « multiples modernités » des Musulmans ». Dans ce denier, à l’instar de Shmuel Eisenstadt, l'auteur pense que les voies d'accession à la démocratie sont multiples et que ce qui vaut pour l’occident n’est pas nécessairement valable pour d’autres cultures.Ensuite nous avons réalisé le résumé d'un d'essai du politologue, « transitologue » Alfred C.Stepan publié en avril 2012 dans « Journal of democracy » et intitulé « Tunisia’s Transition and the Twin Tolerations » . A partir de l’exemple Tunisien, Alfred Stepan, nous montre en quoi et pourquoi nous pouvons considérer que le processus de transition démocratique en œuvre en Tunisie à la suite du mouvement du « printemps arabe » répond aux critères du modèle nommé de la « double tolérance » (« twin tolerations » ) et ce faisant, comment ce pays semblent ouvrir de nouvelles voies d’accession à la « démocratie ».
Nous présentons ensuite la recension d’un ouvrage traitant du même sujet, portant sur la situation au Maroc : « Le Cheikh et le Calife, Sociologie religieuse de l’islam politique au Maroc » de Youssef Belal. Le lecteur pourra aussi relire la recension de l’ouvrage collectif « L'Europe et l'Islam : la liberté ou la peur ? », dirigé par Thierry Fabre l’organisateur des « Rencontres d’Averroès » traitant du printemps arabe.
Par ailleurs, nous avons choisi de republier un très ancien article d’Ahmed Moatassime (chercheur au CNRS et professeur à l’Institut d’Études du Développement Économique et Social à Paris.) : « Islam et développement politique » initialement publié dans la revue « Tiers Monde ». Il s’agit d’un « rappel historique et contemporain [qui] ne s'adresse pas aux spécialistes. […] qui se destine avant tout aux lecteurs non islamisants : chercheurs, enseignants, étudiants ou autres. ». Nous l’avons scindé en deux parties, qui nous semblent pouvoir être consultées indépendamment :
Enfin, en complément, il sera possible au lecteur de relire notre rencontre avec de Michaël Privot , de consulter l’article « Valeurs universelles et démocratie musulmane par Anwar Ibrahim » ou bien l'article «Syrie : un enjeu géopolitique régional » ou encore les articles suivants figurant dans la rubrique « Revue de presse » et intitulés :
- « Débat : L'Islam est-il un obstacle à la démocratie ? » (Un débat organisé par le New York Times...) ,
- « Islam et démocratie - documentaire "Au nom de l'Islam" » (vidéo en deux parties)
- « Egypte : Les Frères Musulmans et la Politique » (retraçant le moment de leur accession au pouvoir).