Dans le cadre d'une série de publications autour de la pratique du ramadan en France, la rédaction des Cahiers de l’islam est allée à la Rencontre de Haoues Seniguer afin de recueillir son opinion sur des questions relatives à cette pratique cultuelle.
Le lecteur intéressé pourra consulter la Rencontre, sur la même thématique, avec Omero MARONGIU-PERRIA .
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Haoues Seniguer/ Les Cahiers de l'Islam ©
Haoues Seniguer , est docteur en science politique, chercheur associé au GREMMO et enseignant de science politique à l'IEP de Lyon. Il est l’auteur de Petit précis d'islamisme : Des Hommes, des textes et des idées,L'Harmattan, 2013, 158p (voir à la fin de cet article).
Version numérique de la Rencontre
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Les Cahiers de l’islam : Comment expliquez-vous l’attachement des musulmans de France, notamment des jeunes générations, à la pratique du ramadan ?
Haoues Seniguer : Il n'y a pas d'explication monocausale ou monofactorielle. Néanmoins, au-delà de son caractère obligatoire pour celles et ceux qui en sont convaincus, cet attachement à la pratique du jeûne de mois de Ramadan, selon le calendrier hégirien, participe sans doute, chez les musulmans qui l'observent, de la volonté de perpétuer une tradition séculaire, avec le sentiment corollaire de co-appartenance à une communauté globale liée, au moins une fois tous les ans, par une foi universelle. Pour les plus jeunes, cela peut s'interpréter comme un regain de l'observance religieuse, à l'attachement aux valeurs familiales et au sens du sacrifice ou dépassement de soi, précisément par la privation de boissons et d'aliments de l'aube jusqu'au coucher du soleil.
Les Cahiers de l’islam : N’y a-t-il pas là un réinvestissement du religieux comme lieu de mémoire (J.-P Willaime) et d’affirmation d’une identité ?
Haoues Seniguer : Dans le prolongement de la première réponse, je répondrai par l'affirmative. Le ramadan est l'occasion pour de nombreux individus de réaffirmer un "je" collectif, soit le sentiment d'être portés par toute une communauté, par delà les frontières géographiques, ethniques, linguistiques, de communier avec les "ancêtres" et les "vivants" des communautés musulmanes du monde d'hier et d'aujourd'hui.
Les Cahiers de l’islam : Faut-il voir dans l’engouement que provoque le jeûne du mois du ramadan chez les musulmans de France un ‘‘défi au vivre-ensemble ou à la laïcité’’ (pour paraphraser J. Césari) ? En quoi le jeûne participe-t-il du vivre-ensemble en France ? Autrement dit, a-t-il un impact sur le plan social ?
Haoues Seniguer : Si l'on entend par "défi au vivre-ensemble ou à la laïcité", une menace ou une remise en cause de l'ordre public, je dirai, en France en tout cas, que ce sont des cas très marginaux d'individus qui souhaiteraient effectivement imposer leur pratique au reste de la collectivité. Dans un autre sens, on observe que le mois de Ramadan est également l'occasion d'échanges conviviaux ou fraternels non seulement à l'intérieur de la communauté musulmane au sens large, qu'à l'extérieur, puisque des non-musulmans sont parfois conviés à partager le repas de l'Iftar ou de rupture du jeûne. En ce sens, le lien social s'en trouve vivifié au moins conjoncturellement.
Les Cahiers de l’islam : Existe-t-il en Europe une régulation de cette pratique ?
Haoues Seniguer : Qu'entendez-vous par "régulation"? En tout état de cause, la pratique du Ramadan dans les États de droit démocratique européens est libre et les observants, en règle générale, cherchent essentiellement à s'adapter à leur environnement, moyennant des "accommodements raisonnables" avec eux-mêmes ou avec les autres!
Haoues Seniguer : Il n'y a pas d'explication monocausale ou monofactorielle. Néanmoins, au-delà de son caractère obligatoire pour celles et ceux qui en sont convaincus, cet attachement à la pratique du jeûne de mois de Ramadan, selon le calendrier hégirien, participe sans doute, chez les musulmans qui l'observent, de la volonté de perpétuer une tradition séculaire, avec le sentiment corollaire de co-appartenance à une communauté globale liée, au moins une fois tous les ans, par une foi universelle. Pour les plus jeunes, cela peut s'interpréter comme un regain de l'observance religieuse, à l'attachement aux valeurs familiales et au sens du sacrifice ou dépassement de soi, précisément par la privation de boissons et d'aliments de l'aube jusqu'au coucher du soleil.
Les Cahiers de l’islam : N’y a-t-il pas là un réinvestissement du religieux comme lieu de mémoire (J.-P Willaime) et d’affirmation d’une identité ?
Haoues Seniguer : Dans le prolongement de la première réponse, je répondrai par l'affirmative. Le ramadan est l'occasion pour de nombreux individus de réaffirmer un "je" collectif, soit le sentiment d'être portés par toute une communauté, par delà les frontières géographiques, ethniques, linguistiques, de communier avec les "ancêtres" et les "vivants" des communautés musulmanes du monde d'hier et d'aujourd'hui.
Les Cahiers de l’islam : Faut-il voir dans l’engouement que provoque le jeûne du mois du ramadan chez les musulmans de France un ‘‘défi au vivre-ensemble ou à la laïcité’’ (pour paraphraser J. Césari) ? En quoi le jeûne participe-t-il du vivre-ensemble en France ? Autrement dit, a-t-il un impact sur le plan social ?
Haoues Seniguer : Si l'on entend par "défi au vivre-ensemble ou à la laïcité", une menace ou une remise en cause de l'ordre public, je dirai, en France en tout cas, que ce sont des cas très marginaux d'individus qui souhaiteraient effectivement imposer leur pratique au reste de la collectivité. Dans un autre sens, on observe que le mois de Ramadan est également l'occasion d'échanges conviviaux ou fraternels non seulement à l'intérieur de la communauté musulmane au sens large, qu'à l'extérieur, puisque des non-musulmans sont parfois conviés à partager le repas de l'Iftar ou de rupture du jeûne. En ce sens, le lien social s'en trouve vivifié au moins conjoncturellement.
Les Cahiers de l’islam : Existe-t-il en Europe une régulation de cette pratique ?
Haoues Seniguer : Qu'entendez-vous par "régulation"? En tout état de cause, la pratique du Ramadan dans les États de droit démocratique européens est libre et les observants, en règle générale, cherchent essentiellement à s'adapter à leur environnement, moyennant des "accommodements raisonnables" avec eux-mêmes ou avec les autres!
Haoues Seniguer sur son dernier ouvrage :