Le mois de Ramadan en Palestine est comme dans tous les autres pays, un jeûne du lever au coucher du soleil. C'est aussi un mois de fête, avec repas de famille après le coucher du soleil, et d'échanges sociaux. Cependant ce mois est de plus en plus difficile pour une population dont les conditions de vie se détériorent jours après jours à la suite des mesures prises par les autorités israéliennes.
Julien Salingue chercheur spécialisé sur la Palestine s’est posé la question, au sein d’un ouvrage collectif qu’il a dirigé, de savoir si au-delà de « la fiction de l’autonomie palestinienne » l’état d’Israël de par ses pratiques juridiques, judiciaires, discriminatoires et oppressives ne pouvait pas être qualifié d’état d’apartheid au sens du droit international.
Cet article est publié avec l'autorisation de l'auteur et vous pourrez le retrouver sur son blog.
Le lecteur intéressé retrouvera en fin d’article la vidéo d’une conférence donnée par l’auteur de l’article sur ce thème.
Julien Salingue chercheur spécialisé sur la Palestine s’est posé la question, au sein d’un ouvrage collectif qu’il a dirigé, de savoir si au-delà de « la fiction de l’autonomie palestinienne » l’état d’Israël de par ses pratiques juridiques, judiciaires, discriminatoires et oppressives ne pouvait pas être qualifié d’état d’apartheid au sens du droit international.
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« La justice est sujette à dispute. Le force est très reconnaissable et sans dispute. Aussi on n'a pu donner la force à la justice, parce que la force a contredit la justice et a dit qu'elle était injuste, et a dit que c'était elle qui était juste. Et ainsi, ne pouvant faire que ce qui est juste fût fort, on a fait que ce qui est fort fût juste »[1]
À l’instar des autres contributions de l’ouvrage, l’objet de ce texte n’est pas d’assimiler, a priori, la politique israélienne à l’égard des Palestiniens à l’Apartheid tel qu’il était organisé en Afrique du Sud. Il s’agit plutôt d’interroger les pratiques de l’État d’Israël en les confrontant à une catégorie juridique précisément définie dans le droit international (« crime d’apartheid »), afin de les éclairer sous un jour nouveau. Je me concentrerai ici sur la situation des habitants des territoires occupés, en m’intéressant à une dimension souvent négligée de l’occupation israélienne, à savoir le régime juridique d’exception permanent imposé aux Palestiniens.
Si les effets de l’occupation israélienne sur la vie quotidienne des habitants de Gaza et de Cisjordanie ont été largement documentés [2], et si le système des tribunaux militaires israéliens a lui aussi été étudié [3], un aspect pourtant singulier de l’administration de la Cisjordanie et, jusqu’en 2005, de la Bande de Gaza, a été trop souvent ignoré : la colonisation des territoires palestiniens et la présence toujours plus importante de citoyens israéliens dans lesdits territoires a conduit, de facto, à la mise en place de mécanismes juridiques et judiciaires institutionnalisant un traitement différencié des auteurs de crimes et délits en fonction de leur origine nationale.
C’est sur ce traitement différencié que j’entends revenir ici. Il s’agira dans un premier temps d’opérer un « retour aux sources », en étudiant les conditions et les causes de l’émergence de ce double système juridique. Dans un deuxième temps, je tenterai de décrire plus précisément ce système, en interrogeant notamment son caractère discriminatoire. Enfin, je conclurai cette contribution en questionnant la pertinence de l’approche de la situation des Palestiniens dans les territoires occupés par la mise à l’épreuve du concept d’apartheid, en expliquant pourquoi une telle approche contribue, ou non, à enrichir l’analyse.
Si les effets de l’occupation israélienne sur la vie quotidienne des habitants de Gaza et de Cisjordanie ont été largement documentés [2], et si le système des tribunaux militaires israéliens a lui aussi été étudié [3], un aspect pourtant singulier de l’administration de la Cisjordanie et, jusqu’en 2005, de la Bande de Gaza, a été trop souvent ignoré : la colonisation des territoires palestiniens et la présence toujours plus importante de citoyens israéliens dans lesdits territoires a conduit, de facto, à la mise en place de mécanismes juridiques et judiciaires institutionnalisant un traitement différencié des auteurs de crimes et délits en fonction de leur origine nationale.
C’est sur ce traitement différencié que j’entends revenir ici. Il s’agira dans un premier temps d’opérer un « retour aux sources », en étudiant les conditions et les causes de l’émergence de ce double système juridique. Dans un deuxième temps, je tenterai de décrire plus précisément ce système, en interrogeant notamment son caractère discriminatoire. Enfin, je conclurai cette contribution en questionnant la pertinence de l’approche de la situation des Palestiniens dans les territoires occupés par la mise à l’épreuve du concept d’apartheid, en expliquant pourquoi une telle approche contribue, ou non, à enrichir l’analyse.
I) L’occupation : de l’oppression à la discrimination
Au terme de la guerre de juin 1967, qui se solde par la défaite historique des armées arabes face à l’État d’Israël, ce dernier occupe le Sinaï, le Golan, Jérusalem, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Dans ces deux dernières régions, les autorités israéliennes établissent une administration militaire, en charge de la gestion de territoires dans lesquelles ne résident à l’époque aucun citoyen israélien. Ce sont en revanche plus d’un million de Palestiniens qui demeurent dans ces zones nouvellement conquises, signe que l’exode massif de 1947-1949 ne s’est pas reproduit. En effet, alors que 800.000 Palestiniens s’étaient exilés durant cette période, soit 80% de la population arabe résidant au sein du nouvel État d’Israël, ce sont « seulement »[4] 250.000 personnes qui fuient Gaza et la Cisjordanie en 1967, soit 20% des habitants des deux zones. Ces chiffres ont leur importance puisqu’ils sont l’un des facteurs expliquant pourquoi Israël n’annexe pas formellement Gaza et la Cisjordanie : une telle annexion induirait en effet l’intégration d’un million de Palestiniens supplémentaires au sein de l’État d’Israël, ce qui reviendrait, quand bien même les habitants des territoires conquis en 1967 auraient un statut de sous-citoyens, à remettre en question le caractère juif de l’État [5].
Un organe spécifique est donc établi, qui se nomme aujourd’hui « Administration civile » [6] (bien qu’il soit géré par des militaires), responsable devant les institutions israéliennes [7], chargé d’administrer les territoires occupés au moyen d’ordres militaires. Depuis 1967, ce sont ainsi pas moins de 2.500 ordres militaires qui ont été émis en Cisjordanie et à Gaza. S’ils ne sont plus en vigueur à Gaza depuis le « retrait unilatéral » de l’été 2005, plusieurs centaines d’entre eux ont toujours force de loi en Cisjordanie. Les ordres militaires gouvernent l’ensemble des aspects de la vie quotidienne des Palestiniens sous occupation, et concernent les domaines les plus essentiels comme les plus inattendus. Après 1967, de l’accaparement des ressources en eau [8] aux confiscations de terres [9] en passant par la prise de contrôle des banques [10], les ordres militaires permettent ainsi aux autorités israéliennes d’asseoir leur emprise sur la Cisjordanie et Gaza. La création de toute nouvelle entreprise est alors soumise à l’approbation de la puissance occupante [11], tout comme l’enregistrement de toute nouvelle marque [12] ou la plantation d’arbres fruitiers [13]. Les ordres militaires permettent aussi de contrôler strictement la « vie politique » palestinienne, avec entre autres l’ordre 101, qui interdit tout rassemblement de plus de dix personnes [14], la mise en place d’une censure de la presse palestinienne [15] ou l’ordre 1079, qui établit une liste de plus de 1.000 textes interdits de publication dans les territoires occupés, parmi lesquels… les résolutions des Nations Unies concernant la Palestine. Certains ordres sont assez inattendus et témoignent du degré de contrôle des autorités militaires sur la vie quotidienne des Palestiniens, comme l’ordre 818, qui réglemente le type et la quantité de plantes décoratives dans les propriétés palestiniennes, ou l’ordre 96, qui interdit le transport de biens ou de marchandises à dos d’âne. Certains de ces ordres ont, depuis, été abrogés, mais ils indiquent le type de régime qui se met en place à partir de l’occupation de 1967.
Pour faire respecter ces réglementations, un système judiciaire est mis en place, systématisé dans l’ordre 378 (1970) [16]. Le commandement militaire peut établir des tribunaux militaires, avec des procureurs et des juges qu’il nomme lui-même, et dont le fonctionnement diffère très nettement des tribunaux civils israéliens. Ainsi, ces tribunaux peuvent se réunir à huis clos, et se réservent le droit de ne pas produire publiquement les témoignages et/ou les preuves incriminant les accusés. Les procureurs instruisant à charge, les accusés doivent, à l’inverse, apporter la preuve de leur innocence. Sans formuler aucune accusation, les tribunaux peuvent demander une détention de l’accusé, d’une durée de six mois, et renouvelable à l’infini [17]. Enfin, si le commandement militaire est en désaccord avec le verdict d’un procès, il peut demander son annulation et exiger un nouveau procès avec un autre juge. Il se réserve en outre la possibilité de prononcer lui-même, dans certaines circonstances, la sentence [18].
Un tel système judiciaire n’est pas une exception dans l’histoire des occupations territoriales et des dominations coloniales. De nombreux autres États ont établi des législations similaires, à l’instar de la Grande-Bretagne en Irlande du Nord : le Special Powers Act (1922) a ainsi permis au gouvernement britannique de donner aux autorités locales les pouvoirs, entre autres, de procéder à des internements sans procès, à des perquisitions sans mandat, d’interdire certains médias, de suspendre manifestations et rassemblements, de réunir des tribunaux sans jury ou de suspendre le droit des accusés à bénéficier d’un avocat. Mais le cas qui nous concerne a ceci de spécifique qu’il s’agit d’un territoire qui n’est pas administrativement intégré aux « frontières » [19] de l’État dominant, mais au sein duquel des citoyens dudit État vont progressivement venir s’installer. En effet, dès 1968, les premières colonies israéliennes sont établies en Cisjordanie, notamment dans la Vallée du Jourdain et à Hébron. Ce mouvement de colonisation connaîtra des rythmes divers, avec une première phase assez lente et une accélération notable à partir de l’élection, en 1977, du gouvernement Likoud dirigé par Menahem Begin, mais il pose, dès ses origines, une question essentielle : quel sera le régime juridique appliqué aux colons ?
En effet, le système que nous venons de décrire, s’il peut être considéré comme oppressif, n’est pas, à proprement parler, discriminatoire. Il s’applique en effet à l’ensemble des Palestiniens résidant en Cisjordanie et à Gaza qui, dans la mesure où ils ne bénéficient pas de la citoyenneté israélienne, ne sont pas victimes, au sens strict, d’une politique discriminatoire. C’est la colonisation qui va changer, qualitativement, la donne, en ajoutant à l’oppression la discrimination, et en systématisant cette dernière. Les colons sont en effet des citoyens israéliens qui s’installent dans des territoires qui ne sont pas considérés comme étant partie intégrante de l’État d’Israël et qui sont, en conséquence, soumis à un régime juridique et judiciaire spécifique. Si elles souhaitent que ces populations échappent au régime militaire, les autorités israéliennes doivent mettre en place une législation parallèle, qui ce concerne que les colons et qui porte donc en elle non seulement le principe de la discrimination mais, qui plus est, son institutionnalisation.
Un organe spécifique est donc établi, qui se nomme aujourd’hui « Administration civile » [6] (bien qu’il soit géré par des militaires), responsable devant les institutions israéliennes [7], chargé d’administrer les territoires occupés au moyen d’ordres militaires. Depuis 1967, ce sont ainsi pas moins de 2.500 ordres militaires qui ont été émis en Cisjordanie et à Gaza. S’ils ne sont plus en vigueur à Gaza depuis le « retrait unilatéral » de l’été 2005, plusieurs centaines d’entre eux ont toujours force de loi en Cisjordanie. Les ordres militaires gouvernent l’ensemble des aspects de la vie quotidienne des Palestiniens sous occupation, et concernent les domaines les plus essentiels comme les plus inattendus. Après 1967, de l’accaparement des ressources en eau [8] aux confiscations de terres [9] en passant par la prise de contrôle des banques [10], les ordres militaires permettent ainsi aux autorités israéliennes d’asseoir leur emprise sur la Cisjordanie et Gaza. La création de toute nouvelle entreprise est alors soumise à l’approbation de la puissance occupante [11], tout comme l’enregistrement de toute nouvelle marque [12] ou la plantation d’arbres fruitiers [13]. Les ordres militaires permettent aussi de contrôler strictement la « vie politique » palestinienne, avec entre autres l’ordre 101, qui interdit tout rassemblement de plus de dix personnes [14], la mise en place d’une censure de la presse palestinienne [15] ou l’ordre 1079, qui établit une liste de plus de 1.000 textes interdits de publication dans les territoires occupés, parmi lesquels… les résolutions des Nations Unies concernant la Palestine. Certains ordres sont assez inattendus et témoignent du degré de contrôle des autorités militaires sur la vie quotidienne des Palestiniens, comme l’ordre 818, qui réglemente le type et la quantité de plantes décoratives dans les propriétés palestiniennes, ou l’ordre 96, qui interdit le transport de biens ou de marchandises à dos d’âne. Certains de ces ordres ont, depuis, été abrogés, mais ils indiquent le type de régime qui se met en place à partir de l’occupation de 1967.
Pour faire respecter ces réglementations, un système judiciaire est mis en place, systématisé dans l’ordre 378 (1970) [16]. Le commandement militaire peut établir des tribunaux militaires, avec des procureurs et des juges qu’il nomme lui-même, et dont le fonctionnement diffère très nettement des tribunaux civils israéliens. Ainsi, ces tribunaux peuvent se réunir à huis clos, et se réservent le droit de ne pas produire publiquement les témoignages et/ou les preuves incriminant les accusés. Les procureurs instruisant à charge, les accusés doivent, à l’inverse, apporter la preuve de leur innocence. Sans formuler aucune accusation, les tribunaux peuvent demander une détention de l’accusé, d’une durée de six mois, et renouvelable à l’infini [17]. Enfin, si le commandement militaire est en désaccord avec le verdict d’un procès, il peut demander son annulation et exiger un nouveau procès avec un autre juge. Il se réserve en outre la possibilité de prononcer lui-même, dans certaines circonstances, la sentence [18].
Un tel système judiciaire n’est pas une exception dans l’histoire des occupations territoriales et des dominations coloniales. De nombreux autres États ont établi des législations similaires, à l’instar de la Grande-Bretagne en Irlande du Nord : le Special Powers Act (1922) a ainsi permis au gouvernement britannique de donner aux autorités locales les pouvoirs, entre autres, de procéder à des internements sans procès, à des perquisitions sans mandat, d’interdire certains médias, de suspendre manifestations et rassemblements, de réunir des tribunaux sans jury ou de suspendre le droit des accusés à bénéficier d’un avocat. Mais le cas qui nous concerne a ceci de spécifique qu’il s’agit d’un territoire qui n’est pas administrativement intégré aux « frontières » [19] de l’État dominant, mais au sein duquel des citoyens dudit État vont progressivement venir s’installer. En effet, dès 1968, les premières colonies israéliennes sont établies en Cisjordanie, notamment dans la Vallée du Jourdain et à Hébron. Ce mouvement de colonisation connaîtra des rythmes divers, avec une première phase assez lente et une accélération notable à partir de l’élection, en 1977, du gouvernement Likoud dirigé par Menahem Begin, mais il pose, dès ses origines, une question essentielle : quel sera le régime juridique appliqué aux colons ?
En effet, le système que nous venons de décrire, s’il peut être considéré comme oppressif, n’est pas, à proprement parler, discriminatoire. Il s’applique en effet à l’ensemble des Palestiniens résidant en Cisjordanie et à Gaza qui, dans la mesure où ils ne bénéficient pas de la citoyenneté israélienne, ne sont pas victimes, au sens strict, d’une politique discriminatoire. C’est la colonisation qui va changer, qualitativement, la donne, en ajoutant à l’oppression la discrimination, et en systématisant cette dernière. Les colons sont en effet des citoyens israéliens qui s’installent dans des territoires qui ne sont pas considérés comme étant partie intégrante de l’État d’Israël et qui sont, en conséquence, soumis à un régime juridique et judiciaire spécifique. Si elles souhaitent que ces populations échappent au régime militaire, les autorités israéliennes doivent mettre en place une législation parallèle, qui ce concerne que les colons et qui porte donc en elle non seulement le principe de la discrimination mais, qui plus est, son institutionnalisation.
II) L’institutionnalisation des discriminations
Le développement des colonies transforme progressivement les « territoires palestiniens » en zones dans lesquelles coexistent, à défaut de cohabiter, des citoyens israéliens et des Palestiniens. Or ce sont les « zones » géographiques qui sont sous administration israélienne, d’après les textes constituant le gouvernement militaire, et non les Palestiniens qui y résident. La logique juridique voudrait donc que les colons, au fur et à mesure qu’ils viennent s’installer en Cisjordanie et à Gaza, soient eux aussi soumis aux ordres militaires et, en cas d’infraction, traduits devant les tribunaux militaires. Pour éviter une telle configuration, qui ne manquerait pas de susciter des conflits entre colons et administration, et qui découragerait les candidats à « l’implantation » dans les territoires palestiniens, les autorités israéliennes vont établir un statut d’exception pour les colons, qui va reposer sur deux principaux outils juridiques : une extension de la législation israélienne, sur une base territoriale, aux colonies juives des territoires occupés ; l’application de la loi israélienne, in personam, aux colons.
Le premier dispositif sur lequel se fonde la dualité du système juridique en vigueur dans les territoires occupés est en effet l’attribution d’un statut spécial, sur une base géographique, aux colonies. Ce sont notamment les ordres 783 et 892 (1979 et 1981) qui encadrent ce statut particulier, en offrant au commandement militaire la possibilité de permettre aux autorités des colonies (municipalités et conseils régionaux) d’appliquer plusieurs dizaines de lois israéliennes, et non les ordres militaires. Les lois en vigueur en Israël ne s’appliquent donc pas directement dans les colonies, mais l’administration militaire des territoires occupés joue un rôle d’interface entre législation israélienne et territoires des colonies. De plus, des tribunaux locaux, ainsi que des tribunaux rabbiniques, sont établis au sein des colonies, qui sont en charge de certains litiges opposant les colons entre eux. Si, comme le fait remarquer Amnon Rubinstein, de tels mécanismes contribuent à brouiller les « frontières » entre Israël et les territoires occupés [20] , force est de constater qu’ils créent en outre des enclaves territoriales extra-légales au sein desdits territoires, qui ne sont pas sujettes aux ordres et aux tribunaux militaires. Ces enclaves bénéficient, qui plus est, d’un certain nombre de services dont les Palestiniens sont exclus, fournis notamment par les Ministères de l’Éducation, de la Santé, de l’Environnement ou de l’Agriculture.
Le second dispositif qui encadre la dualité juridique entre colons et Palestiniens est l’attribution d’un statut de citoyen « extra-territorial » aux résidents des colonies. La seule base territoriale ne permet pas, en effet, de contourner les ordres et les tribunaux militaires, dans la mesure où les colons pourraient se rendre coupables d’infractions à l’extérieur des colonies et des zones qui y sont annexées. C’est pourquoi de nombreuses lois votées à la Knesset mentionnent explicitement le fait qu’elles s’appliquent non seulement en Israël mais qu’elles concernent aussi les Israéliens résidant dans les territoires occupés. Dans le domaine pénal, la plus significative d’entre elles est une loi adoptée en 1977 [21] , « qui autorise les tribunaux pénaux israéliens à juger les Israéliens suspectés d’avoir commis des infractions pénales en Cisjordanie [22] sur le base du code pénal et des procédures pénales de l’État d’Israël » [23] . Le texte explique ainsi que « le tribunal en Israël aura l’autorité pour juger, au regard de la loi en vigueur en Israël, (…) un Israélien pour son acte ou manquement s’il se produit dans le territoire du Conseil Palestinien [l’Autorité Palestinienne]. Cette régulation ne s’applique pas à une personne qui, au moment de l’acte ou du manquement, était un résident de la région [la Cisjordanie] ou un résident des territoires du Conseil Palestinien, et qui n’est pas israélien » [24] . La législation permet non seulement aux colons israéliens d’être jugés par les tribunaux réguliers de l’État d’Israël, mais elle exclut de plus de facto les non-Israéliens, en l’occurrence les Palestiniens.
Depuis les Accords d’Oslo, la juridiction territoriale des tribunaux militaires israéliens se réduit, en théorie, aux zones B et aux zones C [25] , et donc aux crimes qui y sont commis et aux individus qui y résident. En effet, les zones A étant sous le contrôle de l’AP, c’est elle qui est, en théorie, chargée de juger les infractions qui y sont commises. Mais l’ordre 1651 (2009) précise des exceptions à cette limitation de la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel à l’intérieur de la zone A, [si cet acte] vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région [la Cisjordanie] » [26]. De même, un Palestinien accusé d’avoir commis, ou participé à la commission d’un crime en Israël, peut tomber sous la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel hors de la région [la Cisjordanie] qui constituerait un crime s’il était commis dans la région et si l’acte vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région ou l’ordre public » [27]. Les Accords d’Oslo et les « transferts de compétences » à l’AP n’ont donc pas bouleversé la structure qui s’est mise en place après 1967, puisque les autorités militaires israéliennes se réservent le droit d’arrêter des personnes vivant dans les zones A et de les juger même si l’acte répréhensible a été commis dans lesdites zones.
Il existe donc, aujourd’hui encore, un double statut pénal, à l’intérieur même de la Cisjordanie, correspondant à une séparation, sur des critères nationaux, entre deux populations résidant pourtant dans la même entité territoriale. Cette séparation se double d’inégalités de traitement, puisque comme le rappelle Amnesty International dans un rapport daté de 2006, la législation militaire est « moins protectrice » que la législation israélienne « normale » [28]. C’est ainsi qu’un Palestinien arrêté en Cisjordanie et suspecté d’homicide involontaire pourra être retenu huit jours avant d’être traduit devant un juge militaire, maintenu en détention « provisoire » pendant une durée indéfinie [29] et condamné à une peine pouvant aller jusqu’à la prison à perpétuité. Un colon suspecté du même crime sur le même territoire devra, en vertu de la loi israélienne, être traduit devant un juge (civil) au maximum 24 heures après son arrestation, et ne pourra pas être condamné à une peine excédant 20 ans de prison. Le double standard juridique est ici manifeste, qui confirme qu’à la séparation s’ajoute la discrimination. Les statistiques de l’activité des tribunaux militaires israéliens sont à cet égard éloquents : en 2010, ce sont pas moins de 9.542 Palestiniens qui ont été déférés devant la « justice militaire » israélienne, avec un taux de condamnation de 99.74% [30].
Le premier dispositif sur lequel se fonde la dualité du système juridique en vigueur dans les territoires occupés est en effet l’attribution d’un statut spécial, sur une base géographique, aux colonies. Ce sont notamment les ordres 783 et 892 (1979 et 1981) qui encadrent ce statut particulier, en offrant au commandement militaire la possibilité de permettre aux autorités des colonies (municipalités et conseils régionaux) d’appliquer plusieurs dizaines de lois israéliennes, et non les ordres militaires. Les lois en vigueur en Israël ne s’appliquent donc pas directement dans les colonies, mais l’administration militaire des territoires occupés joue un rôle d’interface entre législation israélienne et territoires des colonies. De plus, des tribunaux locaux, ainsi que des tribunaux rabbiniques, sont établis au sein des colonies, qui sont en charge de certains litiges opposant les colons entre eux. Si, comme le fait remarquer Amnon Rubinstein, de tels mécanismes contribuent à brouiller les « frontières » entre Israël et les territoires occupés [20] , force est de constater qu’ils créent en outre des enclaves territoriales extra-légales au sein desdits territoires, qui ne sont pas sujettes aux ordres et aux tribunaux militaires. Ces enclaves bénéficient, qui plus est, d’un certain nombre de services dont les Palestiniens sont exclus, fournis notamment par les Ministères de l’Éducation, de la Santé, de l’Environnement ou de l’Agriculture.
Le second dispositif qui encadre la dualité juridique entre colons et Palestiniens est l’attribution d’un statut de citoyen « extra-territorial » aux résidents des colonies. La seule base territoriale ne permet pas, en effet, de contourner les ordres et les tribunaux militaires, dans la mesure où les colons pourraient se rendre coupables d’infractions à l’extérieur des colonies et des zones qui y sont annexées. C’est pourquoi de nombreuses lois votées à la Knesset mentionnent explicitement le fait qu’elles s’appliquent non seulement en Israël mais qu’elles concernent aussi les Israéliens résidant dans les territoires occupés. Dans le domaine pénal, la plus significative d’entre elles est une loi adoptée en 1977 [21] , « qui autorise les tribunaux pénaux israéliens à juger les Israéliens suspectés d’avoir commis des infractions pénales en Cisjordanie [22] sur le base du code pénal et des procédures pénales de l’État d’Israël » [23] . Le texte explique ainsi que « le tribunal en Israël aura l’autorité pour juger, au regard de la loi en vigueur en Israël, (…) un Israélien pour son acte ou manquement s’il se produit dans le territoire du Conseil Palestinien [l’Autorité Palestinienne]. Cette régulation ne s’applique pas à une personne qui, au moment de l’acte ou du manquement, était un résident de la région [la Cisjordanie] ou un résident des territoires du Conseil Palestinien, et qui n’est pas israélien » [24] . La législation permet non seulement aux colons israéliens d’être jugés par les tribunaux réguliers de l’État d’Israël, mais elle exclut de plus de facto les non-Israéliens, en l’occurrence les Palestiniens.
Depuis les Accords d’Oslo, la juridiction territoriale des tribunaux militaires israéliens se réduit, en théorie, aux zones B et aux zones C [25] , et donc aux crimes qui y sont commis et aux individus qui y résident. En effet, les zones A étant sous le contrôle de l’AP, c’est elle qui est, en théorie, chargée de juger les infractions qui y sont commises. Mais l’ordre 1651 (2009) précise des exceptions à cette limitation de la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel à l’intérieur de la zone A, [si cet acte] vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région [la Cisjordanie] » [26]. De même, un Palestinien accusé d’avoir commis, ou participé à la commission d’un crime en Israël, peut tomber sous la juridiction des tribunaux militaires : « Le tribunal militaire est autorisé à juger (…) une personne qui a commis un acte criminel hors de la région [la Cisjordanie] qui constituerait un crime s’il était commis dans la région et si l’acte vise ou contribue à nuire à la sécurité de la région ou l’ordre public » [27]. Les Accords d’Oslo et les « transferts de compétences » à l’AP n’ont donc pas bouleversé la structure qui s’est mise en place après 1967, puisque les autorités militaires israéliennes se réservent le droit d’arrêter des personnes vivant dans les zones A et de les juger même si l’acte répréhensible a été commis dans lesdites zones.
Il existe donc, aujourd’hui encore, un double statut pénal, à l’intérieur même de la Cisjordanie, correspondant à une séparation, sur des critères nationaux, entre deux populations résidant pourtant dans la même entité territoriale. Cette séparation se double d’inégalités de traitement, puisque comme le rappelle Amnesty International dans un rapport daté de 2006, la législation militaire est « moins protectrice » que la législation israélienne « normale » [28]. C’est ainsi qu’un Palestinien arrêté en Cisjordanie et suspecté d’homicide involontaire pourra être retenu huit jours avant d’être traduit devant un juge militaire, maintenu en détention « provisoire » pendant une durée indéfinie [29] et condamné à une peine pouvant aller jusqu’à la prison à perpétuité. Un colon suspecté du même crime sur le même territoire devra, en vertu de la loi israélienne, être traduit devant un juge (civil) au maximum 24 heures après son arrestation, et ne pourra pas être condamné à une peine excédant 20 ans de prison. Le double standard juridique est ici manifeste, qui confirme qu’à la séparation s’ajoute la discrimination. Les statistiques de l’activité des tribunaux militaires israéliens sont à cet égard éloquents : en 2010, ce sont pas moins de 9.542 Palestiniens qui ont été déférés devant la « justice militaire » israélienne, avec un taux de condamnation de 99.74% [30].
III) De l’intérêt du recours au paradigme de l’apartheid
La confrontation de la politique israélienne en Cisjordanie avec les traits fondamentaux de l’apartheid, et notamment le caractère institutionnalisé des discriminations et de l’oppression [31] permet donc d’aller au-delà de la description et de l’analyse de l’occupation comme étant intrinsèquement « violente » ou « arbitraire ». La dualité juridique à l’œuvre en Cisjordanie, qui repose sur le principe de la séparation entre résidents palestiniens et israéliens, témoigne en effet d’une institutionnalisation des discriminations dans un territoire qui demeure sous occupation israélienne. En fonction de leur origine nationale, les habitants de Cisjordanie soupçonnés d’avoir commis des infractions ne sont pas sujets aux mêmes lois et aux mêmes tribunaux [32], quand bien même ceux-ci sont sous la responsabilité du même État, à savoir Israël. La séparation ainsi opérée est un indice du caractère structurel des discriminations au sein des territoires occupés, assumées et légalisées par les autorités israéliennes.
En dernière analyse, cette dualité n’est que la projection juridique et judiciaire des contradictions inhérentes au sionisme politique et au projet d’établissement d’un « État des Juifs » dans une région très majoritairement peuplée de non-Juifs [33]. La logique d’inclusion territoriale et d’exclusion démographique porte en effet en elle, à partir du moment où l’ensemble des résidents indigènes n’ont pas quitté la Palestine, la constitution de catégories de citoyens de seconde classe [34] et de sujets sans citoyenneté. Il en résulte en effet une situation apparemment paradoxale : force est en effet de constater que les Palestiniens de Cisjordanie sont eux aussi, à bien des égards, des sous-citoyens de l’État d’Israël. Certains auteurs peu suspects d’antisionisme vont ainsi jusqu’à souligner que ce qui constitue, selon eux, l’une des principales différences de traitement entre les Palestiniens et les colons, est le fait que ces derniers aient le droit, en vertu de la loi électorale de 1968, de voter aux élections israéliennes : « nous devons relever l’extension, sur une base personnelle, de la loi électorale israélienne, qui affirme que les Israéliens qui résident dans les territoires placés sous la responsabilité des Forces de Défense Israéliennes (FDI) pourront voter dans leur lieu de résidence. (…) [Cette loi] permet aux colons israéliens des territoires occupés de participer au choix du gouvernement qui administre ces territoires en tant que puissance occupante, alors que les résidents palestiniens des mêmes territoires, qui sont sujets aux actions du même gouvernement, ne prennent pas part à ce choix » [35].
Les Palestiniens des territoires occupés demeurent en effet, à plus d’un titre, et ce malgré la fiction de « l’autonomie palestinienne », des sujets de l’État d’Israël. Il est ainsi significatif de noter que les permis de circulation à l’intérieur des territoires occupés demeurent, aux côtés des autorisations d’entrée en Israël, sous la seule responsabilité de l’administration israélienne. À la fin de l’année 2011, ce sont ainsi pas moins de 101 permis différents qui organisaient les déplacements des Palestiniens, en fonction de leur lieu de résidence, de leur âge, de leur profession, de leur sexe, de leur situation maritale, etc [36]... Un exemple qui illustre, à l’instar des tribunaux militaires, à quel point la vie quotidienne des Palestiniens demeure rythmée et organisée par des décisions israéliennes, quand bien même l’AP a hérité, depuis les Accords d’Oslo, de nombreuses « compétences » [37]. L’occupation israélienne ne se résume pas à une situation d’oppression, elle est également productrice de normes juridiques discriminatoires dans la mesure où elle s’applique différemment selon l’origine nationale des habitants des territoires occupés. L’interrogation du paradigme d’apartheid permet ainsi d’établir que l’occupation militaire et les discriminations institutionnalisées ne se confondent pas, quand bien même elles peuvent être considérées comme les deux faces d’une même politique. L’inscription dans la durée de l’occupation, doublée de la politique d’implantation de colons dans les territoires occupés, ont conduit au développement légalisé des discriminations et abouti à une situation complexe mais familière : un seul pouvoir réel, deux populations imbriquées, une unification territoriale de facto, mais une législation différenciée selon des critères nationaux, et des enclaves territoriales soumises à des régimes politiques et juridiques distincts.
En dernière analyse, cette dualité n’est que la projection juridique et judiciaire des contradictions inhérentes au sionisme politique et au projet d’établissement d’un « État des Juifs » dans une région très majoritairement peuplée de non-Juifs [33]. La logique d’inclusion territoriale et d’exclusion démographique porte en effet en elle, à partir du moment où l’ensemble des résidents indigènes n’ont pas quitté la Palestine, la constitution de catégories de citoyens de seconde classe [34] et de sujets sans citoyenneté. Il en résulte en effet une situation apparemment paradoxale : force est en effet de constater que les Palestiniens de Cisjordanie sont eux aussi, à bien des égards, des sous-citoyens de l’État d’Israël. Certains auteurs peu suspects d’antisionisme vont ainsi jusqu’à souligner que ce qui constitue, selon eux, l’une des principales différences de traitement entre les Palestiniens et les colons, est le fait que ces derniers aient le droit, en vertu de la loi électorale de 1968, de voter aux élections israéliennes : « nous devons relever l’extension, sur une base personnelle, de la loi électorale israélienne, qui affirme que les Israéliens qui résident dans les territoires placés sous la responsabilité des Forces de Défense Israéliennes (FDI) pourront voter dans leur lieu de résidence. (…) [Cette loi] permet aux colons israéliens des territoires occupés de participer au choix du gouvernement qui administre ces territoires en tant que puissance occupante, alors que les résidents palestiniens des mêmes territoires, qui sont sujets aux actions du même gouvernement, ne prennent pas part à ce choix » [35].
Les Palestiniens des territoires occupés demeurent en effet, à plus d’un titre, et ce malgré la fiction de « l’autonomie palestinienne », des sujets de l’État d’Israël. Il est ainsi significatif de noter que les permis de circulation à l’intérieur des territoires occupés demeurent, aux côtés des autorisations d’entrée en Israël, sous la seule responsabilité de l’administration israélienne. À la fin de l’année 2011, ce sont ainsi pas moins de 101 permis différents qui organisaient les déplacements des Palestiniens, en fonction de leur lieu de résidence, de leur âge, de leur profession, de leur sexe, de leur situation maritale, etc [36]... Un exemple qui illustre, à l’instar des tribunaux militaires, à quel point la vie quotidienne des Palestiniens demeure rythmée et organisée par des décisions israéliennes, quand bien même l’AP a hérité, depuis les Accords d’Oslo, de nombreuses « compétences » [37]. L’occupation israélienne ne se résume pas à une situation d’oppression, elle est également productrice de normes juridiques discriminatoires dans la mesure où elle s’applique différemment selon l’origine nationale des habitants des territoires occupés. L’interrogation du paradigme d’apartheid permet ainsi d’établir que l’occupation militaire et les discriminations institutionnalisées ne se confondent pas, quand bien même elles peuvent être considérées comme les deux faces d’une même politique. L’inscription dans la durée de l’occupation, doublée de la politique d’implantation de colons dans les territoires occupés, ont conduit au développement légalisé des discriminations et abouti à une situation complexe mais familière : un seul pouvoir réel, deux populations imbriquées, une unification territoriale de facto, mais une législation différenciée selon des critères nationaux, et des enclaves territoriales soumises à des régimes politiques et juridiques distincts.
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[1] Pascal, Pensées (1670).
[2] Voir notamment l’excellente synthèse de Neve Gordon, Israel’s Occupation, Berkeley, University of California Press, 2008, et l’ouvrage collectif dirigé par Adi Ophir, Michal Givoni et Sari Hanafi, Power of Inclusive Exclusion : Anatomy of the Israeli Rule in the Occupied Palestinian Territories, New York, Zone Books, 2009.
[3] Voir notamment Lisa Hajjar, Courting Conflict : the Israeli Military Court System in the West Bank and Gaza, Berkeley, University of California Press, 2005. Pour une étude plus synthétique, on pourra également se reporter à Sharon Weill, « The judicial arm of the occupation : the Israeli military courts in the occupied territories », International Review of the Red Cross, vol. 89, n°866, juin 2007, p. 395-420.
[1] Pascal, Pensées (1670).
[2] Voir notamment l’excellente synthèse de Neve Gordon, Israel’s Occupation, Berkeley, University of California Press, 2008, et l’ouvrage collectif dirigé par Adi Ophir, Michal Givoni et Sari Hanafi, Power of Inclusive Exclusion : Anatomy of the Israeli Rule in the Occupied Palestinian Territories, New York, Zone Books, 2009.
[3] Voir notamment Lisa Hajjar, Courting Conflict : the Israeli Military Court System in the West Bank and Gaza, Berkeley, University of California Press, 2005. Pour une étude plus synthétique, on pourra également se reporter à Sharon Weill, « The judicial arm of the occupation : the Israeli military courts in the occupied territories », International Review of the Red Cross, vol. 89, n°866, juin 2007, p. 395-420.
[4] Il ne s’agit pas ici de relativiser la tragédie des réfugiés de 1967, mais d’établir que la proportion d’exilés est beaucoup plus faible qu’en 1947-1949.
[5] L’annexion aurait en effet amené les Palestiniens à représenter plus d’un tiers des habitants de l’État d’Israël.
[6] « Gouvernement militaire » jusqu’en 1981, « Administration civile » par la suite.
[7] L’administration militaire est rattachée à la Coordination des Activités Gouvernementales dans les Territoires Occupés (COGAT), une unité du Ministère de l’Intérieur israélien.
[8] Ordres 92, 158, 291, entre autres. Les numéros correspondent aux ordres émis pour la Cisjordanie. La plupart ont un équivalent, sous un autre numéro, à Gaza.
[9] Ordres 58, 59, 291, 321, 364, 1.091, entre autres.
[10] Ordre 45.
[11] Ordre 267, modifié par les ordres 362 et 398.
[12] Ordre 379, modifié par l’ordre 398.
[13] Ordre 1015.
[14] Sauf si les autorités militaires en sont averties à l'avance et ont les noms de l'ensemble des participants…
[15] Les autorités militaires reprennent à leur compte la législation d’urgence adoptée par les Britanniques en 1945, en l’occurrence les articles 86 à 101.
[16] La dernière mise à jour des « directives sécuritaires » date de 2009, avec l’ordre 1651 (« Order Regarding Security Directives (Judea and Samaria) »), qui reprend, complète et/ou remplace les ordres précédents, dont l’ordre 378.
[17] C’est ce que l’on appelle la « détention administrative », toujours en vigueur.
[18] Articles 44 et 50 de l'ordre 378.
[19] Rappelons ici que l’État d’Israël n’a toujours pas, à ce jour, de frontières déclarées. D’où l’utilisation des guillemets.
[20] Amnon Rubinstein, « The Changing Status of the "Territories" (West Bank and Gaza) : From Escrow to Legal Mongrel », Tel Aviv University Studies in Law, vol. 8, 1988, p. 59-80.
[21] « The Extension of Power of Emergency Regulations Law (Judea and Samaria and the Gaza Strip – Adjudication of Offences and Legal Aid) », votée en 1977 et régulièrement amendée depuis.
[22] Et, jusqu’en 2005, à Gaza.
[23] Middle East Project of the Human Sciences Research Council of South Africa, Occupation, Colonialism, Apartheid ? A re-assessment of Israel’s practices in the occupied Palestinian territories under international law, mai 2009, p. 107.
[24] The Extension of Power of Emergency Regulations Law, op. cit, section 2. C’est moi qui souligne.
[25] Les Accords de Taba (« Oslo II », septembre 1995) ont divisé les territoires palestiniens en zones aux statuts divers : les zones A (18% de la Cisjordanie en 2011) sont sous la seule responsabilité de l’AP, les zones B (21%) sont le lieu d’un partage des responsabilités, et les zones C (61%) sont sous la seule responsabilité israélienne.
[26] Ordre 1659, article 10.F.
[27] Ibid, article 10.E.
[28] Amnesty International, Israël et Territoires occupés : note au Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination raciale, 2006.
[29] Cf supra.
[30] Chaïm Levinson, « Nearly 100% of all military court cases in West Bank end in conviction », Haaretz, 29 novembre 2011.
[30] Chaïm Levinson, « Nearly 100% of all military court cases in West Bank end in conviction », Haaretz, 29 novembre 2011.
[31] Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, Article 7, 2, h.
[32] Je n’évoque pas ici les tribunaux palestiniens, mais les tribunaux civils et militaires israéliens.
[33] Voir à ce propos la contribution de Céline Lebrun, infra.
[34] Je me permets ici de renvoyer aux autres contributions de l’ouvrage revenant sur les cas des Bédouins, des Palestiniens de Jérusalem ou des Palestiniens d’Israël. Voir, respectivement, les contributions d’Irène Steinert, de Ben Scribner et de Layla Damiri et Céline Lebrun.
[35] Orna Ben-Naftali, Aeyal Gross et Keren Michaeli, « Illegal Occupation : The Framing of the Occupied Palestinian Territory », Berkeley Journal of International Law, vol. 23, n°3, 2005, p. 551-614 (p. 584-585).
[35] Orna Ben-Naftali, Aeyal Gross et Keren Michaeli, « Illegal Occupation : The Framing of the Occupied Palestinian Territory », Berkeley Journal of International Law, vol. 23, n°3, 2005, p. 551-614 (p. 584-585).
[36] Chaïm Levinson, « Israel has 101 different types of permits governing Palestinian movement », Haaretz, 26 décembre 2011. Inutile de préciser que les colons sont dispensés de ce système de « permis ».
[37] Sur les transferts de compétences, voir notamment Jean-François Legrain, « Retour sur les Accords israélo-palestiniens », Maghreb-Machrek n°170, octobre-décembre 2000, p. 96-125.