En somme, Sangaré réussit le pari d’exposer, en un discours accessible et un style concis, la doctrine d’Haïdara et sa critique, en faisant ainsi une islamologie appliquée (M. Arkoun). Sa connaissance de la tradition musulmane combinée avec la maîtrise de la langue bambara, langue de Haïdara, lui ont grandement facilité la tâche. On peut espérer que son ouvrage soit un jalon pour qui veut découvrir l’islam en Afrique subsaharienne dans une optique islamologique. De même, on souhaite que son appel à une islamologie appliquée dans cette région soit entendu aussi bien par les chercheurs que par les institutions académiques.
Ahmed Taha Gueye
Cette recension a déjà fait l'objet d'une publication dans la Revue MIDEO [En ligne] , 39|2023 sous licence Creative Commons (BY NC ND).
Broché: 238 pages
Éditeur : Riveneuve (2 février 2023)
Collection : Pépites de poche
Langue : Français
ISBN-13: 978-2360136629
Éditeur : Riveneuve (2 février 2023)
Collection : Pépites de poche
Langue : Français
ISBN-13: 978-2360136629
Biographie de l'auteur et quatrième de couverture
Islamologue, maître de conférences à l'Université Clermont-Auvergne, Youssouf T. Sangaré est né au Mali en 1982. Ses travaux portent sur l'islam contemporain, en particulier les écrits de penseurs réformistes, et sur les relectures des sources islamiques par des érudits traditionnels. Lauréat du prix de thèse " Mohammed Arkoun en islamologie " (2018), il a publié Le Scellement de la prophétie en islam (2018) et Repenser le Coran et la tradition islamique : une introduction à la pensée de Fazlur Rahman (2017).
Souleymane Bachir Diagne est professeur dans les départements d'Études francophones et de Philosophie de l'Université de Columbia, à New York, où il dirige également l'Institut d'études africaines (IAS). Membre associé de l'Académie royale de Belgique et membre de l'American Academy of Arts and Sciences, il est l'auteur chez Riveneuve de Léopold Sédar Senghor, l'art africain comme philosophie (2007, 2019).
Souleymane Bachir Diagne est professeur dans les départements d'Études francophones et de Philosophie de l'Université de Columbia, à New York, où il dirige également l'Institut d'études africaines (IAS). Membre associé de l'Académie royale de Belgique et membre de l'American Academy of Arts and Sciences, il est l'auteur chez Riveneuve de Léopold Sédar Senghor, l'art africain comme philosophie (2007, 2019).
Grand oublié des études islamologiques, l’islam au sud du Sahara n’en reste pas moins un lieu où se reformulent les doctrines islamiques. Loin de la caricature héritée de travaux orientalistes ou des préjugés de certains auteurs arabo-musulmans, l’islam de l’Afrique subsaharienne offre des textes, des figures et des doctrines religieuses qui s’inscrivent pleinement dans les questions les plus actuelles : l’interprétation du Coran, islam et violence, la place de Muhammad et de sa famille dans la spiritualité musulmane, celle des femmes, le rapport entre théologie et politique, l’altérité… Autant de questions présentes chez le prédicateur malien Chérif Ousmane Madani Haïdara, figure majeure de l’islam ouest-africain d’aujourd’hui. Voici un nouvel éclairage sur les débats actuels au sein de l’islam.
Par Ahmed Taha Gueye
Étudiant la prédication de Chérif Ousmane Madani Haïdara (né en 1955), Youssouf Sangaré s’emploie tout d’abord à bousculer le confortable paradigme académique qui continue de séparer l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne. Pourtant cette séparation, s’accordent à dire l’A. et son préfacier, Souleymane Bachir Diagne, est un héritage d’une certaine anthropologie coloniale qui, par une mission idéologique et anhistorique, conduit à brosser un portrait caricatural de l’islam en Afrique subsaharienne. Méprisé, relégué et condamné, l’islam observé, ne pouvait pas participer, reprenons Senghor, au rendez-vous du donné et du recevoir ; ou bien, pour reprendre les termes de l’auteur, il n’avait pas sa place dans les études nobles de l’histoire islamique. Peut-être le concept puisé pour désigner cet islam en est-il l’illustration parfaite : l’islam noir, mal nommé, aurait dit Albert Camus, en ce qu’il supposerait selon Sangaré, « la fausse idée que l’islam référence, l’islam Arabe, serait immuable, non syncrétique transcendant les coutumes locales » (p. 27). Par conséquent, ajoute-t-il, l’islamologie œuvre inconsciemment à légitimer l’arabo-centrisme.
À la lumière de ce qui précède, l’A. appelle à la nécessité de mettre en place une islamologie appliquée sur les figures, tendances et doctrines de l’islam de cette région, ce qui n’a pas été toujours le cas, notamment dans les universités françaises. Pour mener à bien cette entreprise, il préconise de diversifier les études plutôt que de se consacrer seulement et exclusivement à l’étude des confréries soufies, et met en garde contre l’essentialisation de cet islam qui conduit à sa dés-historisation. L’A. ambitionne donc d’approcher la doctrine de Haïdara sous l’angle de l’islamologie appliquée, que Mohamed Arkoun appelait de ses vœux.
Sangaré divise son ouvrage en trois grandes parties : la première évoque le contexte postcolonial dans lequel Haïdara commence sa carrière de prédicateur ; la deuxième passe au crible sa doctrine et ses différentes pratiques religieuses ; la troisième et dernière examine la façon dont cette doctrine est actuellement écrite et enseignée dans différents pays d’Afrique subsaharienne. Nous nous proposons de développer dans cette présentation trois points qui, sans s’éloigner véritablement de la répartition de l’A., la rethématisent autrement. Chacun, à savoir l’islam des imams et des notables, l’opposition au wahhabisme et Haïdara et sa conception de l’islam, seront traités respectivement.
Au début de sa carrière de prédicateur, dans les années 1970, les marabouts et les imams avaient la mainmise sur la sphère religieuse. Convaincu que la pratique islamique est pervertie, corrompue et altérée, Haïdara ne ménage pas ses critiques à l’égard des notables incarnant l’islam. Visiblement, celle faite des marabouts était beaucoup plus atténuée. Cela serait dû au fait que, d’une part, Haïdara a été élevé dans un milieu soufi et, d’autre part, que les imams exerçaient plus d’influence que les marabouts. En tout état de cause, les imams subissent ses attaques aussi virulentes que provocatrices. Si initialement, signale l’A., Haïdara n’est pas pris au sérieux par les imams étant donné que son audience n’était pas considérable, son influence s’élargit avec le temps, lorsque son discours fustigeant le politique et le religieux embrasse le développement de l’industrie des cassettes audio. Pareille virulence n’est pas sans conséquence : politique et religieux s’emploient à réduire l’influence de Haïdara, ce qui explique que celui-ci ne gagne véritablement en importance qu’après le coup d’État militaire de 1991 à l’issue duquel le Mali entame une certaine démocratisation et libéralisation des voix critiques de quelque nature que ce soit.
Dans sa stratégie pour étriller l’islam des imams, Haïdara mobilise tout ce qui peut servir sa fin. Il utilise ainsi l’opuscule d’Ibn ʿAbd al-Wahhāb, Nawāqiḍ al-islam (Les annulatifs de l’islam) où sont listées les attitudes qui mériteraient l’excommunication. Ce recours au wahhabisme met en évidence l’erreur de ceux « qui présentent Haïdara comme celui qui s’est toujours opposé au wahhabisme et à son idéologie » ; il aurait en réalité critiqué cette tendance rigoriste de l’islam (jugé « étranger et arrogant ») à partir des années 1990, « lorsque les wahhabites locaux s’attaquent à lui, en réfutant certains de ses postures théologiques » (p. 50).
Élevé dans un milieu soufi et attaché à certaines de leurs pratiques telles l’intercession (al-tawassul), la célébration de la naissance du Prophète (al-mawlid al-nabawī), Haïdara entre naturellement en conflit avec les wahhabites dont il critique divers aspects : d’abord, il considère que cette doctrine est hostile aux valeurs africaines même celles qui ne font pas entorse à la religion. Ainsi, il estime que les adeptes de cette doctrine se distinguent de leurs concitoyens dans leur conduite, dans leur pratique religieuse et même dans leur tenue vestimentaire, et créent ainsi un facteur de discorde et un piétinement du savoir-vivre local. Par conséquent, affirme Sangaré, Haïdara « refuse cet islam mondialisé et déterritorialisé des wahhabites » (p. 57). Sur le plan doctrinal, Haïdara remet en cause l’usage wahhabite des sources, comme celui de certaines traditions attribuées aux Prophète qui se trouvent dans des recueils de hadiths dont l’authenticité n’est pas discutée (comme al-Buḫārī et Muslim). La plupart des hadiths récusés par Haïdara, évoquent la vie privée du Prophète et de sa famille véhiculant des informations qui cherchent, selon lui, à rabaisser le Prophète : « En quoi le fidèle musulman s’élève-t-il, spirituellement, en rentrant dans la chambre à coucher du Prophète ? » (p. 93). Si Haïdara avait recours aux textes wahhabites pour mieux critiquer les imams, l’argumentaire qu’il déploie contre les premiers rappelle le répertoire chiite, dont il nie, avec la dernière énergie, être un adepte. Pour l’A., ce débat témoigne que « les controverses actuelles, sur les sources musulmanes traversent aussi le sud du Sahara » (p. 99), réalité loin d’être conforme avec la représentation d’un « islam noir ».
Considérant le wahhabisme comme un islam étranger, Haïdara s’applique à concilier l’islam et les valeurs locales (mogoya) : c’est pourquoi dans ses prédications, l’accent est mis sur les nobles vertus du Coran. Mais, le concept théologique le plus fondamental dans sa doctrine est le serment d’allégeance (al-bayʿa) qu’il rend obligatoire, l’un de ses disciples l’appelant même « l’obligation oubliée (al-wāǧib al-mansī) ». Une telle conception entraîne une conséquence théologique considérable quant au statut de celui qui nie l’obligation du serment d’allégeance, jugé impie. Le discours de Haïdara et de ses disciples se modère pourtant avec le temps (« il n’est plus question […] d’excommunier clairement tout musulman qui ne fait pas le serment d’allégeance » (p. 74), puisqu’ils cherchent à asseoir une certaine légitimité religieuse sur la scène malienne. En faisant de tous ceux qui ne partageaient pas sa vision de l’islam au début de sa carrière de prédicateur des impies, il est légitime de se demander si Haïdara n’était pas tombé dans le tréfonds abyssal de l’extrémisme voyant qu’il n’y a de musulman que lui et ses quelques disciples ; avait-il conscience des conséquences religieuses, sociales, voire politiques que cela pouvait entraîner ?
À partir des années 2000, Haïdara devient une figure incontournable : son influence se manifeste plus précisément dans la célébration d’un Mawlid si populaire que le parlement malien vote en 2005 une loi accordant deux jours fériés à son occasion. Pour Sangaré, Haïdara a profité du succès de la célébration du Mawlid pour mettre en vedette sa propre figure : « Jadis il critiquait la filiation des imams locaux, Haïdara va mettre en avant la sienne : il sera un descendant du prophète, un chérif » (p. 148). Toutefois, ce recours à la généalogie chérifienne est en réalité une pratique connue chez les Haïdara.
Ayant affirmé sa doctrine sur la scène religieuse malienne, Haïdara travaille à sa diffusion et à sa préservation. C’est dans cette perspective que des livres sont écrits par les disciples et des écoles construites au Mali, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso.
En somme, Sangaré réussit le pari d’exposer, en un discours accessible et un style concis, la doctrine d’Haïdara et sa critique, en faisant ainsi une islamologie appliquée (M. Arkoun). Sa connaissance de la tradition musulmane combinée avec la maîtrise de la langue bambara, langue de Haïdara, lui ont grandement facilité la tâche. On peut espérer que son ouvrage soit un jalon pour qui veut découvrir l’islam en Afrique subsaharienne dans une optique islamologique. De même, on souhaite que son appel à une islamologie appliquée dans cette région soit entendu aussi bien par les chercheurs que par les institutions académiques.
À la lumière de ce qui précède, l’A. appelle à la nécessité de mettre en place une islamologie appliquée sur les figures, tendances et doctrines de l’islam de cette région, ce qui n’a pas été toujours le cas, notamment dans les universités françaises. Pour mener à bien cette entreprise, il préconise de diversifier les études plutôt que de se consacrer seulement et exclusivement à l’étude des confréries soufies, et met en garde contre l’essentialisation de cet islam qui conduit à sa dés-historisation. L’A. ambitionne donc d’approcher la doctrine de Haïdara sous l’angle de l’islamologie appliquée, que Mohamed Arkoun appelait de ses vœux.
Sangaré divise son ouvrage en trois grandes parties : la première évoque le contexte postcolonial dans lequel Haïdara commence sa carrière de prédicateur ; la deuxième passe au crible sa doctrine et ses différentes pratiques religieuses ; la troisième et dernière examine la façon dont cette doctrine est actuellement écrite et enseignée dans différents pays d’Afrique subsaharienne. Nous nous proposons de développer dans cette présentation trois points qui, sans s’éloigner véritablement de la répartition de l’A., la rethématisent autrement. Chacun, à savoir l’islam des imams et des notables, l’opposition au wahhabisme et Haïdara et sa conception de l’islam, seront traités respectivement.
Au début de sa carrière de prédicateur, dans les années 1970, les marabouts et les imams avaient la mainmise sur la sphère religieuse. Convaincu que la pratique islamique est pervertie, corrompue et altérée, Haïdara ne ménage pas ses critiques à l’égard des notables incarnant l’islam. Visiblement, celle faite des marabouts était beaucoup plus atténuée. Cela serait dû au fait que, d’une part, Haïdara a été élevé dans un milieu soufi et, d’autre part, que les imams exerçaient plus d’influence que les marabouts. En tout état de cause, les imams subissent ses attaques aussi virulentes que provocatrices. Si initialement, signale l’A., Haïdara n’est pas pris au sérieux par les imams étant donné que son audience n’était pas considérable, son influence s’élargit avec le temps, lorsque son discours fustigeant le politique et le religieux embrasse le développement de l’industrie des cassettes audio. Pareille virulence n’est pas sans conséquence : politique et religieux s’emploient à réduire l’influence de Haïdara, ce qui explique que celui-ci ne gagne véritablement en importance qu’après le coup d’État militaire de 1991 à l’issue duquel le Mali entame une certaine démocratisation et libéralisation des voix critiques de quelque nature que ce soit.
Dans sa stratégie pour étriller l’islam des imams, Haïdara mobilise tout ce qui peut servir sa fin. Il utilise ainsi l’opuscule d’Ibn ʿAbd al-Wahhāb, Nawāqiḍ al-islam (Les annulatifs de l’islam) où sont listées les attitudes qui mériteraient l’excommunication. Ce recours au wahhabisme met en évidence l’erreur de ceux « qui présentent Haïdara comme celui qui s’est toujours opposé au wahhabisme et à son idéologie » ; il aurait en réalité critiqué cette tendance rigoriste de l’islam (jugé « étranger et arrogant ») à partir des années 1990, « lorsque les wahhabites locaux s’attaquent à lui, en réfutant certains de ses postures théologiques » (p. 50).
Élevé dans un milieu soufi et attaché à certaines de leurs pratiques telles l’intercession (al-tawassul), la célébration de la naissance du Prophète (al-mawlid al-nabawī), Haïdara entre naturellement en conflit avec les wahhabites dont il critique divers aspects : d’abord, il considère que cette doctrine est hostile aux valeurs africaines même celles qui ne font pas entorse à la religion. Ainsi, il estime que les adeptes de cette doctrine se distinguent de leurs concitoyens dans leur conduite, dans leur pratique religieuse et même dans leur tenue vestimentaire, et créent ainsi un facteur de discorde et un piétinement du savoir-vivre local. Par conséquent, affirme Sangaré, Haïdara « refuse cet islam mondialisé et déterritorialisé des wahhabites » (p. 57). Sur le plan doctrinal, Haïdara remet en cause l’usage wahhabite des sources, comme celui de certaines traditions attribuées aux Prophète qui se trouvent dans des recueils de hadiths dont l’authenticité n’est pas discutée (comme al-Buḫārī et Muslim). La plupart des hadiths récusés par Haïdara, évoquent la vie privée du Prophète et de sa famille véhiculant des informations qui cherchent, selon lui, à rabaisser le Prophète : « En quoi le fidèle musulman s’élève-t-il, spirituellement, en rentrant dans la chambre à coucher du Prophète ? » (p. 93). Si Haïdara avait recours aux textes wahhabites pour mieux critiquer les imams, l’argumentaire qu’il déploie contre les premiers rappelle le répertoire chiite, dont il nie, avec la dernière énergie, être un adepte. Pour l’A., ce débat témoigne que « les controverses actuelles, sur les sources musulmanes traversent aussi le sud du Sahara » (p. 99), réalité loin d’être conforme avec la représentation d’un « islam noir ».
Considérant le wahhabisme comme un islam étranger, Haïdara s’applique à concilier l’islam et les valeurs locales (mogoya) : c’est pourquoi dans ses prédications, l’accent est mis sur les nobles vertus du Coran. Mais, le concept théologique le plus fondamental dans sa doctrine est le serment d’allégeance (al-bayʿa) qu’il rend obligatoire, l’un de ses disciples l’appelant même « l’obligation oubliée (al-wāǧib al-mansī) ». Une telle conception entraîne une conséquence théologique considérable quant au statut de celui qui nie l’obligation du serment d’allégeance, jugé impie. Le discours de Haïdara et de ses disciples se modère pourtant avec le temps (« il n’est plus question […] d’excommunier clairement tout musulman qui ne fait pas le serment d’allégeance » (p. 74), puisqu’ils cherchent à asseoir une certaine légitimité religieuse sur la scène malienne. En faisant de tous ceux qui ne partageaient pas sa vision de l’islam au début de sa carrière de prédicateur des impies, il est légitime de se demander si Haïdara n’était pas tombé dans le tréfonds abyssal de l’extrémisme voyant qu’il n’y a de musulman que lui et ses quelques disciples ; avait-il conscience des conséquences religieuses, sociales, voire politiques que cela pouvait entraîner ?
À partir des années 2000, Haïdara devient une figure incontournable : son influence se manifeste plus précisément dans la célébration d’un Mawlid si populaire que le parlement malien vote en 2005 une loi accordant deux jours fériés à son occasion. Pour Sangaré, Haïdara a profité du succès de la célébration du Mawlid pour mettre en vedette sa propre figure : « Jadis il critiquait la filiation des imams locaux, Haïdara va mettre en avant la sienne : il sera un descendant du prophète, un chérif » (p. 148). Toutefois, ce recours à la généalogie chérifienne est en réalité une pratique connue chez les Haïdara.
Ayant affirmé sa doctrine sur la scène religieuse malienne, Haïdara travaille à sa diffusion et à sa préservation. C’est dans cette perspective que des livres sont écrits par les disciples et des écoles construites au Mali, en Côte d’Ivoire et au Burkina Faso.
En somme, Sangaré réussit le pari d’exposer, en un discours accessible et un style concis, la doctrine d’Haïdara et sa critique, en faisant ainsi une islamologie appliquée (M. Arkoun). Sa connaissance de la tradition musulmane combinée avec la maîtrise de la langue bambara, langue de Haïdara, lui ont grandement facilité la tâche. On peut espérer que son ouvrage soit un jalon pour qui veut découvrir l’islam en Afrique subsaharienne dans une optique islamologique. De même, on souhaite que son appel à une islamologie appliquée dans cette région soit entendu aussi bien par les chercheurs que par les institutions académiques.