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Dimanche 26 Juillet 2015

[Blog Mediapart] L’Europe doit se mobiliser contre l’exécution de Mohamed Morsi. Par Sonia Herzbrun


Un collectif d'universitaires et d'intellectuels se mobilisent contre l'exécution programmée de l'ancien président égyptien démocratiquement élu Mohamed Morsi.




Publié le 21 juillet 2015

Par Sonia Herzbrun

Deux ans se sont écoulés depuis qu'en juillet 2013 un coup d'État militaire a mis fin, en Égypte, au processus de transition démocratique issu de la révolution de janvier 2011. Sous la férule du maréchal Abd-el Fattah Al-Sissi l'Égypte est devenu une terre de peur et d'oppression : la justice est aux ordres des détenteurs du pouvoir,  toute opposition politique est censurée et réprimée - parfois sauvagement - la pratique de la torture et des exécutions extra-judiciaires y est systématique et le nombre de journalistes emprisonnés ne fait que croître.


L’Europe s’est gravement et durablement discréditée  en entérinant dès juillet 2013, et sans sans la moindre protestation,  la mise à mal d'un processus de transition démocratique dont elle se disait depuis toujours le promoteur. Depuis lors, elle s’est singularisée en s’abstenant de toute forme de critique devant l’irrésistible  dérive autocratique du régime dont le règne a été marqué par des massacres à l'ampleur inédite dans l’histoire contemporaine de l’Égypte. Les condamnations à mort - collectives - des opposants, pas seulement des membres du mouvement des Frères musulmans, se sont multipliées. La menace d’exécution de Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu de l’histoire politique égyptienne, dont la condamnation à mort a été confirmée le 16 juin, est désormais tout à fait crédible.

Opposés à la peine de mort, nous le sommes tout spécialement dans une configuration où un tel forfait signerait la violation particulièrement cynique de toutes les valeurs démocratiques que, quelles que soient nos opinions politiques ou nos lectures respectives de l’origine de la crise égyptienne, nous entendons promouvoir en tant qu’elles constituent le socle commun à notre humanité. La Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales a du reste depuis longtemps proclamé l'abolition de  la peine de mort. Mais il faut également rappeler que l'assassinat de Mohamed Morsi, comme celui d'autres dirigeants des Frères Musulmans, constituerait non seulement une violation criante des droits humains, mais une faute politique majeure. Le courant des Frères Musulmans représente, qu'on le veuille ou non, une partie de la population égyptienne, conservatrice certes, mais néanmoins très solidement implantée dans le pays. En cherchant à l'éradiquer et en rendant impossible toute issue démocratique, le maréchal Al-Sissi ne va plus trouver en face de lui que  des "jihadistes" desperados ne connaissant que le langage des armes et des explosifs. Comme chaque fois qu’elle contredit expressément ses principes, l’Europe adresse  aujourd'hui par son silence un message terriblement contreproductif au monde arabo musulman.  

Pour une fois, les préoccupations éthiques et celles de la Realpolitik convergent donc. C'est pourquoi c'est avec une particulière conviction que nous demandons  aux responsables européens d'exiger du pouvoir militaire égyptien la non application des peines capitales prononcées contre Mohamed Morsi ou n'importe lesquels des opposants condamnés.

 
Premiers signataires : Bertrand Badie, Karim-Émile Bitar, François Burgat, Sonia Dayan-Herzbrun, Ivar Ekeland, Vincent Geisser, François Gèze, Nilüfer Göle.

Retrouvez cet article et la pétition sur le blog de Mediapart.




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