Ainsi, Kahina Bahloul a récemment publié sur le premier site intellectuel musulman en France Les Cahiers de l’islam (qui est aussi une revue), un argumentaire, références théologiques à l’appui, pour prouver la possibilité de l’imamat féminin
En plusieurs endroits de son œuvre, le grand islamologue Jacques Berque, titulaire pendant vingt-cinq ans de la chaire d’Histoire sociale de l’Islam contemporain au Collège de France, dispense dans le langage tout à la fois poétique et savant qui était sa marque, son I have a dream à la Luther King. Dans L’Islam au temps du monde par exemple, il imaginait que « revenir aux plénitudes cosmiques en même temps qu’aux disponibilités rationnelles du message, ce serait pour l’Islam moderne redéployer l’éventail de potentiels que l’histoire malheureuse a rompu » [1]. Peu avant sa mort en 1995, il lançait aussi à son comparse Jean Sur :
Supposez qu’il se crée en France non pas un Islam français, mais un Islam de France, disons pour simplifier, un Islam gallican, c’est-à-dire un Islam qui soit au fait des préoccupations d’une société moderne, qui résolve les problèmes qu’il n’a jamais eu à résoudre dans ses sociétés d’origine qui, pour des raisons historiques, ne sont pas des sociétés du niveau du nord de la Méditerranée. Figurez-vous le retentissement qu’aurait cet Islam de progrès sur le reste de la zone islamique [2].
Supposez qu’il se crée en France non pas un Islam français, mais un Islam de France, disons pour simplifier, un Islam gallican, c’est-à-dire un Islam qui soit au fait des préoccupations d’une société moderne, qui résolve les problèmes qu’il n’a jamais eu à résoudre dans ses sociétés d’origine qui, pour des raisons historiques, ne sont pas des sociétés du niveau du nord de la Méditerranée. Figurez-vous le retentissement qu’aurait cet Islam de progrès sur le reste de la zone islamique [2].
Or, plus de deux décennies après que Jacques Berque eût formulé ce vœu pieu, réseaux sociaux et sites communautaires musulmans bruissent d’appels à s’émanciper d’une partie de la Tradition musulmane (critique du fiqh, relativisation du corpus de hadîths, contextualisation et réinterprétation du Coran…) et proposent des paradigmes nouveaux aux musulmans qui vivent dans un environnement sécularisé. Ceux-ci ne manquent pas de provoquer des réactions des tendances conservatrices. Les débats se sont intensifiés ces dernières années au fur et à mesure que l’archipel réformiste émergeait. On relève un très net effet d’accélération à la suite des attentats de 2015 en France. Ainsi reviendrons nous dans le présent article sur les disputations qui ont émaillé l’espace discursif musulman français (ou francophone, en incluant un groupe Facebook géré par des Belges) principalement ces trois dernières années, avec un pic en 2017 et 2018.
Le tournant des attentats de 2015
Outre les effets sécuritaires et politiques que l’on connaît, les attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, par les frères Kouachi et Amédy Coulibaly (respectivement 11 et 4 morts), puis ceux du 13 novembre contre le Bataclan et une série de cafés parisiens ainsi qu’aux abord du Stade de France (131 morts) ont eu l’effet d’un accélérateur de débats critiques entre différentes sensibilités de l’Islam en France et au-delà.
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Le tournant des attentats de 2015
Outre les effets sécuritaires et politiques que l’on connaît, les attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, par les frères Kouachi et Amédy Coulibaly (respectivement 11 et 4 morts), puis ceux du 13 novembre contre le Bataclan et une série de cafés parisiens ainsi qu’aux abord du Stade de France (131 morts) ont eu l’effet d’un accélérateur de débats critiques entre différentes sensibilités de l’Islam en France et au-delà.
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