Les cahiers de l'Islam
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Jeudi 4 Juin 2015

L'école française, cancre en arabe

Par Juliette Bénabent,



Trois millions de personnes le parlent en France. Pourtant, il y est peu ou mal enseigné. Par manque de volonté politique, par crainte du communautarisme. Quitte à abandonner le terrain aux associations religieuses.
Au lycée Jacquard, dans le 19e arrondissement de Paris, ils sont près de deux cents chaque semaine. Deux cents élèves de la seconde à la terminale, issus d'une quarantaine de lycées, qui étudient l'arabe en « enseignement inter-établissements ». « Très motivés », selon le proviseur adjoint, Damien Lucas, ils viennent souvent de loin, un soir ou le mercredi après-midi. Chaque année, leur nombre augmente de plusieurs dizaines. A Paris, seulement huit lycées et trois collèges proposent l'arabe en langue vivante — tous situés rive droite. Le courrier officiel du rectorat qui, en 2012, incitait sept établissements de la rive gauche à les imiter a essuyé sept refus... « La rareté des classes d'arabe est un mystère pour moi, reconnaît Damien Lucas. C'est une richesse pour l'établissement, et un élément positif à verser au dialogue entre les différentes composantes de notre société. ».

Langue officielle de vingt-cinq pays, l'arabe est l'une des six langues de l'ONU. Environ trois millions de personnes le parlent en France, où son enseignement a une longue histoire : entré au Collège de France à la fin du XVIe siècle, il est au programme de l'Ecole spéciale des langues orientales dès sa création, en 1795. L'agrégation d'arabe existe depuis 1905, le Capes depuis 1975. Xavier North, ancien délégué général à la langue française et aux langues de France, énonce « un triste paradoxe : nous sommes l'un des seuls pays occidentaux à offrir un enseignement de l'arabe au sein de l'école publique, et dont le patrimoine intellectuel compte d'immenses arabisants. Cette belle tradition est contrecarrée par ce qu'il faut bien appeler une ghettoïsation de cet apprentissage. » A l'Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales), le professeur Luc Deheuvels résume : « Dans un contexte où tout ce qui a trait à l'islam est suspect, l'enseignement de l'arabe souffre d'une mauvaise image. Nous devons pourtant le considérer comme une grande langue de la mondialisation, et plus seulement comme celle d'une communauté religieuse. ».
Cours d'arabe au collège Louis Germain de Saint Jean de Védas en avril 2015.  Photo: Alexandra Frankewitz/Transit pour Télérama
Cours d'arabe au collège Louis Germain de Saint Jean de Védas en avril 2015. Photo: Alexandra Frankewitz/Transit pour Télérama

Sacralisé par le Coran, au VIIe siècle, l'arabe en est indissociable : souvent, l'étude du texte fondateur est intimement liée à celle de la langue. Réussir à laïciser l'apprentissage de l'arabe n'est pas une petite affaire, comme on le voit à l'école primaire. Il y est étudié par près de quarante mille élèves, dans le cadre des Elco (enseignements de langue et de culture d'origine). Créés dans les années 1970, au départ pour les enfants d'immigrés, ces cours sont dispensés par des enseignants étrangers, selon des accords bilatéraux entre la France et les pays concernés (1) . La notion de laïcité y est parfois totalement absente. Une ancienne inspectrice se souvient « avoir vu des versets du Coran dans des cahiers de CE2, ou des enseignants inscrire au tableau la date de l'hégire, le calendrier musulman ! » Maintes fois critiqués pour leur médiocrité linguistique et leur risque de « renforcer les références communautaires », selon un rapport du défunt Haut Conseil à l'intégration, les Elco, de plus, « ont eu pour effet pervers l'absence de développement d'un enseignement franco-français », selon Bernard Godard, ancien spécialiste de l'islam au ministère de l'Intérieur (2) .
Démonstration au collège et au lycée. Ici, les cours d'arabe sont assumés par l'Education nationale et ne se réfèrent jamais au Coran. Mais ils ne concernent plus que sept mille six cents collégiens et lycéens dans le public — où ils sont déjà vingt-et-un mille trois cents à apprendre le chinois. « On conserve des Elco très contestables pour maintenir un contact avec la culture d'origine, et ce besoin disparaîtrait en sixième, quand les cours dépendent de l'Etat ? C'est absurde », raille Bernard Godard. Dans soixante-quatre dé­partements, aucun collège n'enseigne l'arabe ; dans trente-trois, aucun lycée. Rien, par exemple, dans toute la Corse, l'Oise ou la Seine-et-Marne. A Lyon, Alice, 15 ans, passionnée par cette langue, a dû suivre les cours à distance du Cned, comme environ deux mille élèves. « Les collèges qui le proposent sont en grande banlieue, à Vaulx-en-Velin ou à Vénissieux. On sent bien la stigmatisation qu'implique cette offre marginalisée », regrette sa mère.
Le chinois, la musique, le théâtre : pour rendre leur établissement attrayant, principaux et proviseurs pensent à tout... sauf à l'arabe. « Ce sera le souk » ; « Mon collège deviendrait l'antichambre de la prison » ; « Mes élèves juifs seraient choqués »... Des arguments stupéfiants pour les inspecteurs d'arabe qui les rapportent. Bruno Levallois, ancien inspecteur général de l'Education nationale, s'emporte : « On confond tout : la langue arabe et l'islam, la population arabophone et la délinquance. Un recteur du Midi m'a dit : ''Je ne veux pas d'cchez moi." Un autre, dans le Rhône, était tout fier d'avoir nommé un professeur d'arabe... en prison ! » Certains collèges proposent l'arabe mais dissuadent les familles d'y inscrire leurs enfants. Yahya Cheikh, agrégé chargé des cours au lycée Jacquard, se souvient d'un principal de banlieue parisienne qui préférait conseiller l'espagnol : « Il espérait qu'avec moins d'élèves la classe d'arabe fermerait. » A Lille, un projet de cursus bilangue anglais-arabe s'est heurté au refus d'un établissement, qui arguait le manque de place, et au chantage d'un autre, qui voulait bien accueillir la langue arabe, à condition d'ouvrir aussi une classe de chinois ! « Le virage est encore à prendre, confirme l'inspecteur général d'arabe Michel Neyreneuf. Nous avons besoin de construire des générations de bons arabisants, cette langue offre de larges perspectives économiques et culturelles. Mais les recteurs et chefs d'établissement convaincus sont encore trop rares. ». Lire la suite sur Telerama.fr.





1.Posté par mmamouni le 07/04/2017 12:01
je n aime pas votre titre je trouve que sa rabaisse les élève comme moi qui son a la section arabe de ce college

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