Inauguration de la Mosquée de Paris en 1926
Quand la République laïque finançait l’islam en métropole
Par Alain Gresh, 5 octobre 2015
« Deviendrez-vous clérical, manquerez-vous à vos principes, parce que vous donnez des instructions à votre ambassadeur de certaines démarches auprès du pape ? S’il en est ainsi, moi, je suis musulman. » L’homme qui défend, ce 22 janvier 1925, devant une Chambre des députés où le Cartel des gauches est devenu majoritaire, le projet de rétablissement des relations diplomatiques avec le Vatican n’est pas un inconnu. Aristide Briand a été le rapporteur de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat ; il en est le principal architecte, avec Jean Jaurès.
Lire « Aux origines des controverses sur la laïcité », Le Monde diplomatique, août 2003. Lui, musulman ? Briand rappelle que, durant la guerre de 1914-1918, alors que le chérif de La Mecque avait rompu avec l’empire ottoman et rallié l’axe franco-britannique, il avait « organisé un pèlerinage magnifique ! Nous avons payé tous les frais : les frais de voyage et les frais d’hôtellerie. Et si vous saviez le bienheureux effet qu’il en est résulté dans nos possessions ! Et j’ai promis une mosquée ; elle est bâtie. Vous voyez à quel point ma laïcité a été compromise ! ». La création de deux hôtelleries à la Mecque et à Médine avait été votée par la Chambre le 9 décembre 1915, qui avait dégagé pour ce faire une somme de 500 000 francs.
La mosquée dont il parle, c’est celle qui sera inaugurée à Paris en 1926. Le 30 juin 1920, Edouard Herriot, alors simple député, décortiquait devant la chambre le projet de financement d’un Institut musulman et d’une mosquée à Paris. « Et la séparation des Eglises et de l’Etat ? », l’interrogeait un de ses confrères, n’y a-t-il pas « une contradiction » avec la loi de 1905 ? Herriot rétorquait : « Nous nous sommes préoccupés de cette question. L’Etat français reconnaît aux citoyens français des colonies le droit de pratiquer leur culte, quel qu’il soit. Il n’y a aucun inconvénient à donner aux musulmans une mosquée puisque très légitimement nous donnons aux catholiques des églises, aux protestants des temples et aux israélites des synagogues. »
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